Disclaimer : Les personnages et l’univers de Gundam
Wing ne m’appartiennent pas…je rêve du jour où les copyrights deviendront
libres !
Petite précision : je vous conseille vivement pour
votre santé émotionnelle de vous munir pour la lecture de cette…chose, d’un
paquet de clinex ou du rouleau pâtissier de votre môman. Tout cela dépend de quel côté vous allez vous
positionnez…Quoiqu’il en soit, moi je suis innocente et je décline toute
responsabilité sur l’action des personnages…^^
CREPUSCULE
Alors le calme semblait enfin
revenu à Al-jirma, la mécanique trop connue de la guerre s’ébranlait…
Le journal du soir touchait à sa
fin, c’était une heure de grande écoute en Afrique noire et en Europe. Sally
allait éteindre la télévision lorsque l’écran se mit à grésiller avant que le
présentateur ne disparaisse. Tous relevèrent la tête et rencontrèrent alors la
silhouette d’un homme à la longue chevelure, ses traits habillements dissimulés
derrière un jeu d’ombre et de lumière.
Inconsciemment Relena frissonna,
elle n’aimait pas cet individu. Heero et Millardo entrèrent au même moment et
se figèrent à leur tour face au poste. L’apparition de cet homme ne pouvait
signifier qu’une chose.
« La mainmise des Sphères
Unifiées n’a que trop duré…Nous avons prévenu le gouvernement et revendiqué nos
droits, mais personne ne nous a entendus…Nous, les Opposants, nous proclamons
le droit à l’armement comme un moyen légitime de se défendre, nous revendiquons
l’état nation et la défense de nos frontières, nous ne voulons pas voir disparaître
nos pays et nos traditions sous le prétexte d’unifier les Hommes ! Nous,
les Opposants, nous allons montrer aux pacifistes à quel point leurs idéaux
sont vains. En tant que dirigeant de cette organisation, je pose un ultimatum
de 48 heures au président des Sphères Unifiées pour démanteler la Zone Unifiée,
sans quoi, chers Citoyens du Monde, vous constaterez comme les armes peuvent se
savoir convaincantes. »
L’image sauta alors et le sombre
individu disparut au profit d’un présentateur livide.
Pendant quelques secondes, tous
restèrent silencieux, certains envahis par l’inquiétude, d’autres par la rage
ou tout simplement, par la lassitude. C’était reparti. Ils n’étaient pas
parvenus à éviter ce conflit.
-Duo, contactes Howard, dis-lui
d’approcher son croiseur des côtes occidentales méditerranéennes au plus vite,
intervint alors une voix assurée qui imposait l’obéissance.
-Sally, mets en alerte les
groupements de résistance et que tous ceux qui sont près à se battre puissent
le faire.
Le petit blond se tourna alors
vers Wufei.
-Tu peux contacter Une et lui
donner le feu vert pour la livraison des armements ?
Le petit brun fit volte face et
s’exécutât, lui adressant un imperceptible signe d’obtempération.
-Maître Quatre…
Le jeune homme se tourna alors vers
Raschid et acquiesça, le chef des Maganac hocha la tête et disparut aussitôt.
Le ton assuré et l’expression
déterminée du prince du désert s’effacèrent aussitôt qu’il eut donné ses
instructions, faisant place à son véritable sentiment, la peine.
Relena le regarda, un instant
admirative. Elle avait toujours été très impressionnée par cette capacité qu’il
avait à prendre les choses en main dans les moments les plus désespérés,
faisant abstraction de ses craintes personnelles pour aller de l’avant. Elle savait
à quel point Quatre pouvait se montrer redoutable lorsqu’il s’emportait, le
heurter n’était jamais quelque chose de recommandable, or, il venait de définir
le chef des Opposants comme son ennemi, et elle savait qu’il allait faire tout
ce qu’il lui serait possible pour l’arrêter, même s’il fallait pour cela qu’il
aille à l’encontre de sa véritable nature.
Quatre l’avait aidée à comprendre
le chemin qu’ils s’étaient destinés. C’étaient des pilotes de Gundams, leurs
buts, qui leurs avaient d’abord été dictés étaient rapidement devenus des
quêtes personnelles. C’était ça qui rendait leur lutte aussi profonde et
passionnée, ils se battaient avec toute leur âme, guidés par une volonté rare
de ne pas renoncer, ils se battaient pour trouver un sens à leur existence.
C’est la raison pour laquelle Relena les avait soutenus et leur avait toujours
offert une terre d’accueil, une halte à cette lutte incessante pour
l’existence…à présent, qu’elle les connaissait mieux, elle comprenait pourquoi
ils n’avaient jamais cessé de se battre. Parce qu’ils avaient un grand cœur,
capable d’embrasser l’humanité toute entière…les petits princes…ce nom leur
était destiné.
La jeune fille s’approcha alors et
pris doucement la main de Quatre entre les siennes, elle n’aimait pas voir une
telle tristesse dans les yeux de son ami. Le petit blond se retourna aussitôt
et son expression se radoucit en rencontrant le pâle sourire de la jeune
princesse. Elle s’inquiétait pour lui.
-Je suis désolé Relena. Nous
n’avons pas su empêcher ce conflit.
-Quatre…murmura-t-elle, touchée
par sa peine, ce n’était pas à vous de préserver la paix…
Le prince du désert se crispa un
instant, ressentant le profond sentiment de culpabilité qui habitait la jeune
fille.
-Je crois malheureusement qu’aussi
longtemps que les Hommes existeront, il y aura des conflits, tu n’y peux rien,
telle est ainsi faite la nature de l’être humain, dit-il alors d’une voix
étrangement calme.
Un éclair de surprise traversa le
visage de la princesse. Elle ne s’attendait pas à entendre ça de la part de
Quatre.
-Cependant, reprit-il, il ne faut
pas perdre espoir, il y a de bonnes choses en ce monde. Nombreux sont ceux qui
désirent une paix véritable. Nous ne sommes pas seuls à nous battre Relena.
Bien sûr qu’il y aura toujours des gens pour venir saccager ce que certains ont
mis tant de temps à construire. C’est tellement plus facile de détruire tout ce
qui n’est pas en accord avec nous, tellement plus rapide d’utiliser la force
pour soumettre…mais ça ne mène à rien d’agir ainsi, tu le sais certainement
mieux que personne. Nous devons montrer au monde à quel point ceux qui ont de
telles pensées sont dans l’erreur, mais à présent c’est différent, car je suis
convaincu que cet avis est aujourd’hui partagé par nombre d’Hommes.
Relena lui sourit faiblement, il
avait raison, ils n’étaient plus seuls, mais cela ne l’empêchait pas pour
autant d’être inquiète. Quatre n’eut pas besoin qu’elle s’exprime par des mots
pour comprendre ses sentiments et doucement, il la serra dans une promesse
rassurante. La jeune fille referma une main crispée sur sa chemise et
l’étreignit à son tour.
-Je t’en prie Quatre, ne te lances
pas dans des choses inconsidérées.
Le petit blond sourit tristement à
ses paroles et la serra un peu plus contre lui. Il releva alors la tête et
rencontra Millardo et Heero, face à lui, puis Noin et Trowa, un peu plus en
retrait. Il comprit soudain la peur de Relena, cette crainte qui faisait vibrer
son cœur. Toutes les personnes qu’elle aimait allaient s’engager dans cette
guerre. Même Iria qu’elle avait réussi jusque-là à épargner. Il mesurait à
présent à quel point cette situation pouvait être difficile pour elle, et
pourtant, elle n’avait jamais tenté de les dissuader d’intervenir…Heero avait
raison, Relena était forte. La plus forte. [1]
La princesse se redressa alors à
son tour et ils s’écartèrent l’un de l’autre.
-Je ne laisserais personne faire
de mal à Iria. Je te le promets.
Relena se plongea un instant dans
ses yeux célestes, encore impressionnée par cette capacité qu’il avait à
percevoir les autres. Une lueur de surprise traversa soudain son regard et son
visage se teinta d’un tendre sourire.
-Je sais, fit-elle doucement.
*****************************
Les heures qui suivirent, les
pilotes restèrent dans l’attente car Iria leur avait demandé de ne pas
s’engager. Et malgré l’opposition de Quatre à cette décision, elle était restée
ferme sur ses intentions. Elle ne voulait pas s’engager, mais il fallait être
réaliste, Sank allait essuyer un nouveau conflit. La guerre était en marche,
d’autant plus que des soldats et des armures mobiles étaient déjà présents sur
les terres du royaume. C’étaient des Résistants, qui, dès l’annonce des
Opposants, avaient spontanément rejoint le pays pacifiste. Iria, ne pouvant les
laisser ainsi exposer leurs vies, avait demandé à ce que des armures mobiles
lui soient envoyées.
Et en même temps qu’elle
accueillait les rebelles et que l’évacuation de Newport City se mettait en
place, elle annonçait officiellement ce que tous savaient déjà :
Elle se retirait des Sphères
Unifiées et réaffirmait sa volonté pacifiste. Cette décision enflamma les
dirigeants de la Zone Terrestre et les épyons terros rirent sous cape :
C’était une occasion rêvée pour eux, cela leur permettait d’attaquer le pays
pacifiste en toute légitimité.
Le petit royaume s’apprêtait, une
fois encore, à s’opposer à la folie destructrice des Hommes.
Dès que le cameraman lui fit signe
que la liaison était interrompue, Iria poussa un profond soupir et s’effondra
dans son siège, son regard se fit alors plus tourmenter. Elle s’inquiétait pour
les citoyens. Elle ne savait que trop bien ce que la guerre représentait pour
eux, elle avait vécu la première dans l’anonymat du peuple…perdre toute notions
de ce qui nous raccroche à l’existence telle que l’on l’avait connue…vivre au
rythme des alertes et des évacuations, être saisit au ventre par une angoisse
permanente de voir surgir ces terrifiantes machines de destruction que sont les
armures mobiles, ravageant tout et semant mort et souffrance dans leurs sombres
sillons. Le peuple de Sank avait déjà enduré tant d’épreuves…Mais à présent
c’était différent, ils n’appréhendaient plus la guerre de la même manière. Les
citoyens du royaume pacifiste n’étaient plus les Hommes soumis ou sauvages que
l’alliance avait fait d’eux. Relena avait rendu à son peuple sa véritable
identité. Par sa spontanéité et sa générosité, elle avait su apporter chaleur à
leurs cœurs refroidis. Frappés par la justesse et la grandeur de la cause de
cette princesse destituée, c’est tout naturellement qu’ils lui rendirent son
pouvoir, promettant, comme le veut le serment d’allégeance, obéissance et
loyauté dans les décisions de la famille royale. Les citoyens de Sank avaient
retrouvé leur fierté et allaient découvrir la véritable force qui résidait en
chacun d’eux.
Le peuple pacifiste retrouva sa
prestance et son influence d’antan, et c’est ainsi qu’ils furent les premiers à
s’opposer à l’armée de Mariemeia.
Aujourd’hui, elle savait qu’ils
étaient avec elle, mais elle ne pouvait s’empêcher de se sentir responsable.
-C’était la meilleure chose à
faire Mademoiselle.
La princesse sortit de sa
réflexion et releva la tête vers la jeune fille qui venait de s’approcher.
-Je sais…mais cette décision
expose le royaume aux plus grands des dangers…
Dorothy sourit faiblement à la
princesse et attendit que le personnel des médias soit sortit, les laissant
seules avec Allan et Dave.
-Oui Mademoiselle, vous avez
raison, vous exposez Sank aux plus grands des dangers, mais il peut aussi être
la terre la plus protégée. Ne refusez pas l’aide de ceux qui veulent vous
défendre par les armes, ils n’en demeurent pas moins honorables.
Iria fixa Dorothy puis interrogea
du regard les autres protagonistes. Ils semblaient s’accorder avec les propos de
la jeune fille.
La princesse baissa alors la tête
et croisa ses mains sur son bureau. Elle resta ainsi plusieurs minutes
totalement immobile, pesant le pour et le contre. Elle ne tenait pas
particulièrement à les mêler à ce conflit, même si elle savait cela inévitable,
le plus tard serait le mieux. Elle savait que c’était égoïste de sa part mais
elle ne voulait pas imposer ça à Quatre et Heero. Elle s’angoissait rien qu’à
l’idée qu’ils puissent ainsi exposer leurs vies.
-Très bien, fit-elle finalement
d’une voix résignée, je vais le leur demander.
Allan vint alors poser une main
amicale sur son épaule, la jeune fille releva la tête et croisa son regard
chaleureux, il lui assurait que tout se passerait bien. Son visage se détendit
alors et elle lui sourit doucement.
*****************************
-Très bien, nous serons sur place
demain en début d’après-midi.
Quatre, entourés des autres
pilotes, ne put s’adresser personnellement à la princesse. Il se contenta d’un
doux regard et d’un faible sourire pour l’encourager à tenir bon. Iria
s’empourpra légèrement et répondit à son geste.
La communication fut alors coupée
et ils sortirent du salon. Relena les attendaient dans le couloir, elle ne
pouvait pas communiquer avec la nouvelle princesse et ils ne devaient jamais
évoquer qu’elle soit encore en vie. Elle se sentait terriblement frustrée
d’être ainsi éloignée d’elle, mais il ne pouvait en être autrement. Quatre fut
le premier à sortir, il l’éloigna un peu des autres et l’informa qu’ils allaient
devoir partir demain matin à l’aube. Le regard de la jeune fille se brisa alors
et ses yeux se remplirent de larmes, elle le savait pourtant, elle s’y était
préparée, mais c’était plus fort qu’elle. Quatre, face à elle, la prit alors
par les épaules et la fit reculer un peu plus. Relena le remercia
intérieurement pour son geste, elle ne tenait pas à ce que Heero la voit ainsi,
c’était déjà assez difficile pour lui. L’annonce d’hier soir l’avait
suffisamment perturbée…Elle avait vu dans ses yeux le bouleversement de cette
nouvelle, aussitôt il s’était renfermé et son regard était redevenu froid. Le
soldat venait de refaire son apparition. Elle ne pouvait pas lui en tenir
rigueur, mais elle ne pouvait s’empêcher d’avoir peur, peur de le perdre.
Le pilote aux yeux topaze sortit
à son tour, il aperçut aussitôt les deux jeunes gens et resta un instant à les
fixer. Sans ajouter un mot, il se détourna alors et suivit les autres à la
salle de réunion.
La jeune fille se tassa un peu
plus en sentant le regard d’Heero peser sur elle, ça n’allait pas bien,
vraiment pas bien.
-Relena, l’appela alors une voix
douce et calme, ça va aller. N’attribues pas l’attitude d’Heero à un changement
de ses sentiments à ton égard. Vois-tu, il est en train de changer, et il ne sait
plus vraiment où il en est…
En son fort intérieur, Quatre
avait toujours redouté l’annonce de cette guerre…comment Heero allait-il réagir
lorsqu’il se retrouverait confronté à la guerre ? Il commençait tout juste
à découvrir l’humanité qu’il avait en lui, et à apprécier la vie. Et voilà que
l’on lui demandait de retourner se battre, de redevenir le soldat dont il avait
mis tant de temps à se détacher…comment allait-il réagir à ça ?
-Je sais…lui répondit faiblement
la jeune fille, mais je n’aime pas le voir ainsi.
Quatre lui sourit et lui
effleura doucement le visage dans un geste rassurant.
-Ca va aller…ne t’en fais pas.
Face à l’intention de son ami,
Relena s’apaisa finalement et un faible sourire de reconnaissance se dessina
sur ses lèvres.
-Je dois aller le voir, dit-elle
d’un ton déjà plus assuré.
La princesse s’apprêtait à
partir lorsqu’il la retint.
- Attends.
La jeune fille s’arrêta dans son
mouvement et se tourna vers le petit blond. Quatre chassa alors de ses yeux les
larmes qui menaçaient de s’écouler et réarrangea les quelques mèches qui
tombaient en désordre.
-Voilà, fit-il lorsqu’il eut
fini.
-Je ne sais pas ce que je
deviendrais sans toi… lui sourit-elle, reconnaissante.
Elle déposa alors un baiser
furtif contre sa joue et disparut à la poursuite des pilotes.
Dieu merci, Heero se trouvait à
la fin du groupe. Elle le rattrapa à un angle droit du couloir et effleura sa
main. Elle ne l’obligeait pas à s’arrêter, elle le lui demandait juste. Le
pilote s’immobilisa aussitôt, sachant qui venait d’agir ainsi et tourna son
visage face à elle. Relena s’inquiétait, il le voyait bien, elle semblait si
tourmentée…Mais il ne fallait pas. Il lui avait promis que la guerre ne
changerait rien entre eux et c’était la vérité. Seulement il y avait sa mission,
et il devait se concentrer dessus, qu’il soit le plus efficace possible et
qu’il en finisse rapidement. Mais comment expliquer ça à Relena, celle qui se
battait avant tout avec son cœur ? Comment lui dire qu’il lui fallait
refouler ses sentiments s’il voulait combattre efficacement, sinon, le Système
Zéro ne lui laisserait aucune chance…tout ça devait lui apparaître si stupide
et elle avait probablement raison…mais c’était la seule façon de se battre
qu’il connaissait.
Ils restèrent quelques instant à
se fixer, le regard brillant d’émotion de la princesse tranchant avec
l’apparente indifférence d’Heero. Mais Relena avait toujours su voir au-delà de
ses yeux à la résonance métallique, elle ne l’avait jamais considéré comme une
machine sans âme, elle le voyait lui, tel qu’il était vraiment. Et peu à peu
l’expression du pilote se modifia, son regard se fit plus profond, il lui prit
alors délicatement la tête entre les mains, son geste semblant complètement à
l’opposé de son attitude générale. La jeune fille, incapable de se défaire de
son regard ne bougea pas. Les yeux du jeune homme se firent alors plus doux et
déterminés.
-Je suis avec toi, lui
souffla-t-il dans une promesse avant de déposer un tendre baiser contre son
front.
Relena cilla et elle resta sans
voix, le pilote la regarda une dernière fois puis son expression se durcit à
nouveau et il repartit à la suite de ses compagnons sans se retourner. La
princesse le regarda faire, un instant interdite. Mais elle se ressaisit.
-Moi aussi Heero, j’ai confiance
en toi…oui, j’ai confiance…fit-elle un peu plus bas.
******************************
Lorsqu’elles virent les pilotes
sortir de la salle de réunion, Noin et Sally comprirent immédiatement ce qui se
passait dans leur esprit. Ils étaient cinq, avant tout, liés comme les doigts
d’une même main, et c’est tous les cinq qu’ils partiraient combattre.
Millardo les vit quitter la
pièce dans un silence de mort, une étrange lueur de connivence dans leurs
regards qui laissait comprendre qu’ils étaient d’accord sur leurs objectifs.
Interpellé par leur attitude, il s’apprêtait à les retenir lorsque Lucrezia lui
fit signe de ne pas intervenir.
-Laisses Millardo, ils savent
très bien ce qu’ils ont à faire.
-Mais ! Nous n’en
avons même pas parlé !
-Ils ont l’habitude, ils n’ont
pas oublié. Ils ont appris à se battrent ensembles lorsqu’ils ont eu à faire
face au Libra. Laisses-les faire.
L’ex-lieutenant fixa les deux
jeunes femmes et abdiqua finalement. Elles les connaissaient bien mieux que
lui…Mais il restait néanmoins surpris par cette faculté qu’ils avaient eu à se
comprendre sans échanger la moindre parole.
La journée s’articula autour de
la préparation au combat, comme cela avait si souvent été le cas quelques
années auparavant. Les pilotes organisèrent spontanément leurs temps comme ils
l’avaient fait pendant la Grande Guerre, comme si elle n’avait jamais cessé. Et
dans un étrange silence certains allèrent préparer leurs amures mobiles pendant
que d’autre se dirigeaient vers la salle de contrôle de la base, espérant trouver
encore des informations sur leurs ennemis. La seule chose qui comptait à
présent, c’était de se mettre en condition pour le combat. Tout était réglé,
tout était calculé, ils avaient appris à s’organiser à cinq et à gérer leur
entraînement lorsqu’ils étaient à bord du Peacemillion et ils savaient
exactement ce qu’ils avaient à faire.
Quatre, dès qu’il fut assuré que
Relena serait prise en charge par Azim, se concentra sur ses objectifs et
partit rejoindre Heero, Trowa et Raschid au hangar des armures mobiles.
L’après midi touchait à sa fin
lorsque Heero et Duo se dirigèrent vers la salle d’entraînement, ils avaient
besoin de se changer les idées. Il ne furent qu’à moitié surpris lorsqu’ils
retrouvèrent Sally et Noin qui s’affrontaient à l’escrime alors que Wufei et
Millardo s’échauffaient séparément.
Les deux jeunes femmes,
concentrées sur leur combat ne semblèrent pas remarquer l’entrée des deux
pilotes, jusqu’à ce que, dans une ultime attaque elles se touchent
mutuellement, épuisées, elles tombèrent toutes deux à terre et éclatèrent d’un
rire joyeux.
-Ah Sally, finit par articuler
Noin, tu n’as pas démérité au combat !
-Je te retourne le compliment,
fit la doctoresse tout en tendant la main à son adversaire.
Les deux jeunes femmes se
relevèrent encore toutes essoufflées et se débarrassèrent de leur équipement,
il était temps de laisser leur place aux autres.
Les pilotes les regardèrent avec
un air mi-amusé, mi-réprobateur, comment pouvaient-elles trouver encore des
prétextes pour rire dans la situation actuelle ?
Lucrezia remarqua la première le
regard des hommes posé sur elles, elle se retourna et les fixa, de ses yeux
brillant d’intelligence.
-Ne vous en faites pas, ce n’est
pas parce que l’on plaisante que l’on prend tout ça à la légère.
-Voyez-vous, nous les femmes,
nous avons besoin d’extérioriser ce que nous ressentons, rajouta Sally en
posant une main amicale sur l’épaule de sa cadette.
Elles se fixèrent alors et se
remirent à nouveau à rire tout en se dirigeant vers la sortie.
Les pilotes les regardèrent
s’éloigner, perplexes.
-Je crois qu’elles sont vraiment
nerveuses, dit finalement Millardo, encore tout surpris.
-Qui ne le serait pas…remarqua
alors Duo tout en se dirigeant vers les tapis au sol, la seule différence avec
nous, c’est qu’elles, elles s’expriment.
Et sans rien rajouter d’autre,
chacun se mit à son travail.
-Un duel ?
Heero et Duo relevèrent la tête
du sac de frappe. Wufei fixait le Japonais de son regard noir brillant de défi.
Heero sans rompre le contact, enleva ses gants et les jeta à son compagnon. Le
natté les réceptionna sans les quitter des yeux. Cette façon qu’ils avaient de
se regarder, cela ne présageait rien de bon. Il aurait bien tenté de raisonner
Heero, mais vu la lueur dans ses yeux, il préféra ne pas s’y aventurer. Il les
vit s’éloigner tous deux et s’équiper en silence, jusqu’à ce que les deux
hommes soient en position. La pointe de leurs lames s’effleurèrent alors et le
combat commença.
Wufei entreprit d’abords de
jauger les capacités de son adversaire en portant de petits assauts en
différents points.
-Je vois que tu n’as pas tout
perdu, fit-il entre deux attaques qu’Heero esquissa de nouveau. Mais je
constate néanmoins que tu ne fais que parer, et bien alors ? Serais-tu
devenu faible ? siffla-t-il tout en l’attaquant plus violemment.
Heero fronça les sourcils et
contra son assaut avant de lancer une offensive. Il avait déjà affronté Wufei
dans ses conditions, et il savait à quel point le pilote pouvait être
redoutable lorsqu’il était dans un tel état de colère. Dans sa façon de
combattre, il retrouvait la même haine qui l’avait habité lorsqu’il avait
rejoint les rangs de l’armée de Mariemeia [2]…cela ne présageait rien de bon. Mais une
question occupait l’esprit du jeune homme, qu’est ce qui avait bien pu le
mettre dans cet état ?
-Et quel mal y aurait-il à
ça ? Je n’ai aucune envie de rester un soldat toute ma vie !
Lança-t-il tout en effectuant une passade sur son adversaire.
Wufei, un instant prit de court,
recula pour réattaquer aussitôt.
Le combat reprit de plus bel
sous le regard préoccupé de Duo et Millardo qui ne les quittaient à présent
plus des yeux.
Les coups se firent de plus en
plus violent et les pilotes ne tardèrent pas à montrer des signes de fatigue.
Après plusieurs minutes de lutte acharnée, Heero faillit et trébucha, se
retrouvant ainsi à terre.
-C’est tout ce que tu as à
m’offrir Heero Yuy ! cria-t-il alors qu’il armait son coup.
-Wufei Chang ! Ne vous
a-t-on jamais enseigné le code de bonne conduite ! s’éleva soudain une voix
qui imposait le respect.
Le chinois, surpris, fut coupé
dans son élan, il jura alors et jeta avec rage son épée qui alla se planter à
quelques centimètres du corps du jeune homme au sol.
Il enleva son masque et regarda
avec dédain son adversaire jeté à bas.
-Je le savais. Cela n’a que trop
duré, il faut en finir.
Le regard d’Heero se fit plus
noir de la colère qui l’habitait déjà, il se contracta alors, s’apprêtant à
répondre à l’attaque du pilote, mais à la surprise générale, Wufei lui tourna
le dos et quitta aussitôt la pièce.
Une expression béate traversa un
instant le visage d’Heero et si la situation n’avait pas été aussi tendue, Duo
aurait explosé de rire tellement cette mimique était drôle à voir sur la tête
de son ami.
Millardo fut finalement le
premier à réagir, certainement le moins stupéfait des trois. Il s’avança
jusqu’au jeune homme au sol et lui offrit sa main. Heero qui était jusque là
resté fixé sur la porte, releva la tête, et comme si cela était possible,
afficha un air encore plus surpris. Mais en l’espace d’une seconde il se
ressaisit et accepta l’aide du comte. Millardo le
releva, ils se fixèrent un instant mais le prince jugea bon de ne rien
rajouter, il se savait trop à l’extérieur de ce qui venait de se produire pour
pouvoir porter quelque jugement que ce soit.
-Merci, fit alors Heero tout en
relâchant le bras de l’homme.
Le comte le fixa un instant
stupéfait, il ne s’attendait pas à ça. Voyant que son expression gênait
manifestement Heero, il se reprit aussitôt et lui adressa un regard qui lui
signifiait qu’il n’avait pas à se sentir redevable, agrémentant son intention
d’un hochement de tête.
-Je t’en prie.
Duo les rejoignit à cet instant
et posa sa main contre l’épaule du pilote.
-Ca va ? fit-il d’une voix
légèrement inquiète.
Heero tourna sensiblement la
tête dans sa direction et lui adressa un imperceptible signe d’affirmation. Au
fil du temps, il s’était progressivement mis à accepter les marques
d’attentions du pilote, et leur amitié grandissante l’avait aidé à apprécier ces
gestes de tendresse de la part du natté. Il savait maintenant mesurer
l’importance de tels sentiments.
Duo, poussa alors un profond
soupir et le relâcha.
-Tu m’en vois rassuré !
s’exclama-t-il pour redevenir aussitôt sérieux. Après Rel’ voilà qu’il s’en prend
à toi…
Millardo qui fixait les deux
jeunes face à lui, fronça les sourcils et se perdit un instant dans ses
pensées. Tout ce qu’il croyait connaître sur les pilotes de gundam venait
d’être compromis en l’espace de quelques minutes.
Jamais il n’aurait pensé qu’il
existait entre eux des liens aussi fort et en même temps de telles tensions. Il
avait vu une telle rage dans les yeux de Wufei, une telle expression
meurtrière, qu’il ne lui avait pas fallu longtemps pour comprendre que le
combat auquel il venait d’assister n’avait rien eu de fictif…qui aurait pu
croire qu’ils puissent entre eux se vouer une telle aversion ? Et en même
temps l’attitude d’Heero l’avait énormément surpris, même s’il l’avait toujours
su loyal, la facilité avec laquelle il avait accepté son aide l’avait étonné…et
plus encore cet étrange lien qu’il semblait exister entre Heero et Duo…de
l’amitié ? Le regard qu’ils s’étaient échangés ne pouvait laisser
soupçonner autre chose de moins puissant…et puis ce n’était pas la première fois
qu’il remarquait la connivence qu’il y avait entre eux…tout cela était vraiment
surprenant…
-Laisses tomber, fit Duo en
constatant l’air préoccupé de son ami, ça fait un moment qu’il est comme ça.
N’y penses plus, de toute manière il aura vite fait d’oublier son différend
avec toi une fois qu’il sera au combat.
Millardo cilla alors et sortit
de ses pensées pour voir Heero obtempérer aux conseils du natté.
-Tu as raison. Allons-y, fit-il
en se mettant en marche vers les hangars comme si rien ne s’était produit, nous
avons encore du travail.
Relena revenait du Haras, son
baluchon en main, elle déambulait dans le corridor, perdue dans ses pensées,
lorsqu’elle tomba sur Wufei. Elle posa son regard sur lui et un frisson la
parcouru soudain. Il était en colère. Le pilote, dès qu’il l’aperçut infléchit
sa trajectoire et se dirigea droit sur elle d’un pas appuyé. Une telle rage
émanait de sa personne que s’en était presque palpable, gagnée par une crainte
inexpliquée, le cœur de la jeune fille s’emballa et elle se mit à reculer, mais
au moment ou Wufei arrivait à sa hauteur, elle se trouva acculée au mur.
La princesse sursauta en sentant
l’obstacle derrière elle. Elle détourna un instant son intention du pilote, au
moment même où celui-ci planta ses poings de part et d’autre de sa tête en
faisant trembler la façade. Le cœur de Relena sauta un battement, elle se
raidit d’un seul coup et lâcha prise, laissant son baluchon tomber au sol. Elle
releva alors les yeux sur l’homme qui la maintenait à sa mercie. L’éclair noir qui
traversa le regard de Wufei la frappa de plein fouet. Cette lueur, c’était la
même que celle qu’elle avait vue dans les yeux de Onze. La douleur de son
épaule se réveilla soudain. Spontanément, elle plaqua une de ses mains contre
sa cicatrise et se recroquevilla pour ne pas laisser échapper un cri de
douleur. Mais loin s’en fallait pour que son apparente souffrance ne l’arrête,
il était temps qu’il mette les choses au point avec la princesse pacifiste.
Le pilote, avec une délicatesse
déplacée, lui releva alors le menton pour qu’elle le regarde.
-Comment tant de gens ont-ils pu
penser que tu saurais préserver la paix ? fit-il d’une voix bien trop
calme pour être honnête. Vois-tu, moi je n’ai jamais cru en toi, enfin, si, à
la vérité cela m’est arrivé une fois [3].
Mais je me suis rendu compte que je n’aurais pas dû écouter Heero. Il n’était
plus vraiment lui-même. La vérité c’est qu’à cause de toi il a fait des choix
stupides, des choix qui vont finir par lui coûter cher.
-Co…comment, bafouilla-t-elle
complètement perdue.
Et sans crier garde, le visage
un instant plus serein du jeune homme redevint aussi sombre que l’abîme.
-Quittes-le ! lui cria-t-il
soudain en resserrant sa poigne sur son menton.
Les pupilles de la jeune
princesse se rétractèrent et elle resta un instant le souffle coupé. Que
pouvait-elle faire face à autant de haine ? Pourquoi Wufei la détestait-il
à ce point ? Elle avait peur, elle était terrorisée par le regard noir de
mépris de cet homme, cependant elle ne pouvait pas. Elle ne pouvait pas le
laisser s’en prendre à ceux qu’elle aimait, ça, elle ne le permettrait jamais.
D’un seul coup, la crainte sembla disparaître de ses yeux qui s’illuminèrent
d’une volonté insoupçonnée. Elle se redressa alors et le fixa avec une force
qui déstabilisa un instant le chinois.
-Jamais je ne ferais une telle
chose, rétorqua-t-elle en pesant sur chacun de ses mots toute la profondeur de
ses sentiments.
Wufei vit la lueur qui traversa
ses yeux à cet instant. Son visage se teinta alors de contrariété et ses lèvres
se pincèrent, ça n’allait pas être facile de la faire lâcher prise.
Sans qu’il s’y attende, la jeune
fille le repoussa alors et tenta de fuir, mais le pilote réagir prestement et
la rattrapa par le bras avant de la plaquer à nouveau contre le mur, Relena
tenta de lui échapper, mais il n’eut aucun mal à l’immobiliser. Après plusieurs
minutes de lutte, haletante et faiblissante, la jeune fille finit par cesser de
se débattre. Elle n’essaya même pas de crier ou d’appeler au secours, sachant
pertinemment que Wufei l’en aurait empêché avant même qu’elle n’ait eu le temps
de prononcer une syllabe. C’est alors que son regard se figea et qu’elle sentit
à quel point elle était vulnérable. Le pilote vit aussitôt le signe qu’il
guettait et sans plus attendre l’attaqua là où cela lui ferait le plus mal.
-Regardes-toi, contemples à quel
point tu es faible. Ca te plait de jouer à la petite princesse, de faire croire
à tous que tu peux les sauver ? souffla-t-il d’une voix suave au creux de
son oreille. Pour qui tu te prends ! cria-t-il soudain avec autorité,
faisant une peur effroyable à Relena qui, complètement à bout de nerfs, se mit
bientôt à trembler. Tu te prends pour une divinité hein ? Tu te crois,
meilleure que nous avec tes belles paroles ! Hein ? Et qu’est ce que
ça t’a apporté, qui est ce que ça a sauvé ? Tu veux que je te le
dise ? Personne ! s’emporta-t-il un peu plus fort.
Relena, les yeux baissés, et les
lèvres tremblantes, versa bientôt des larmes silencieuses, mêlées de peur et de
peine. Wufei avait raison, qu’avait-elle semée sur son passage mise à part mort
et destruction…faible…elle était faible…ils mourraient tous…par sa faute…
Le pilote, en voyant ses
premières larmes tomber réalisa alors qu’il avait gagné, elle serait prête à
croire tout ce qu’il lui dirait à présent.
-Heero n’a rien à faire avec
toi, dit-il d’une voix méprisante…les femmes, des êtres faibles et sans
intérêt…murmura-t-il soudain d’une voix étrangement douloureuse.
Relena, malgré son état,
remarqua ce changement de ton et releva la tête dans un brouillard de larmes.
Dès qu’il eut capté son regard, Wufei la saisit d’un geste sec par les épaules
tout en plongeant toute sa colère dans ses yeux.
-Tu tiens à ce qu’il devienne
comme moi !
Le jeune homme desserra alors
insensiblement sa poigne, et dans une tentative désespérée, Relena rassembla
ses dernières forces et tenta de se libérer. Et cela fonctionna.
Sans chercher à comprendre par
quel miracle elle avait réussi, seulement guidée par son instinct, elle prit la
fuite. La jeune fille emprunta la première direction qui s’offrit à elle.
Courir, courir pour ne plus s’arrêter, partir le plus loin possible d’ici, fuir
cette atroce douleur qui venait de lui transpercer le cœur. Une seule chose
arrivait à se détacher de son esprit torturé, c’était les paroles de Wufei qui
résonnaient en échos…Il n’a rien à faire
avec toi, ce n’est plus qu’un faible, ça va lui coûter cher…soudain le ton
du pilote revint la frapper : Tu
tiens à ce qu’il devienne comme moi !
-Oh mon dieu ! Mais qu’est
ce que j’ai fait ! s’exclama-t-elle tout en se prenant le visage à deux
mains pour contenir un nouveau flot de larmes.
Au-delà de la peur que Wufei
avait provoquée en elle, il venait de frapper quelque chose de bien plus
profond et un horrible doute envahissait à présent la jeune femme. Et s’il
avait raison ? Si elle compromettait sa vie en le rendant plus
« humain » ? Après tout, il n’avait pas tort lorsqu’il disait
que sa politique n’avait mené à rien…cela signifierait-il qu’elle avait
tort ? Que croire en des choses telles que la paix ou l’amour n’étaient
que signe d’une quelconque faiblesse, pire encore, que cela menait
irrémédiablement vers la mort et la souffrance…d’ailleurs comment Heero
avait-il réagit à l’annonce de cette guerre ? Il s’était renfermé.
Etait-il comme Wufei, croyait-il lui aussi que les sentiments et la sensibilité
n’étaient que de mauvaises choses ? Cherchait-il à se préserver en
agissant ainsi ?…elle ne savait plus, elle était perdue…elle avait si mal…
La princesse, fuyant
aveuglément, déboucha soudain au tournant d’un virage et se heurta contre
quelque chose. Elle eut instinctivement un mouvement de recul et dégagea
aussitôt ses mains pour relever la tête. Relena laissa échapper un hoquet de
surprise lorsqu’elle rencontra face à elle le visage de son frère. Elle resta
paralysée. Elle vit alors l’expression de Millardo, un instant figée dans la
surprise, se teinter soudain d’une vive inquiétude.
-Relena, qu’est ce qu’il
t’arrive ? fit-il d’une voix qu’il tenta vainement de garder assurée.
La jeune fille recula aussitôt,
sur la défensive. Elle vit bien le trouble dans lequel elle venait de plonger
son frère, et sa peine sous jacente. Mais elle ne pouvait pas, elle ne pouvait
pas s’appuyer sur lui, elle ne pouvait s’appuyer sur personne.
-Millardo…je suis désolée, ne te
mêles pas de ça…articula-t-elle d’une voix tremblante.
Le regard du prince se brisa
alors, laissant apparaître sa propre peur. Relena avait l’air si désespérée, si
meurtrie…jamais il ne l’avait vu comme ça, et il avait tout d’un coup
terriblement peur pour elle, il avait peur de ce qu’il voyait dans ses yeux.
Sans plus attendre, il tenta de
la retenir, mais la jeune fille fit volte face et repartit à toute allure, la
peur lui donnant une rapidité féline. Relena, encore concentrée sur son frère,
ne vit pas le pilote qui se mit en travers de son chemin. Et alors qu’elle se
croyait hors de toute atteinte, elle sentit soudain quelqu’un la réceptionner
souplement et la serrer contre lui. Relena, trop surprise et trop effrayée de
constater qui venait de l’attraper, eut un léger moment de flottement. Elle
releva finalement la tête et constata qu’elle ne s’était malheureusement pas
trompée. Heero, qui la fixait, le visage crispé par l’angoisse. Ses yeux,
rendus encore plus froid par l’inquiétude, avaient aussitôt capté son regard et
semblaient à présent la sonder au plus profond d’elle-même. Non pas ça. Pas
Heero, c’était trop dur. La princesse qui s’était un instant figée, céda à la
panique et se mit à se débattre farouchement.
-Non, laisses-moi !
cria-t-elle tout en tentant de lui échapper.
Mais le jeune homme ne se laissa
pas impressionner, et par des gestes vifs, mais sans aucune violence, la bloqua
contre le mur.
-Relena ! Que s’est-il
passé ! fit-il d’un ton autoritaire tout en l’obligeant à le regarder.
La princesse à bout de souffle,
resta un instant sans voix, complètement paralysée par les yeux du pilote,
brûlant d’une colère incroyable, mais qui n’était pas dirigée contre elle, elle
le savait. Heero était complètement hors de lui.
Ils restèrent quelques secondes
à se fixer dans un silence de mort, seulement perturbés par leurs respirations
courtes.
Il luttait, Heero luttait pour
faire entendre raison à Relena, il voulait savoir pourquoi elle était si
désespérée, pourquoi elle le regardait avec crainte, de quoi avait-elle donc si
peur ? Le pilote, pendant un instant la sentit céder, son regard
commençait à s’éclaircir, inconsciemment il baissa sa garde. Quelle ne fut pas
son erreur. Aussitôt les yeux de la princesse se noircirent comme jamais
auparavant et elle le repoussa avec violence. Scotché, Heero fut incapable de
quelque mouvement que ce soit. Relena, ainsi libérée s’éloigna aussitôt, mais
dès qu’elle fut à une distance raisonnable, elle se retourna et fit face au
pilote. Elle était désolée, désolée d’avoir dû abuser de la confiance qu’il
avait en elle. Une lueur de tristesse traversa son regard pour que la peur et
l’incertitude reprennent aussi vite le dessus, elle se détourna alors et
s’enfuit.
Duo, qui avait observé toute la
scène s’anima soudain en voyant la princesse s’enfuir. Il tourna la tête d’un
air complètement affolé, droite gauche, gauche droite. Mais pourquoi personne
ne réagissait !
-Hey les mecs ! Mais
réagissez bon sang ! s’exclama-t-il en s’adressant respectivement Heero et
Millardo complètement amorphe.
Les concernés se regardèrent
alors comme deux abrutis, mais cela ne fit pas du tout rire le natté, bien au
contraire.
-Faut que je vous fasse un
dessin ou quoi ! Relena vient de se faire la malle ! Elle a besoin
que quelqu’un aille la chercher, l’un de vous deux, insista-t-il en voyant que
cela n’avait toujours pas plus d’effet.
Heero sembla alors reprendre une
teinte un peu plus vivante et fixa Millardo qui répondit à sa demande
silencieuse.
-Je n’irais pas à sa rencontre.
Ce que j’ai vu dans ses yeux…ne présage rien de bon, fit-il en regardant plus
intensément Heero. Cependant il est inutile que j’y aille, parce qu’il est
clair qu’elle ne me dira rien.
Heero fit face encore quelques
secondes au comte puis se retourna finalement et prit la direction des hangars.
Duo, le regarda faire, sidéré.
Mais il se ressaisit prestement et courut jusqu’à lui.
-Heero ! Non mais ça va
pas !
Voyant que son injonction
n’avait aucun effet, le pilote se saisit de toute son audace et se planta
devant son ami.
-Hey mon pote ! C’est pas
la bonne route par ici, c’est dans l’autre direction que tu dois aller !
dit-il en indiquant le couloir sur sa gauche.
Heero, qui avait jusque là gardé
son regard fixe droit devant lui, planta ses yeux dans ceux du natté. Duo en
eut le souffle coupé. Ce n’était pas possible, il ne pouvait pas le croire.
Heero n’allait pas faire ça..
Cloué sur place, le natté ne
cilla même pas lorsque le soldat au regard de glace se décala pour poursuivre
son chemin. Passé le choc, un sentiment profond mêlé de colère et de peine
l’envahit, il fit volte face et regarda le pilote qui s’éloignait.
-Tu es en train de faire la plus
grosse erreur de ta vie ! cria-t-il soudain, les points serrés,
bouillonnant de rage.
Au plus profond de lui, Duo
espéra qu’à cet instant Heero allait réagir…mais il n’en fut rien, le jeune
homme poursuivit sa route, comme un automate parfaitement réglé. Exactement
comme ces petits robots à la démarche raide, tant et si bien que Duo fut
incapable de noter l’impact de ses paroles sur son ami qui se figea néanmoins
un peu plus. Heero, le visage fermé et le regard impénétrable poursuivit sa
route, mais à l’intérieur il venait d’être frappé en plein cœur.
Ce n’est pas à moi que reviens cette décision…
-T’es qu’un con !
lâcha le natté d’une voix brisée avant de disparaître à la poursuite de la
jeune fille.
Heero accusa le coup et la lame
s’enfonça un peu plus…
Duo courut un moment à la
recherche de la princesse, l’appelant, mais ne recevant que pour seule réponse,
l’écho de sa voix. Volatilisée. Le nattée soupira, dépité, et s’arrêta à une
intersection.
C’est pas vrai, c’est un véritable enfer. Mais qu’est ce
qui leur prend ? Que s’est-il passé ?
Duo ferma les yeux et inspira
profondément, cela ne servait à rien de se poser de telles questions, il n’en
avait pas les réponses. Le jeune homme se reprit et son regard se teinta de
détermination. Il fallait qu’il la retrouve, il n’y avait aucune autre
alternative…Mais où chercher ? C’est alors qu’il lui sembla entendre un
sanglot. Il s’immobilisa aussitôt, se demandant si ce n’était pas son
imaginaire qui débordait un peu trop. Mais cette hypothèse fut vite démentie
par un nouveau murmure, le natté se tourna immédiatement vers l’origine du bruit
et se retrouva face à la chambre de la ministre. Il était devant la chambre de
Relena ! Il avait parcouru toute la résidence et il n’avait même pas songé
à sa chambre !
Maxwell t’es vraiment qu’un crétin ! se reprocha-t-il avant de se concentrer à nouveau sur ce
qui l’attendait derrière la porte.
Le jeune homme pénétra
précautionneusement dans la pièce, si bien que la princesse ne l’entendit pas
entrer. Il l’observa un instant, assise contre son lit, les jambes relevées et
la tête dissimulée dans ses bras, c’était tout juste si on la remarquait.
Relena aussi avait appris ça, elle aussi savait l’attitude à adopter lorsque
l’on voulait se fondre dans le décor, disparaître aux yeux de tous pour être
enfin seul face à son malheur…il avait été ainsi, comme elle…mais c’était une
mauvaise chose, et il ne la laisserait faire.
-C’est vrai que la vue est pas
mal d’ici, mais moi, à choisir j’aurais plutôt opté pour les bras d’Heero,
intervint alors une voix au ton léger.
La jeune fille sursauta et se
retrouva en un instant sur ses pieds, sur la défensive. Les pilotes de gundams
avaient la fâcheuse habitude de la prendre par surprise. Leurs regards se
croisèrent un instant et Duo fut à son tour frappé par ce qu’il vit. Comprenant
qu’on lisait en ce moment en elle comme à livre ouvert, Relena rompit
immédiatement le contact et se décida à partir d’ici le plus vite possible.
Mais Duo, ayant immédiatement cerné l’état dans lequel elle se trouvait, réagit
plus rapidement.
-Attends ! l’appela-t-il
d’une voix angoissée.
Relena se figea un instant, trop
surprise qu’il ait ainsi anticipé son action.
-On passe un deal toi et moi, je
ne m’approche pas d’avantage et toi tu ne disparais pas, rajouta-t-il aussitôt
en la fixant avec détermination.
En d’autres circonstances,
Relena aurait laissé échapper un soupir de résignation, mais elle n’en avait
vraiment pas le cœur. Elle voulait juste qu’on la laisse, qu’on l’oublie un
instant, que son cœur meurtris et son esprit torturé puissent enfin apaiser
leurs souffrances, qu’elle puisse enfin trouver réponse à cet horrible doute
qui la prenait au ventre. Elle n’en
pouvait plus, elle n’avait pas la force d’affronter encore Duo, surtout pas
Duo. Mais elle avait vu son regard, elle connaissait cette lueur…si elle avait
le malheur de s’enfuir, il la poursuivrait sans relâche…elle n’avait pas le
choix.
La princesse releva alors les
yeux vers lui.
-Ne t’approches pas…fit-elle
d’une voix faible et résignée tout en se tournant de nouveau vers l’extérieur.
A son attitude, le jeune homme
comprit que cette fois-ci, il ne pourrait pas l’aider. Elle n’avait même pas
réagit à son intervention, pas un regard menaçant, pas une once de
colère…Relena semblait complètement perdue…Bien au-delà de sa peine, c’est
cette peur que Duo perçut en elle, comme si toutes ces angoisses et toutes ses
chimères venaient de l’assaillir au même instant, l’ébranlant toute entière. Et
il était clair qu’elle ne tenait pas à ce que d’autre partage ce combat
intérieur…Tant pis, il la laisserait à sa peine, cela semblait être la seule
solution. Il devait avoir confiance en elle.
-Très bien, je crois qu’il vaut
mieux que je te laisse seule…
A cette annonce, la princesse se
retourna spontanément, surprise. Duo la regarda et il sut qu’il avait pris la
meilleure décision. Ses yeux se firent plus confiant et se teintèrent de
douceur.
-Juste une chose, promets-moi
que tu ne vas pas disparaître ou faire quoi que ce soit d’autre de grave.
A sa question, le natté crut
voir un sourire traverser son regard.
-Ne t’en fais pas, je ne ferais
rien d’autre qui puisse vous détourner de votre mission…Ne t’inquiètes pas, ça
va aller…rajouta-t-elle en constatant que le regard de son ami s’était troublé
à ses dernières paroles.
-Ton courage est tout à ton
honneur, princesse…fit-il en s’inclinant respectueusement. Nous nous battrons
corps et âme pour défendre Sank, je t’en fais la promesse.
Un sourire sincère éclaira alors
faiblement le visage de la jeune fille.
-Merci Duo…
Le pilote lui rendit son geste
avant de faire demi-tour et de quitter la pièce.
*****************************
Heero ne prononça plus un mot de
la soirée, si ce n’est pour confirmer quelque ordre de mission ou autre réglage
des armures mobiles. Le départ était fixé le lendemain à cinq heures et ils
travaillèrent tous jusque tard dans la nuit. L’accrochage de la princesse avec
les trois pilotes n’aurait pas dû être ébruité, mais c’était sans compter sur
Noin qui remarqua immédiatement que quelque chose n’allait pas chez son homme.
Cependant Millardo n’avait pas voulu lui parler, sachant que s’il l’avait fait,
Lucrezia serait immédiatement allée auprès de sa sœur ce qui n’était
certainement pas la meilleure chose à faire pour le moment. Inquiète, Noin alla
se confier à Sally, et de fil en aiguille, la rumeur finit par s’étendre.
Tous se tournèrent alors vers
Heero qui eut toute la peine du monde à leur dissimuler son trouble.
Meurtris par son affrontement
avec Relena, il n’avait à cet instant envie que d’une seule chose :
s’isoler. Se retrouver seul pour pouvoir mettre au clair ce qui venait de se
passer. Tout était allé trop vite, tout se bousculait en lui, des sentiments,
des pensées, tout s’emmêlait dans un brouilly absolument incompréhensible. Sous
sa façade de marbre, Heero était sur le point d’exploser. Ce que l’on lui
demandait là était au-delà de ses capacités, il ne pouvait pas. Il ne pouvait
pas afficher l’attitude qu’il avait acquise aux cotés de la princesse ces
dernières semaines, étrangement douce et sereine. Le pilote se renferma donc et
devint aussi impénétrable que la pierre. Tous surent alors qu’il s’était
produit quelque chose de grave entre lui et la princesse.
Quatre voulut aussitôt aller
voir la jeune fille pour se rendre compte par lui-même de ce qui s’était
réellement passé, mais Duo le pris à part et l’en dissuada.
Au fil des heures Relena finit
par s’apaiser un peu, mais c’était plus par dépit que par une réelle
amélioration de son moral. Elle avait néanmoins réussit à mettre certaines
choses au clair, il lui fallait prendre du recul avant de décider comment elle
allait se positionner par rapport à ce conflit, mais avant tout, il fallait
qu’elle préserve Heero. En aucun cas elle ne voulait qu’il lui arrive malheur,
elle préférait trop prendre au sérieux les paroles de Wufei plutôt que de les
négliger. Cependant, plus le temps passait et plus un doute grandissait en
elle. Et s’il ne rentrait pas ? S’il avait trop bien interprété son geste
et qu’il ne voulait plus l’approcher ? Cette simple idée lui enserra le
cœur, mais elle se ressaisit aussitôt, ce n’était pas le moment de se laisser
aller. Après tout, c’était peut être une bonne chose, tout serait plus simple
ainsi, quoiqu’il en soit, il était hors de question qu’il reste dans le salon
ou dieu sait où pour prendre les quelques heures de repos qu’il lui restait
avant le départ pour Sank. La princesse inspira profondément et se releva de
son fauteuil, il fallait qu’elle s’assure qu’Heero revienne jusqu’à cette
chambre. La jeune fille s’arrêta à la salle de bain et se passa un coup d’eau
fraîche sur le visage afin de le raffermir et de faire disparaître toutes ces
affreuses rougeurs causées par ses larmes. Elle s’arrangea comme elle le put et
dès que l’effet lui parut à peu près correct, elle prit son courage à deux
mains et sortit de l’enceinte protectrice de sa chambre. A cette heure-ci, la
résidence était sombre, Relena n’alluma cependant pas la lumière et déambula
dans la pénombre des couloirs, ce soir, elle trouvait la nuit étrangement
rassurante. La jeune fille se dirigea d’abord vers la salle de réunion mais n’y
trouva personne, elle passa alors par le salon qui n’était pas plus animé. Un
peu découragée, elle décida de s’arrêter à la cuisine afin de prendre au
passage de quoi satisfaire ce que son corps ne cessait de lui crier depuis déjà
plusieurs heures : à manger. Quelle ne fut pas sa surprise lorsqu’elle
trouva Trowa et Quatre sur le plan de travail, en train de confectionner des
sandwichs ! C’était bien le dernier endroit où elle s’attendait à trouver
quelqu’un ! D’un seul coup son cœur s’emballa, et si Quatre arrivait à
percevoir sa douleur ! Mais la jeune fille se força à rester calme, il ne
pouvait pas deviner comme ça toutes les émotions des gens, cela ne lui était
possible que lorsque les personnes avaient un moment de faiblesse ou qu’il
rentrait en contact physique avec elles…de toute manière, s’il devait savoir
quelque chose, le mal était déjà fait…Relena se donna du courage et vint à leur
rencontre du plus naturellement possible. Les pilotes relevèrent la tête vers
la princesse et elle eut aussitôt l’intuition qu’ils savaient quelque chose,
mais décida de faire abstraction de ses doutes, ce n’était pas le moment de
faire un pas de travers.
-Tu n’es pas encore
couchée ? lui fit alors Quatre tout en la regardant avec une certaine
appréhension.
Mais la jeune fille ne se laissa
pas faire, bien décidée à n’impliquer personne d’autre dans cette histoire.
-Non, je commençais à me faire
du souci en ne vous voyant pas rentrer, vous en avez pour longtemps
encore ?
-Deux heures tout au plus, de
toute manière, après 1h, j’ai donné l’ordre à ce que tout le monde aille
prendre du repos.
La princesse sourit faiblement.
-Heureusement que tu es là. L’un
de vous deux pourrait-il dire à Heero qu’il me réveille lorsqu’il sera de
retour, j’aurais besoin de lui parler.
-Bien sûr, je n’oublierais pas.
Tiens, fit-il alors en lui tendant un de ces sandwiches, manges, tu en as
besoin.
Relena se crispa soudain, si
Quatre venait à la toucher, il risquait de tout découvrir. Mais d’un autre
coté, si elle refusait, la signification était tout aussi claire…ils
soupçonnaient quelque chose, elle en aurait mis sa main à couper…En l’espace
d’une seconde sa décision fut prise, elle tendit sa main et se saisit de son
repas d’un geste trop vif pour que Quatre puisse la toucher.
-Bien, je vais vous laisser,
dit-elle un peu confuse. Bon courage et merci pour le sandwiche ! les
salua-t-elles avant de disparaître aussitôt de la cuisine.
Les deux pilotes se regardèrent
alors et attendirent que le son de ses pas ait disparu avant de prendre la
parole.
-Elle m’inquiète…tu as vu la
façon dont elle a évité mon contact ?
-Moi je l’ai trouvé plutôt sûre
d’elle. Quatre, elle n’a peut être tout simplement pas envie que tu perçoives
ses pensées, et je trouve ça plutôt légitime.
-Tu sais très bien qu’il m’est
impossible de lire comme ça dans le cœur des gens, seulement là, elle semblait
avoir tellement peur que je puisse le faire qu’elle a préféré éviter tout
risque…dit-il avec tristesse.
Trowa s’arrêta alors et fixa son
ami.
-Quoi qui ait pu se passer tout
à l’heure, je trouve qu’elle a plutôt bien assimilé, ce qui signifie que ce
n’était certainement pas aussi grave. Quatre, fit-il en voyant que son
argumentation n’avait pas l’air de le convaincre davantage, ne t’en fais pas,
il ne peut rien lui arriver ici.
Le petit blond se ressaisit au
ton du jeune homme, il se redressa et lui adressa un faible sourire.
-Tu as probablement raison, je
dois encore trop m’inquiéter.
Trowa répondit imperceptiblement
à son geste puis se saisit du plateau.
-Allons-y, nous avons un message
à transmettre à Heero.
Relena veilla encore un moment,
mais gagnée par la fatigue, elle finit par s’assoupir dans le fauteuil. A une
heure du matin, le pilote pénétra dans la chambre, son attention fut aussitôt
attirée par la faible lumière de la lampe de chevet mais personne ne se
trouvait dans le lit. Il vit alors un peu plus loin, dans la pénombre, le corps
recroquevillé de la princesse. Relena avait dû vouloir l’attendre mais elle
n’avait pas résisté à la fatigue, le jeune homme s’approcha en silence et
contempla la princesse endormie. Mais l’espoir qui était né en lui lorsque
Trowa était venu lui annoncer la demande de Relena s’envola aussitôt…elle avait
l’air si tourmenté, même le sommeil ne semblait pas avoir apaisé le mal qu’il
avait vu en elle, cette douleur qui semblait avoir saisit son cœur…ce qui
l’inquiétait, c’est qu’elle n’avait pas voulu lui en parler, mais ça allait
même plus loin que ça, elle semblait ne plus vouloir qu’il s’approche
d’elle…une seule question le hantait à présent : Pourquoi ?
La princesse tressaillit alors
et souffla quelque chose d’incompréhensible. Heero fut soudain prit de
l’irrésistible envie de la serrer dans ses bras et de la réconforter, mais il
se retint d’essayer car il savait que cela pouvait ne faire qu’empirer la
situation. Aussi blessée que Relena avait été, il avait également vu en elle sa
détermination et il ne savait que trop bien qu’agir ainsi ne ferait
certainement qu’empirer les choses entre eux…de plus l’essentiel était que la
princesse reste en sécurité, ce que Duo lui avait confirmé. C’était le plus
important…il n’avait plus qu’une seule chose à faire : prendre sur lui.
Cependant il ne pouvait pas la
laisser dormir dans cette position inconfortable, surtout qu’elle n’était pas
encore rétablie. Il hésita un instant entre la porter jusqu’au lit ou la
réveiller, mais il opta finalement pour la deuxième solution, plus correcte vis
à vis de la situation.
Le pilote allait lui effleurer
le visage, mais il se ravisa et la saisit par l’épaule sans même la secouer, il
la savait tellement tendue qu’elle se réveillerait au moindre contact.
-Relena, réveilles-toi,
l’appela-t-il tout de même pour ne pas trop la surprendre.
La jeune fille sursauta aussitôt
qu’elle sentit quelqu’un la toucher et ouvrit grand les yeux, sur le qui-vive,
elle s’apaisa néanmoins en reconnaissant la voix qui venait de prononcer son
nom.
-Heero…murmura-t-elle dans un
léger moment de flottement qui suivit son brusque réveil.
Mais la princesse se ressaisit
immédiatement et afficha un air détaché qui dissimulait difficilement sa peine
sous-jacente.
-Je t’attendais. Je te laisse le
lit, tu n’as que peu de temps de repos, lui dit-elle sur un ton sec qui la
faisait souffrir davantage à chaque syllabe.
Mais il fallait qu’elle reste
forte.
Heero la fixa un instant, le ton qu’elle avait employé l’avait
frappé au plus profond de lui-même, mais il ne devait rien lui laisser
transparaître et il trouva, comme seule parade à cela, la colère.
-Hors de question ! Tu es
encore convalescente, et je ne te laisserais pas dans ce fauteuil, où tu
partages ce lit avec moi, ou je sors de cette chambre !
Relena sursauta à ces paroles et
une fraction de secondes laissa transparaître à jour la souffrance que ses mots
lui affligeaient. Cette fois il était bien en colère contre elle, et il ne lui
facilitait vraiment pas la tâche. Heero regretta aussitôt le ton acide qu’il
venait d’employer, mais quel idiot il faisait ! Comme si agir de la sorte
allait apaiser leurs peines inavouées, car son attitude ne faisait que confirmer
ce qu’il avait déjà vu en elle; Elle aussi souffrait de cette situation.
-Très bien, parvint-elle à dire
aussitôt qu’elle eut repris son contrôle.
La jeune fille se leva alors et
d’une démarche aussi souple que son état de tension le permettait, elle se
dirigea jusqu’au lit.
Heero se changea puis vint se
glisser sous les draps. Il avait toute la place qu’il pouvait désirer, Relena
s’était recroquevillée à l’autre extrémité du grand lit…son cœur se serra
inévitablement en pensant aux dernières nuits qu’ils avaient passées
ensemble…avant c’était plutôt le matelas et les couvertures qui avaient toute
la place…Le jeune homme avait beau essayer de
comprendre, il n’arrivait à tirer qu’une seule chose de tout ça : de la
souffrance.
Et il éteignit la lumière.
*****************************
La nuit fut très courte. Heero
se leva comme il s’était couché : Les yeux grand ouvert. Sans en éprouver
la moindre gêne, il se déplaça dans la pénombre, rassemblant ses affaires, puis
se dirigea vers la salle de bain. Le pilote repassa par la chambre et sortit
sans détourner un instant son regard vers la jeune fille, il savait très bien
qu’elle non plus n’avait pas fermé l’œil.
Ils se retrouvèrent à sept dans
la cuisine à avaler un petit déjeuner sommaire, seuls Raschid et Quatre étaient
absent, occupés à préparer le départ de l’unité Maganac. Pas un mot ne fut
prononcé, mais à voir la mine d’Heero, tous surent que le problème ne semblait
pas s’être résolu durant leur intermède, ajouté à cela, le stress du combat à
venir les gagnait peu à peu. Car même s’ils étaient avant tout des soldats,
leurs vies étaient définitivement différentes de celle qu’ils avaient eut deux
ans auparavant, et même s’ils étaient restés fidèles à leurs engagements,
partir au combat impliquait incontestablement plus de risques, car à présent,
leurs vies étaient liées à d’autres.
Un quart d’heure après, ils
étaient tous aux hangars, les Gundams furent les
derniers appareils à êtres mis en soute. Ils étaient parés au départ. Tous les
hommes se réunirent alors une dernière fois autour de leur chef.
-Bien, tout le monde sait
exactement ce qu’il a à faire ?
Une approbation silencieuse
confirma sa demande. Le visage du prince du désert se fit alors plus doux.
-Mes amis soyez prudent, et
n’oubliez pas, nous nous battons pour préserver, pas pour tuer. Je ne veux
déplorer la perte d’aucun d’entre vous.
-Vous en faites pas maître
Quatre, on en a vu d’autres !
-Ouais, nous sommes le peuple
nomade du désert, ont est des coriaces !
Le jeune chef sourit à
l’emportement de ses hommes, ils étaient inestimables à ses yeux.
-Tient, voilà la dernière
personne qui manquait encore à l’appel ! fit alors Azim en indiquant d’un
signe de menton une jeune fille, enveloppé dans un châle, qui venait à leur
rencontre.
Quatre se tourna aussitôt vers
ses hommes.
-Allez-y, nous vous suivons.
-Amusez-vous bien les
gars ! les salua Azim alors qu’ils se dirigeaient vers les transporteurs.
-C’est bien à toi de dire
ça ! répliqua alors un des soldats. Pourquoi c’est pas moi qui suis resté
avec la minette ? fit-il avec une
moue faussement triste.
Le Maganac resté au sol fit un
dernier signe à son unité puis se tourna vers la princesse en approche.
Relena n’avait pas pu les
laisser partir sans leur avoir dit au revoir, elle n’en pouvait plus de rester
sourde aux appels de son cœur. Une dernière fois, elle décida d’écouter ses
émotions. Même si à cet instant, elle était certainement bien plus vulnérable
qu’hier, et prête à céder à sa peine. Ces quelques heures avec Heero l’avaient
bien plus éprouvée qu’elle ne l’aurait cru, cela avait été un véritable
supplice. Le sentir proche, percevoir son trouble tout en sachant qu’il lui
était interdit de s’approcher de lui…elle était au bout du rouleau, et bien
qu’elle essaya du mieux qu’elle put de dissimuler sa faiblesse, elle n’échappa
à personne.
La princesse s’arrêta à distance
raisonnable des dix membres qui comptait pour la plupart d’entre eux parmi les
gens qui avaient le plus d’importance à ses yeux.
-Je vous en prie, faites
attention…n’oubliez pas de préserver votre vie…dit-elle d’une voix qui se brisa
à ses dernières paroles.
Relena se maudit aussitôt de ne
pas réussir à mieux se contrôler, elle baissa la tête, tentant ainsi de
dissimuler les émotions qui prenaient peu à peu le dessus. Tous l’observèrent,
silencieux, touchés par sa sincérité. La jeune fille cependant, ne perçut pas
leur silence de la même manière, au bord des larmes elle était sur le point de
s’enfuir lorsqu’elle sentit l’un d’entre eux s’approcher d’elle. Relena releva
la tête et ses yeux inondés de tristesse rencontrèrent le regard chaleureux du
natté. Elle gratifia Duo d’un faible sourire, soulagée que ce ne soit pas
quelqu’un d’autre qui l’ait surprise à sa peine. Le jeune homme lui sourit à
son tour et se rapprocha davantage pour la serrer avec précaution dans ses
bras. Un instant surprise par son attention, Relena répondit à son étreinte et
s’offrit le luxe de s’abandonner quelques secondes dans ses bras.
-Ne t’en fais pas, ça va aller,
lui murmura-t-il en la sentant enfin accepter le soutient qu’il lui offrait.
Tout finira par s’arranger, j’en suis persuadé. J’ai toute confiance en toi
princesse, je sais que quoi que tu fasses, c’est pour le bien de ceux que tu
aimes, pour son bien, fit-il alors qu’ils desserraient leur étreinte.
Ils restèrent encore quelques
secondes à se fixer, jusqu’à ce qu’un sourire prenne vie sur le visage de la
jeune fille. Les paroles de Duo lui avaient fait tant de bien, cela était
tellement rassurant de pouvoir sentir son regard rempli d’affection sans
craindre une quelconque obligation de se justifier.
-Merci Duo, fit-elle simplement.
Sois prudent…
-T’en fais par pour ça Lena, lui
dit-il dans un sourire tout en s’écartant d’elle.
Le regard de la princesse, un
peu revigoré, tomba alors sur Quatre. Il n’osait pas venir à sa rencontre, son
geste, hier soir n’avait pas dû lui échapper. Elle s’avança alors dans sa
direction, elle prenait peut être un risque mais elle ne pouvait pas le laisser
partir sans lui avoir souhaité bonne chance. La jeune fille étreignit son ami
avec tendresse puis fit ses adieux aux autres personnes…jusqu’à ce qu’elle se
retrouve face à Heero. Le pilote la fixait avec dureté, parfaitement immobile.
Face à son regard, Relena n’eut pas la force de jouer la comédie. C’était
tellement douloureux pour elle de le voir avec cette expression de marbre, même
si c’était peut être là le seul moyen de lui sauver la vie…ces maudites armures
mobiles.
-Surtout fais attention à
toi…restes en vie, fit-elle d’un air désolé.
Elle était tellement désolée de
ne pas avoir sut le protéger, d’avoir négligé la guerre et au final d’avoir dû
blesser ce cœur qu’il avait eu le courage de lui ouvrit…elle était vraiment
pitoyable.
La jeune fille cilla et sursauta
en se rendant compte qu’elle était plantée devant Heero à se morfondre comme
une idiote. Son cœur s’emballa alors et son regard se teinta de crainte, qu’est
ce qu’elle était en train de faire ! Paniquée, Relena fit volte face.
Tout se passa alors très vite, Heero réagit en une fraction de seconde, la saisissant par
le poignet, il l’attira vers lui et avec un geste aussi délicat que la vitesse
de son action le permettait, l’embrassa. Relena resta
un instant le souffle coupé par la stupéfaction, les yeux agrandis de surprise.
Elle sentit soudain à travers la main qui enserrait son poignet, le cœur du
pilote qui battait à toute vitesse. Pourquoi fallait-il qu’il tienne tant à
elle ? Elle n’en pouvait plus de le faire souffrir ainsi.
Vaincue, elle n’hésita pas une
seconde de plus et se laissa allez à son étreinte. Heero
la relâcha alors et éleva ses deux mains qui emprisonnèrent dans un geste
tendre le visage de la princesse. Leur baiser se fit plus passionné et Relena glissa doucement sa main contre la nuque du jeune
homme.
Les autres les fixèrent,
stupéfait. La réaction d’Heero les avait tous
surprit, lui qui d’habitude était un garçon si discret et maître de
lui-même ! Il leur prouvait, une fois de plus, à quel point il tenait à Relena. Duo fut le premier à afficher un large sourire, il
était temps que son ami se décide à prendre les choses en main ! Les
autres suivirent le mouvement, tous content de voir que cet accrochage entre
eux deux était terminé…tous, sauf Wufei dont le
regard semblait se noircir davantage au fil des secondes, ce qui n’échappa pas
à Trowa.
Le chinois n’en revenait
pas ! Relena semblait avoir tenu toute une nuit
et voilà qu’elle venait de tout foutre en l’air en cinq minutes ! Avait-il
eu trop d’estime pour elle ? Mais bon sang, il fallait qu’elle se
remue ! Heero n’était pas du tout prêt à aller
se battre, il était complètement ailleurs ! Elle tenait vraiment à ce
qu’il meurt !
Le couple se sépara alors, Heero plongea aussitôt son regard dans celui de la
princesse et ses yeux confirmèrent ce qu’il avait ressentit dans ses
gestes : Elle ne voulait pas s’éloigner de lui. Mais quelque chose
l’obligeait à agir de la sorte…quelque chose ou quelqu’un…soudain il la sentit
se tendre, le temps qu’il pose son regard sur le reste de son visage et il
n’avait plus la même personne en face de lui.
Par-dessus l’épaule d’Heero, elle venait de rencontrer le regard de Wufei, le regard noir et menaçant du pilote. Mais qu’est ce
qu’elle venait de faire ! Comment avait-elle pu se laisser aller aux bras
d’Heero ! Etait-elle inconsciente ? !
Elle ne pouvait pas faire ça, c’était trop dangereux !
Le jeune homme un instant
surpris, se ressaisit et enserra un peu plus fermement le visage de la
princesse.
-Relena,
qu’est ce qu’il y a ? Que se passe-t-il ? Quelqu’un t’as-t-il
menacé ? De quoi as-tu peur ? termina-t-il d’une voix déterminée,
néanmoins teintée d’une vive angoisse.
La princesse cilla et reconcentra toute son attention sur le pilote, elle parut
un instant hésiter, mais son regard redevint de nouveau impénétrable.
Et à la surprise générale, d’un
geste vif elle se défit de son étreinte et recula aussitôt, prenant soin de se
mettre hors de son atteinte.
-Arrêtes ! le stoppa-t-elle
alors qu’il tentait de la retenir. C’est terminé, c’est fini entre nous !
cria-t-elle un peu plus fort, puisant dans tout le courage qu’il lui restait.
Heero resta un instant atonique, incapable de réagir à
l’affreuse douleur qui venait de s’emparer de lui. Complètement désemparé face
à ce qui était en train de se passer, il fit un pas vers elle, vers la seule
personne en qui il avait toujours crû. Relena, qui
avait les yeux rivés au sol par le poids de son chagrin, se redressa alors.
-Je ne veux plus te voir !
lança-t-elle alors dans un ultime effort, laissant la stupéfaction se lire sur
le visage de la plupart des personnes en présence.
La peine qu’Heero
ressentit à cet instant fut indescriptible, le regard du pilote se brisa alors
dans une atroce douleur, et elle aperçut la profondeur de son atteinte. Elle
avait frappé ce cœur qu’elle s’était toujours promis de préserver…Mais la blessure
du jeune homme ne fut pas longtemps laissée à nu, en l’espace d’une seconde Relena le vit se redresser, son visage s’effaça alors de
toute expression, et son regard se fit de métal, au reflet meurtrier à faire
pâlir les plus téméraires.
Le pilote baissa un instant ses
yeux de glace sur la frêle jeune fille qui se trouvait face à lui, son regard
la frappa de plein fouet. Il se détourna alors et se dirigea vers les
transporteurs, les yeux fixes droit devant lui comme si plus rien ni personne
n’existait.
Le regard de Relena
se brouilla de désespoir, elle s’en voulait tellement, elle avait eu la
faiblesse de laisser apparaître sa souffrance l’espace d’un instant et elle en
avait payé le prix fort…elle avait était exécrable, elle se répugnait d’avoir
fait une telle chose…Wufei avait raison, elle ne le
méritait pas, elle n’aurait jamais dû se laisser aller à leur histoire, être
jusqu’au bout restée sourde à la réalité du monde pour préserver un amour
impossible…un amour qui aurait causée la perte de celui à qui elle tenait
tant…car la réalité était bien là, quelques soient les illusions derrière
lesquelles elle avait pu se dissimuler, et Wufei
n’avait pas manqué de venir les lui rappeler…La guerre n’autorisait aucune
défaillance, le Système Zéro encore moins…
C’est alors que Relena sentit les yeux des autres posés sur elle. Elle
tourna son attention vers le groupe et les regards qu’ils lui adressèrent
finirent de l’achever…tant de peines, de doutes, de mépris ? Un grand vide
s’empara soudain d’elle et elle perçut alors à quel point elle se retrouvait
seule…C’était bien là tout ce qu’elle méritait.
La jeune fille leur fit
cependant face, jusqu’à ce qu’ils disparaissent en silence, avalés par ses
monstres d’acier de transporteurs.
Relena, vidée de toute volonté et accablée par la peine, ne
bougea même pas lorsque les appareils disparurent dans le ciel. Plus rien
n’avait d’importance. C’est tout juste si elle haussa un sourcil, lorsque Azim,
jusque là resté légèrement en retrait, se planta devant elle. Voyant que ses
appels ne provoquaient aucune réaction, l’homme se pencha vers elle, lui
saisissant doucement le visage entre ses mains. La jeune fille cilla et le
regarda, complètement vide. Mais Azim ne se laissa pas démonter, il la fixa
d’un regard emplit de compassion.
-Ne jouez pas à ça avec moi
Princesse, lui dit-il avec douceur, je sais très bien que vous n’avez jamais
été aussi triste qu’à cet instant. Vous êtes quelqu’un de sensible, c’est une
qualité tellement rare de nos jours qu’il faut absolument que vous la
préserviez. N’ayez pas peur, personne n’en saura rien, je vous le promets.
Relena le fixa et d’un seul coup
son regard, un instant avant impénétrable, se remplit de larmes lourdes de
peines.
Azim la prit dans ses bras et
elle ne chercha plus à se retenir. « Heero… » parvint-il à entendre
entre les soubresauts de ses sanglots.
*****************************
Les sept transporteurs
atterrirent à une cinquantaine de kilomètres de la capitale, sur un ancien
terrain militaire de l’Alliance que les Résistants utilisaient à présent comme
base de repli, une centaine d’Hommes se trouvaient sur place, ajoutés aux deux
cents autres qui avaient établi un périmètre de sécurité autour de la capitale.
Mais leurs moyens étaient presque réduits à néant et c’est avec un nouvel
d’espoir que l’arrivée des transporteurs fut accueillie. Un grand homme brun et
une jeune femme d’une vingtaine d’années vinrent à leur rencontres.
-Melle Pô ! Soyez les
bienvenus ! Cela va remonter le moral des troupes d’avoir de tels
alliés ! s’exclama le jeune homme avant de saluer plus personnellement les
deux ex-membres d’Oz. Lieutenants, c’est un honneur pour moi que de me battre
de nouveau à vos côtés, fit-il en s’inclinant respectueusement.
Un sourire éclaira alors le
visage du prince et il vint poser une main amicale sur son ancien soldat.
-Maizer [4], tout le plaisir est pour moi. Je suis
heureux de voir que vous avez su vous battre pour vos convictions.
Le bras droit de Lady Une se
redressa alors et le regarda avec franchise.
-Je n’ai fais que suivre votre
exemple.
Le regard de Millardo se troubla
un instant, mais il se contenta de lui répondre d’un hochement de tête. Il
détourna alors son regard et tomba sur la jeune fille. Elle lui rappelait
quelqu’un, mais il n’arrivait pas à mettre de nom sur sa personne. C’est alors
qu’il remarqua la façon dont Heero la regardait, il y avait au moins une chose
positive à cela, ça prouvait qu’il commençait à se reprendre un peu….
Elle avait grandi, elle s’était
embellie, mais ses yeux n’avaient pas changé, c’était bien elle…
-Sylvia Noventa…fit-il alors
sans détacher son regard du sien.
Tous, sauf Trowa et Quatre
sursautèrent à ce nom, cela signifiait-il que cette jeune femme appartenait à
la famille du Maréchal Noventa, l’homme de l’Alliance qui avait prôné la paix
deux ans auparavant et qu’Heero avait tué ?
Elle s’approcha alors davantage
et un sourire prit forme sur son visage de porcelaine.
-Heero Yuy, je suis contente de
voir que tu ne m’as pas oublié.
Voyant le trouble dans lequel
elle venait de plonger le pilote et les autres protagonistes, la jeune fille
jugea nécessaire d’éclaircir leurs doutes.
-Je suis Sylvia, la petite fille
du Maréchal Noventa, et amie de Relena Peacecraft. Nous nous sommes rencontrées
durant la Grande Guerre, après la mort de mon grand-père [5]. Je n’ai pas le pouvoir de régner sur les
peuples, ni celui de me battre avec des armes, mais les militaires de
l’Alliance qui croyaient dans la volonté pacifiste de mon grand-père me sont
restés fidèles. Cinq cent d’entre eux sont à présent sur les terres de Sank,
sous le commandement d’Iria.
Ils restèrent un instant muet de
stupéfactions face à la jeune fille, jusqu’à ce que Quatre s’approche d’elle.
Il la connaissait très bien pour avoir discuté avec elle de longues soirées en
compagnie d’Iria et Relena. Sylvia vivait avec sa grand-mère, juste à la
frontière Est de Sank, dans la région que l’on appelait encore aujourd’hui
Friuli. Et aussitôt après la prise d’otage à St Gabriel, elle était venue
soutenir Relena. Une réelle complicité s’était crée entre elles pendant la
Grande Guerre, elles s’étaient mutuellement soutenues et avaient ensemble
réussi à surmonter la perte d’un être aimé et bien au-delà de ça, elles
s’étaient données une nouvelle raison de se battre : Pour instaurer cette
paix pour laquelle leurs parents étaient morts. Il savait que Silvia s’en était
toujours voulu de ne pas avoir pu aider davantage Relena durant la Grande
Guerre et il était clair qu’à présent elle se battrait corps et âme pour sauver
Sank.
Le petit blond lui prit alors
tendrement ses mains et les serra dans les siennes.
-Relena serait fière de toi,
mais elle te dirait également que la guerre t’as déjà suffisamment fait
souffrir…
La jeune fille le regarda avec
affection, sans pour autant que sa détermination ne s’amenuise.
-Quatre, Relena a su apaiser ma
souffrance et me montrer à quel point une volonté de vengeance ne menait à
rien, à quel point les choix que l’on faisait parfois étaient à l’opposé de ce
que l’on souhaitait réellement…fit-elle en se tournant vers Heero…la paix
nécessite qu’on la défende et je suis prête à me battre aux côtés de tous ceux
qui m’ont accordés leur confiance, pour honorer ceux qui se sont battus pour
l’instaurer et pour que plus personne n’ait pour seul horizon mort et
destruction…
Le jeune homme retira alors ses
mains des siennes et lui adressa un sourire respectueux.
-Dans ce cas là. Je suis heureux
de te compter parmi-nous.
-Non Quatre, c’est à moi de vous
remercier pour tout ce que vous avez fait.
Sylvia parcourut alors du regard
les autres personnes en présence.
-Pardonnez-moi si tout ça est un
peu rapide, mais Iria vous attend au palais, elle m’a envoyé vous chercher,
vous et votre matériel.
Deux heures plus tard, le
précieux chargement gagnait les sous-terrains de Sank, rejoignant l’artillerie
déjà présente. Iria, Dorothy et Allan virent alors à leur rencontre. Mais la
princesse à cet instant n’avait d’yeux que pour une seule personne. Quatre
totalement immobile, observait la jeune fille aux longs cheveux châtains qui
avançait vers lui, une bouffée de chaleur le submergea soudain et son cœur
s’emballa. Il était enfin de retour auprès d’Iria, elle lui avait tant
manqué !
Ils s’arrêtèrent à quelques pas
l’un de l’autre, totalement plongés dans leurs regards dans lesquels brillaient
tellement d’émotions.
-Tu vois, j’ai tenu ma promesse,
dit-il d’un air hébété qui en amusa plus d’un, depuis quand le prince du désert
perdait-il ainsi ses moyens ?
Quatre se rendit alors compte de
la dérision de ses propos, qu’est ce qui lui avait prit de dire ça, comme ça,
devant tout le monde !
Iria afficha alors un doux
sourire, ce si joli sourire dont elle seule avait le secret !
-Je n’ai jamais douté de ta
parole Quatre.
La princesse releva alors la
tête et salua les autres personnes, mettant au passage un nom sur chaque
nouveau visage, sur ces hommes vertueux dont elle avait tant de fois entendue
parler. Son regard tomba alors sur Millardo et elle se raidit soudain, comment
l’héritier déchu de Sank allait-il réagir face à celle qui venait de prendre
son trône ?
-Millardo Peacecraft, j’ai
quelque chose pour vous.
Le comte se permis alors de
plonger ses yeux dans ceux de la nouvelle dirigeante de son pays. Iria accepta
son inquisition et soutint son regard, elle fut alors frappée par la lueur qui
brillait dans ces joyaux bleus, c’était comme si à cet instant elle avait
Relena en face d’elle, c’était incroyable.
Le pilote sourit alors
imperceptiblement et s’inclina.
-Je suis à votre service
Princesse, mais je vous en prie, appelez-moi Millardo.
Iria lui sourit et hocha
respectueusement la tête.
-Seulement si vous m’appelez
Iria. Suivez-moi Millardo fit-t-elle alors, indiquant au passage aux autres
qu’ils étaient également invités à venir.
Quatre fit signe à l’unité
Maganac de les attendre et il emboîta le pas au petit groupe.
Ils déambulèrent quelques
minutes dans les sous terrains jusqu’à ce que la princesse s’arrête devant une
immense porte. Elle inséra une carte, puis tapa un code. La gigantesque porte
s’ébranla alors, révélant une pièce au contenu inédit. Se dressaient face à
eux, le Talgeese III, entouré de cinq Taurus blanc.
-Oui, fit Iria devant leur air
dubitatif, c’est à Sank qu’ont été dissimulées les seules armures mobiles qui
ont échappé à la destruction. Le Talgeese, que les préventers ont tenus à
conserver, et les Taurus…sont à l’instigation de Relena.
-Comment…Relena a…voulu garder
des armures mobiles…bafouilla Duo sous l’effet de la surprise.
-Ca va plus loin que ça…murmura
alors Trowa sans quitter les appareils des yeux.
-Ces Taurus ne sont pas
ordinaires.
-Oui Heero, ils ne sont pas
ordinaires…ce sont des gundams, dit-elle tristement. Cinq gundams pour cinq
pilotes…Relena n’aurait certainement jamais voulu que quiconque en prenne
connaissance, vous encore moins…Mais quelques mois après la tentative de coup
d’état de Dekim Barton, gagnée par le doute et l’incertitude sur cette paix qui
tremblait chaque jour davantage, elle a prit contact avec le docteur J et lui a
demandé son aide. Comme le professeur ne pouvait pas se déplacer, il a envoyé
Howard, qui, avec l’aide de Maizer, a transformé ces armures mobiles.
-J’en reviens pas !
s’exclama alors le natté qui fut le premier à trouver les mots.
Iria se tourna alors face à ses
invités, elle vit bien dans leurs yeux, au-delà de la surprise, de la tristesse
et peut être même de la déception…mais cela semblait déjà trop profond pour
n’être dû qu’à la simple présentation des armures…Une question survint soudain
dans son esprit : ce serait-il passé quelque chose à Al-jirma ? Cela
confirmerait par de la même l’impression de froide qu’Heero lui avait donné, il
ne semblait pas très bien…Mais avant tout, elle avait confiance en son amie, et
elle ne les laisserait pas douter ainsi de ses choix.
-En toute humilité, fit-elle
alors en fixant le pilote à la longue tresse puis en relevant son regard vers
les autres, lorsque l’on a la vie de tout un peuple entre les mains,
croyez-moi, on est prêt à faire des concessions avec ses idéaux.
Le petit groupe s’en retourna
alors. Sylvia prit en charge l’installation de l’unité Maganac à l’abbaye de
Maria Anna, située au-dessus des sous terrains à mi-chemin entre St Gabriel et
la résidence Royale, ils allaient assurer la garde des armures mobiles,
soulageant ainsi Maizer et Sylvia qui en avaient jusqu’ici la seule
responsabilité.
Le comité quitta alors les
souterrains pour rejoindre la résidence royale, Iria les conduisit d’un pas
assuré à travers les méandres des sous-sols, à nouveau, elle entra un code et
s’identifia. Le mur, apparemment uniforme, révéla alors un ascenseur qui les
conduisit à la surface, les menant à une pièce sombre et humide qui devait être
une cave. Dave n’avait pas encore trouvé l’interrupteur lorsque Lucrezia sentit
que Millardo n’allait pas bien, la façon qu’il avait eue de l’effleurer venait
de mettre son instinct en alerte. Aussitôt que la lumière lui révéla son
visage, elle n’eut plus aucun doute. Le jeune homme se tenait raide comme un
pic, les pupilles révulsées et le regard qui semblait trembler davantage à
mesure que les pulsations de son cœur se faisaient plus violentes. Jamais elle
n’avait vu une telle détresse en lui et elle ne put s’empêcher d’éprouver un
profond sentiment de peur, Millardo semblait tellement inébranlable…Comprenant
qu’il lui serait impossible de s’en sortir seul, Noin laissa les autres aller
de l’avant puis lui prit doucement la main sans cesser de le regarder.
-Viens, lui fit-elle faiblement.
Cette voix, tellement tendre et
rassurante…malgré cette douleur qui venait de le saisir, le comte n’hésita pas
et se laissa conduire.
Ils passèrent encore quelques
portes et remontèrent finalement à la surface. Maizer fut le premier à soulever
la trappe, il vérifia qu’il n’y avait rien de suspect, puis fit signe aux
autres.
-Mais ce sont…
-Les écuries, oui, fit Iria en
se tournant vers Quatre. Depuis qu’elles ont été vidées, plus personne n’y
vient. C’était la sortie la plus sûre pour quitter la base souterraine. La
jeune fille lui sourit alors malicieusement. Mais ce palais est incroyablement
bien pensé. Il existe des passages sûrs pour arriver dans l’enceinte même du
château. Suivez-moi.
Lucrezia allait leur emboîter le
pas lorsqu’elle fut retenue dans son élan. Millardo s’était figé. Cet endroit,
c’était impossible, tout avait brûlé, il n’y avait plus rien ! Et pourtant
c’était comme s’il n’avait jamais disparut, comme si c’était hier…Sa main serra
alors beaucoup plus fort celle de Noin, sa gorge se noua et ses lèvres se
mirent à trembler…non, il ne voulait pas, pas ce moment là, plus jamais !
Sans même s’en rendre compte, il se mit à reculer, refusant tous les souvenirs
que ce lieux ravivait, à chaque seconde, de plus en plus clairs. Lucrezia,
voyant que le compte s’affolait davantage de secondes en secondes, loin de le
libérer, s’accrocha à son bras et le ramena vers elle d’un geste vif.
-Millardo ! cria-t-elle
soudain, les faisant tous se retourner au quart de tour.
Le prince, se sentant retenu
réagit violemment et tenta d’échapper à son emprise. Mais Noin, aiguisée par
des années de vie militaire, esquissa ses coups désordonnés et l’immobilisa en
un instant. Le comte se débattit, mais le peu d’esprit lucide qu’il lui restait
eu tôt fait de lui faire réaliser que c’était un combat perdu d’avance.
-Millardo…je t’en prie,
regardes-moi, l’appela alors une voix qui sonnait si bien en lui.
Elle le vit alors baisser les
yeux vers les siens et son regard si perdu sembla trouver un instant un point
d’ancrage.
-Lu…Lucrezia parvint-il à
articuler.
-Je suis là…lui murmura-t-elle
en retour.
Noin se retourna alors vers les
autres et son regard, un instant auparavant rempli de douceur, se teinta d’une
détermination impénétrable.
-Allez-y, leur dit-elle alors
avec autorité.
Ils restèrent un instant sans
réagir, encore stupéfait de voir Millardo sous ce jour. C’est la princesse fut
la première à prendre conscience de la situation.
-C’est par ici, fit-elle alors
en prenant la direction indiquée d’un pas sûr.
Sans se poser davantage de
questions, ils firent volte face et suivirent spontanément la jeune fille,
comprenant qu’à cet instant, leur place n’était pas ici.
Et au moment même où ils
disparaissaient, le prince s’effondra, se laissant glisser le long du mur pour
atterrir sur la paille.
-Millardo !
Noin s’abaissa aussitôt à sa
hauteur et emprisonna son visage entre ses mains, le forçant ainsi à ne pas
s’enfermer.
-Je suis là, ça va aller,
fit-elle tout en essayant de capter son regard fuyant. Calmes-toi…il ne va rien
se passer…
Et peu à peu, le comte s’apaisa
à ses paroles. Ses yeux affolés cessèrent alors de regarder en tout sens pour
se plonger dans ceux de la jeune femme.
-Chérie…souffla-t-il d’une voix
tremblante qui serra un peu plus le cœur de Lucrezia.
Elle se força cependant à ne pas
se laisser gagner par ses craintes et tout en effleurant tendrement ses longues
mèches dorées, posa la question la plus difficile qu’il lui fut :
-Millardo, que s’est-il
passé ?
Le regard du pilote se troubla
soudain, mais à son plus grand soulagement, il n’eut aucune réaction vive. Noin
n’avait aucune envie de se battre avec lui, mais elle l’aurait fait si cela
s’était révélé nécessaire car il ne fallait pas qu’il garde ça pour lui, il ne
fallait plus. Cela l’avait rongé pendant des années, le condamnant à vivre
dissimulé sous un masque, sous le nom de Zechs Merquise… Mais tout ça c’était
terminé, et il ne lui restait plus qu’une seule bataille à mener pour mettre
définitivement fin à ce combat qui n’avait duré que depuis trop longtemps.
Le prince resta un instant
silencieux, son regard inondé de peine semblant puiser en elle la force
nécessaire pour exorciser ce qu’il avait gardé en lui depuis quinze longues
années, depuis ce soir d’octobre…
-Nous venions de finir de dîner
avec mère et Relena…commença-t-il, la voix faible et hésitante.
Mais la douceur et la patience
de Noin le firent peu à peu trouver le chemin pour mettre des mots sur ce qui
était resté gravé dans sa mémoire, quoi qu’il puisse faire, comme si c’était
hier…
Dès qu’il eut finit de manger,
Millardo se précipita dans sa chambre pour rassembler ses affaires, car ce
soir, son père venait les chercher pour prendre quelques jours de vacances avec
sa famille, près du Lac de Garde. Le petit prince rassemblait les jouets de sa
sœur lorsqu’un claquement sec se fit entendre, faisant, une fraction de
secondes plus tard, s’ébranler les murs du château dans un grondement sinistre.
L’enfant se figea, un instant trop surpris pour oser bouger. Des centaines de
questions virent soudain se bousculer dans son esprit : Qu’est ce qu’il
venait de se passer ? Qu’était cet affreux bruit qui venait de faire
trembler le palais ? Et pour la première fois de sa vie, Millardo sentit
la peur le traverser de part en part. D’un seul coup il eut un éclair de
lucidité : Sa mère et sa sœur.
Il bondit aussitôt hors de sa
chambre et se précipita vers le petit salon. Soudain il se heurta à quelque
chose et tomba à la renverse, il n’eut pas le temps de réaliser ce qui venait
de se passer qu’une main le saisit et le releva.
-Venez Millardo, fit alors Pagan
en se saisissant du jeune enfant.
Et alors que les missiles
semblaient se faire de plus en plus menaçants, ils arrivèrent sur le parvis des
jardins royaux.
-Papa ! cria alors le jeune
garçon en se précipitant vers le roi.
Millardo se jeta sur son père et
agrippa ses petites mains autour de sa taille, il était terrorisé.
-Papa qu’est ce qui se
passe ? Pourquoi il y a toutes ces explosions ?
Le grand homme à la longue
chevelure d’or passa alors une main protectrice sur la tête du jeune prince et
s’abaissa à sa hauteur.
-Mon fils, fit alors la voix douce
et grave du monarque, écoutes-moi bien. L’armée de l’Alliance attaque notre
pays.
Le petit prince fronça alors les
sourcils, son père lui avait déjà parlé de l’Alliance, le royaume était sous
leur protection.
-Mais papa ! Pourquoi ils
nous attaquent ! Ce sont nos alliés ! Ils ne sont pas amis avec
nous ?! protesta-t-il
Le roi le regarda avec affection
et lui sourit tendrement.
-Malheureusement, le cœur des
Hommes est aisément corruptible…Mais toi tu n’es pas comme…
Soudain un sifflement puissant
retentit et un missile toucha l’aile sud du palais dans une gigantesque
explosion. Le ciel s’illumina de rouge sang et le sol se mit à trembler sous
leur pied. La reine retint un cri et serra la jeune enfant apeurée qui s’était
mise à pleurer dans ses bras. Millardo regarda complètement affolé autour de
lui, mais la poigne de son père ramena son attention.
-Tu n’es pas comme eux mon fils.
Ne laisses jamais la haine envahir ton cœur.
La lueur qu’il vit dans les yeux
de son père le saisit soudain au ventre, tellement de tristesses dissimulées
derrière une volonté désespérée…
Le monarque sourit une dernière
fois à son fils puis se releva.
-Papa ! Qu’est ce que tu
fais ! cria-t-il soudain d’une voix brisée d’angoisse qui supplanta le
rugissement de la destruction qui s’opérait.
Le cœur du roi pacifiste se
serra à l’appel de son fils, mais néanmoins il ne se retourna pas.
-Millardo, prends soin de ta
mère et de ta sœur, fit-il alors d’un air détaché tout en se dirigeant vers la
reine.
Le jeune prince allait s’élancer
à sa poursuite mais la main de Pagan emprisonna son épaule. L’enfant releva
alors des yeux remplis de colère et de larmes sur celui qui le retenait, mais
le regard que le majordome lui adressa le saisit. Pagan hocha alors
négativement la tête avant de regarder le roi et la reine s’enlacer une
dernière fois. Millardo, incapable de quelque réaction que ce soit, suivit le
mouvement et se tourna vers ses parents.
Il ne comprenait rien à ce qui
se passait, tout s’embrouillait dans son esprit dominé par la peur. Les
flammes, le bruit, les larmes…ça ne pouvait pas être réel, ce n’était qu’un
mauvais rêve, il ne pouvait pas croire ce qu’il voyait dans leurs regards.
La dernière vision qu’il eut de
son père, ce fut lorsqu’il embrassa tendrement le front de sa jeune sœur avant
de la reposer dans les bras de sa femme, il murmura alors quelque chose qu’il
lui fut impossible d’entendre à sa mère qui l’enlaça une dernière fois. Ils se
regardèrent encore un instant, incapables de briser ce lien puissant qui les
unissaient. Finalement la reine hocha la tête, et son père fit volte face,
prenant la direction du palais, pour ne plus jamais se retourner.
Son dévoué majordome et ex-agent
des services de renseignements allait lui emboîter le pas lorsque celui-ci
intervint.
-Non Pagan, fit-il en
s’arrêtant. Mon ami, je vous en prie, prenez soins de ma famille.
-Je vous en donne ma parole,
Théodien, promit-il en lui adressant un triste sourire qu’il ne vit jamais.
Le roi hocha alors la tête et
disparut dans l’enceinte du château en flamme au moment même où des
transporteurs survolaient le palais, libérant de leurs soutes des dizaines
d’armures mobiles qui atterrirent lourdement au sol.
Pagan n’attendit pas une seconde
de plus.
-Aux écuries ! ordonna-t-il
en saisissant la main du jeune prince tétanisé.
Mais il était déjà trop tard,
les détecteurs de chaleur des robots mobiles les avaient repérés et les soldats
à terre envahissaient à présent les jardins royaux à leur poursuite.
Pagan, qui courait juste
derrière la reine, fit alors volte face et dégaina son arme tout en libérant le
prince.
-Millardo ! Avec votre
mère ! commanda-t-il avec une telle autorité que l’enfant obtempéra
aussitôt.
Et alors que le petit blond
s’enfuyait vers les fourrés, les premiers tirs entre l’ex-agent et les soldats
retentirent. La peur lui donnant des ailes, le prince rejoignit bientôt sa
mère.
Ils coururent encore quelques
minutes qui parurent s’allonger jusqu’à l’éternité avant d’apercevoir enfin les
grandes portes des écuries royales. Ils quittèrent alors la protection des
bosquets et se précipitèrent vers le bâtiment.
La reine referma d’un geste
ample les portes coulissantes avant de verrouiller l’entrée. Les deux êtres
essoufflés mirent quelques secondes avant de reprendre leurs esprits. Soudain,
le silence des lieux les frappa. La reine, qui était resté face à la porte se
retourna alors et constata que tous les chevaux étaient pourtant là. Ils
étaient figés dans l’attente. Millardo regarda autour de lui, stupéfait et
apeuré. Il ne les avait jamais vus comme ça, c’était comme s’ils n’étaient plus
vivant, comme s’ils comprenaient trop bien ce qui se passait à l’extérieur…
Des cris au dehors le sortirent
soudain de sa réflexion, les soldats semblaient les avoirs retrouvés. La reine
sera un peu plus fort sa petite fille qui avait cessé de pleurer. Elle regarda
un instant autour d’elle, semblant chercher une issue. Son regard se troubla
alors l’espace d’une seconde puis elle abaissa ses yeux d’une douceur
inaltérable sur son fils.
-Millardo mon chéri, vient ici.
Le jeune prince accourut
aussitôt, alors qu’elle s’abaissait à sa hauteur.
-Millardo, tu te souviens du
passage ?
A cette question, les yeux du
petit garçon s’assombrirent et ses petits poings se serrèrent.
-Mon ange, c’est important, s’il
te plait, réponds-moi, insista la reine en le regardant avec toute sa
tendresse, sans jamais laisser transparaître sa peur.
Millardo céda finalement et
confirma silencieusement.
-C’est très bien mon chéri, lui
dit-elle en lui souriant faiblement.
-Je veux pas ! explosa soudain
le jeune prince. Je sais pourquoi papa est parti ! fit-il en regardant sa
mère avec colère. Toi aussi tu veux mourir ! T’as pas le droit !
lança-t-il un peu plus fort.
La reine ne dit rien, se
contentant de le regarder avec compassion. Face à ses yeux, la colère s’effaça
de son être, laissant à nu cette peur terrible, mêlée à une peine
indéfinissable.
-Maman…souffla-t-il d’une voix
tremblante, je veux pas que tu meurs…fit-il alors, les larmes coulant bientôt
sans retenues le long de son visage vibrant d’innocence.
La reine vaincue par sa
sincérité, laissa à son tour transparaître sa douleur. Elle caressa alors
tendrement la joue inondée de son fils.
-Ecoutes, les soldats savent que
nous sommes rentrés ici. Ils ignorent que Relena est avec moi, et avec un peu
de chance ils ne t’on peut être pas repéré toi non plus. Millardo, je ne peux
pas partir avec toi parce qu’ils doivent trouver quelqu’un ici.
La belle femme aux longs cheveux
châtains posa alors sa fille au sol, maintenant son équilibre encore précaire
dans l’étreinte de ses bras.
-Ma…man ? bafouilla alors
la jeune princesse en relevant ses grands yeux bleus mouillés de larmes sur sa
mère.
-Ma chérie, tu vas aller avec
ton frère. Tu vas être très sage et faire tout ce qu’il te dira,
d’accord ? lui dit-elle avec sa douceur naturelle.
Un adorable sourire prit alors
forme sur son visage, elle adorait lorsque sa mère la regardait comme ça, elle
était rassurée.
-Vi maman, répondit-elle avec
répartie.
La reine laissa à son tour
échapper un sourire, le cœur serré.
-A présent sois une grande fille
et ne pleures plus, fit-elle en essuyant ses yeux rouges.
La princesse se retourna alors
et se précipita vers son frère.
-Mi’do ! s’exclama-t-elle
alors qu’elle était réceptionnée par les bras du jeune garçon.
Millardo serra sa sœur contre
lui et fixa sa mère, d’un regard indéfinissable.
-Je vous aime très fort, fit
alors la reine en étreignant une dernière fois ces enfants. Millardo, il te
faudra trouver les Darlian, ils sauront vous aider. Sois très prudent mon chéri
et je t’en prie, n’oublie pas ce que ton père t’as dit. Quoiqu’il arrive,
l’essentiel c’est que vous vous en sortiez toi et ta sœur.
-Promis maman. Moi aussi je
t’aime.
La reine le relâcha alors et vit
le regard courageux de son fils.
-Ton père serait très fier de
toi. A présent il faut y aller fit-elle en se relevant.
La reine se dirigea vers le box
face à elle, dans le fond de l’écurie. Féanor, le grand cheval blanc du roi,
les observait depuis qu’ils étaient entrés, immobile. La reine flatta l’encolure
de l’animal et déverrouilla la porte de son box, faisant rentrer ses enfants.
-Prends bien soins d’eux, lui
murmura-t-elle alors.
Soudain la grande porte
s’ébranla, les soldats tentaient de l’ouvrir.
-Dépêches-toi Millardo, ordonna
alors la reine qui n’adressa pas un regard à ses enfants. Elle referma le box
et se dirigea vers l’entrée avec une détermination incroyable. Elle ne
laisserait personne toucher à ses enfants.
Relena aussitôt que son frère
l’eut libéré se précipita vers l’étalon.
-‘anor ! s’exclama-t-elle
en s’agrippant à l’un des membres antérieurs de l’animal.
Tout à coup le prince se
retourna et la saisit par les épaules, la faisant sursauter de peur.
-Relena, écoutes-moi, tu ne dois
plus faire de bruit, plus le moindre bruit quoiqu’il arrive, même si tu as très
peur, c’est entendu ? fit-il en la fixant avec insistance.
La princesse regarda un instant
son frère et hocha la tête en signe de réponse. Millardo ne put s’empêcher
d’être attendri par l’attitude de sa sœur. Leur mère avait raison, il fallait
qu’ils s’en sortent, il fallait qu’il le fasse, au moins pour Relena.
-C’est très bien, dit-il en lui
caressant affectueusement les cheveux. A présent, restes avec Féanor jusqu’à ce
que je viennes te chercher.
L’enfant se dirigea alors vers un
coin du box et dégagea la paille, découvrant une dalle de béton, il enleva les
joints qui protégeaient la trappe et glissa ses petits doigts dans la fente. Il
sentit alors sous ses phalanges, l’écran tactile et entra le code qu’il avait
si souvent répété.
Et au moment même où la dalle se
soulevait, une explosion ébranla le bâtiment. Relena ferma les yeux et
s’agrippa un peu plus fort à Féanor, terrorisée. L’étalon baissa un instant la
tête vers la jeune princesse, mais resta parfaitement immobile, fixant avec
insistance les étrangers qui venaient d’entrer.
Millardo, aidé par le vent de
panique qui avait gagné les autres chevaux, rejoignit sa sœur sous couvert de
l’agitation générale.
Relena, en le sentant approcher
releva la tête qu’elle avait logée contre l’animal, révélant ses yeux remplis
de larmes de terreur. Le jeune prince lui adressa un pâle sourire et la prit
dans ses bras. Il s’apprêtait à partir lorsqu’il aperçut à travers les fentes
de la porte en bois, sa mère qui faisait face aux hommes qui venaient de faire
exploser la porte. Complètement hypnotisé, il se figea.
Les soldats qui tenaient sa mère
en joue s’écartèrent alors pour laisser passer leur chef, un homme de petite
taille, corpulent, qui aurait pu apparaître sympathique si son regard ne
brûlait pas de cette expression de cruauté folle.
-Nous avons eu le roi, et voilà
maintenant la reine qui s’offre à nous ! s’exclama le général. Mais
dites-moi, je crois qu’il me manque encore deux têtes pour que mon tableau de
chasse soit au complet.
La reine, totalement immobile,
se contentait de fixer le militaire, son regard bleu ne retranscrivant pas la
moindre émotion. Elle était impériale, comme elle l’avait toujours été, sans
aucune prétention, mais sa présence respirait la prestance.
Il ne fallut pas longtemps au
général pour être agacé par la présence écrasante de cette femme. D’un seul
coup, par un geste vif il saisit la mâchoire fine de la reine entre ses mains,
se rapprochant davantage.
-Allons Elisabeth, ce serait
vraiment dommage de devoir abîmer un si joli visage, nous qui sommes amis
depuis si longtemps lui souffla-t-il en descendant sa main le long de son corps
qu’il caressa avec indécence.
Millardo se crispa en voyant cet
homme répugnant poser les mains sur sa mère et bientôt une sensation nouvelle
grandit en lui, quelque chose de plus fort que la colère, au-delà de tout ce
qu’il avait connu auparavant. La haine, une rage profonde qui le remplissait
d’une chaleur digne des enfers et qui faisait vibrer son cœur dans sa poitrine.
-Vos paroles sont du venin, fit
alors la reine dont les yeux semblaient s’être assombris, comme cela a toujours
été le cas. Vous êtes un être abject, reprit-elle, et quoi que vous puissiez
faire, ce royaume ne sera jamais votre, car tout comme vous ne pourrez jamais
obtenir la moindre coopération de ma part, le peuple de Sank restera à jamais
fidèle à ses principes ! cria-t-elle soudain.
L’espace d’une fraction de
seconde, le temps sembla se suspendre, jusqu’à ce qu’un gémissement de douleur
retentisse, la reine tombant à genoux.
D’un geste sec, le général
retira la lame de son poignard, et la reine laissa échapper un cri avant de
plaquer contre son abdomen sa main qui s’immacula bientôt de sang. Un râle
profond s’éleva de la femme à terre et sa respiration se fit rapidement
saccadée, l’oxygène commençait déjà à lui manquer.
Le jeune prince resta un instant
paralysé, incapable de défaire son regard de sa mère. Comment pouvait-on faire
preuve d’une telle cruauté ? C’était
inhumain d’affliger une telle souffrance ! Des larmes silencieuses
inondèrent bientôt son visage, jamais auparavant il n’avait ressentit pareille
douleur. Sa mère ne méritait pas ça, il ne pouvait pas le croire. Il ne pouvait
pas croire que l’Homme puisse se montrer ainsi fourbe et sadique…et où était son
père ? Où était le roi pacifiste qui lui avait toujours appris à croire en
l’humanité ? Que dirait-il face à ça ! songea-t-il alors en sentant
cette colère noire grandir en lui. Il lui en voulait, il était tellement triste
et furieux, tellement désespéré…
Le général s’abaissa alors
jusqu’à l’oreille de la reine suffocante.
-Allons Elisabeth, dites-moi
juste où se trouve le prince et j’abrégerais vos souffrances, lui susurra-t-il.
Mais l’homme eut pour seule
réponse un silence lourd de signification, juste perturbé par la respiration
bruyante et saccadée de sa victime qui perdait à chaque seconde un peu plus de
vie.
-Dans ce cas là je ne peux plus
rien faire pour vous, votre majesté, fit-il en se relevant avec dédain.
Sans accorder aucune
considération à la reine, il se retourna et prit son talki.
-Baker, alors où sont les
gamins ?
-Impossible à dire général Daigo
Onégel [6], les détecteurs
de chaleur ne peuvent rien repérer avec tous ces chevaux. Ca brouille tout le
système.
Le militaire, que la colère
gagnait peu à peu, se tourna aussitôt vers ses soldats.
-Et bien alors ! Qu’est ce
que vous attendez ! Fouillez-moi ces écuries !
Les hommes commencèrent à se
mettre en mouvement lorsqu’ils se rendirent compte que certains d’entre eux ne
bougeaient pas. Le regard totalement happé par l’image de la reine qui mourrait
sous leurs yeux dans la douleur et l’indifférence la plus totale, dispersant
peu à peu sur le sol son liquide carmin. Ils étaient figés par une telle
horreur.
-Mais bordel ! Qu’est ce
qui m’a foutu des traînes couillons pareils ! explosa soudain leur chef
complètement hors de lui. Bougez-vous où je vous réserve le même sort !
Les hommes, pour la plupart, de
jeunes recrues des unités d’élite, apeurés par l’horreur qui se déroulait sous
leurs yeux, ne se posèrent pas davantage de questions et obéirent pour le salut
de leurs vies.
-Vous appartenez à l’armée de
l’Alliance. Votre devoir est de servir ses intérêts. Et je vous préviens que si
vous désobéissez à mes ordres, ce n’est pas à la cour martiale que vous aurez à
faire, mais à moi ! Ceux qui ne sont pas avec l’Alliance doivent être
éliminés, et si vous n’êtes pas en accord avec ces principes, vous n’avez plus
qu’à serrer les fesses, fermer les yeux, et espérer que je ne vous surprenne
plus jamais à votre faiblesse !
Et alors qu’il terminait son
monologue, dans l’inconsidération générale, la reine poussa un dernier soupir
et s’effondra dans son sang.
-Tient, fit alors Onégel en la
retournant d’un coup de pied, on dirait que la famille Peacecraft est sur la
voie de l’extinction !
Incités par le rire mauvais qui
venait de s’emparer de leur supérieur, les hommes se mirent à chercher plus
frénétiquement, ce qui attisa davantage le vent de panique qui avait gagné les
chevaux, hystériques.
Millardo, complètement sous état
de choc, se ressaisit soudain en sentant sa sœur s’agiter dans ses bras. La
jeune princesse se redressa alors et plongea ses yeux azur dans ceux de son
frère, interrogatrice. Elle vit alors que son attention était fixée sur quelque
chose de précis et s’apprêtait à tourner la tête pour satisfaire sa curiosité
lorsque la main de son frère se plaqua contre son petit visage. Il ne fallait
pas qu’elle voit ça. Millardo adressa un dernier regard à ce Onégel et grava ce
nom dans sa mémoire, promettant avec une rage qui brûlait son cœur, de tuer de
ses propres mains cet homme qui avait massacré sa famille. Il le payerait.
Le prince vit alors les soldats
s’approcher et n’attendit plus un instant. Il hissa sa sœur sur ses pieds et la
prit par la main. Les deux enfants passèrent sous le ventre de Féanor et se
glissèrent dans la trappe. Mais Relena peinait à trouver prise sur l’échelle et
le temps que Millardo assure ses appuis en la protégeant de son corps, les
soldats arrivèrent vers le box du cheval du roi. L’étalon recula alors et le
prince sut que s’en était fini pour eux. Mais à sa surprise, il vit soudain
l’animal rouer son encolure et se redresser de toute sa hauteur. Féanor se
cabra et abattit sa mâchoire grande ouverte sur l’un des hommes qu’il saisit
par l’épaule et envoya heurter violemment le mur sur le coté.
Le soldat retomba, mort. Les
autres s’écartèrent aussitôt, saisit par la peur, l’étalon blanc retomba alors
à terre et boxa violemment la porte en bois de son box qui s’ébranlait à chaque
fois davantage sous l’assaut de ses sabots. Les hommes n’attendirent pas une
seconde de plus et disparurent aussi vite que leurs jambes le leur
permettaient. Daigo Onégel, complètement dépassé par ce qui se déroulait, ne se
résolut cependant pas à perdre le contrôle de la situation.
-Brûlez tout ! ordonna-t-il
alors qu’il reculait à mesure que ses soldats quittaient le bâtiment.
Dès que l’armée de l’Alliance
eut refermé les portes des grandes écuries, Féanor cessa de s’agiter et tous
les autres chevaux s’immobilisèrent, le silence retomba dans les écuries, un
silence de mort…[7]
Même si au début Millardo
n’avait pas su quoi dire, aussitôt qu’il eut trouvé le chemin des mots, il lui
fut tout simplement impossible de stopper le flot de paroles qui déferlèrent de
son être, et Noin attendit patiemment qu’il se soit libéré avant d’intervenir.
-…Nous avons couru un moment
dans les sous-terrains, mais tout s’embrouillait dans mon esprit, j’étais
complètement perdu, je ne savais plus quelle direction emprunter, je ne savais
plus rien…Et puis Relena s’épuisait, alors nous nous sommes arrêtés dans un
coin et nous nous sommes endormis dans les bras l’un de l’autre…jusqu’à ce que
Pagan nous retrouve.
Et pour la première fois depuis
vingt minutes, le comte fit silence. Il n’en pouvait plus, il était épuisé, le
récit l’avait éprouvé, bien plus qu’il ne l’aurait crû…comme quoi il n’arrivait
toujours pas aller au-delà…Mais comment l’aurait-il put ? Le prince ferma alors
les yeux et inspira profondément, imposant à son cœur emballé de s’apaiser.
Noin sourit faiblement en le
voyant ainsi agir, cela lui avait fait du bien.
Elle libéra alors ses mains et
éleva l’une des siennes pour essuyer les dernières larmes qui courraient encore
sur ses joues. Le prince rouvrit aussitôt des yeux surpris. Il avait
pleuré ? Il ne s’en était même pas aperçut…mais toutes ces questions se
dissipèrent aussitôt qu’il rencontra le regard de la jeune femme qui était
restée à ses côtés.
-Lucrezia…murmura-t-il.
Noin, lui sourit faiblement et
caressa tendrement sa joue, il commençait à revenir à lui. C’était terminé. Car
aussi vrai que cela s’était révélé éprouvant pour Millardo, il en avait été
tout autant pour Noin. Le voir autant souffrir, aussi vulnérable…aussi sincère,
l’avait bouleversée. A cet instant, des milliers de questions trouvaient enfin
réponse en elle. Tous ces silences, ces états de mélancolie qu’elle lui avait
si souvent trouvé pendant toutes ces années, ils trouvaient ici leurs justifications.
-C’est terminé, lui dit-elle en
le regardant avec douceur. Tu es quelqu’un d’extraordinaire Millardo et tes
parents peuvent êtres fier de toi. Avoir su encore aimer et préserver après…ça,
fit-elle, incapable de trouver un mot pour qualifier son récit, c’est faire
preuve d’une grande force…et d’un cœur immense.
Le comte resta un instant sans
réagir, touché par la sincérité qui émanait de ses paroles. Son regard se
troubla néanmoins, il n’avait pas une aussi bonne estime de lui…non il ne
méritait pas tant d’éloges, il s’était engagé dans l’armée et avait tué bien
des Hommes…il avait désobéit à son père car la haine et la vengeance s’étaient
belles et bien emparées de lui, l’ayant consumé doucement pendant des années…et
même s’il était parvenu peu à peu à apaiser les blessures de son cœur, il lui
restait l’amertume, cette profonde déception qui ne le quitterait probablement
jamais tout à fait.
Mais le prince se ressaisit en
voyant le visage de Noin se voiler d’inquiétude à son attitude. Millardo quitta
alors ses sombres idées pour se concentrer sur celle qui avait tant
d’importance pour lui.
-Lucrezia, je suis désolé.
J’aurais dû t’en parler avant…je n’avais pas le droit de te cacher ça, je
n’avais plus le droit, plus maintenant…fit-il en baissant un instant son regard
teinté de peine.
Noin le fixa, muette, totalement
prise de court. Elle le vit alors, dans un élan de courage se redresser et
plonger ses yeux cistes dans les siens.
-Je comprendrais si tu avais
besoin de temps, si tu…si tu voulais t’éloigner de moi, continua-t-il en
s’efforçant de garder une voix égale…je ne mérite pas l’amour que tu me portes.
Pendant une seconde, aucun des
deux ne bougea, se faisant face l’un et l’autre. Millardo commençait à trop
bien interpréter le silence de Noin lorsque subitement elle se redressa et
emprisonna son visage entre ses mains. L’expression de son regard, un instant
obscurcie par la surprise, se mit alors à vibrer d’émotions.
-Millardo, je t’aime et rien ne
pourra jamais aller contre ça. J’ai foi en toi, comme je l’ai toujours eu, et
si tu ne m’en as pas parlé auparavant, c’est tout simplement parce que cela
t’était impossible…je suis très touchée par la confiance que tu m’as accordé
aujourd’hui, cela demande un grand courage.
La jeune femme fit alors silence
et observa le prince qui n’eut aucune réaction. Son cœur se serra soudain et un
affreux doute s’empara d’elle.
-Bien sûr, si tu veux rester
seul…si tu veux que je te laisse…fit-elle, tout à coup mal à l’aise.
Millardo, qui était resté sous
le choc des paroles précédentes, se réveilla soudain en se rendant compte de ce
que Lucrezia était en train de s’imaginer. Complètement dépassé par cet afflux
d’émotions, il lui fut impossible de garder un esprit lucide, il fit alors la
première chose qui lui vint en tête.
Le prince se redressa et éleva
ses deux mains pour saisir celles de Noin. La jeune femme, complètement
interdite, se laissa simplement conduire. Le comte l’attira alors vers elle et
l’embrassa avec une infime douceur. Lucrezia tressaillit à son contact et son
corps tout entier frissonna. Jamais auparavant il ne l’avait embrassé ainsi.
-Lucrezia, je ne veux pas que tu
partes, fit-il alors en brisant leur lien volatil. Je serais fou de souhaiter
une chose pareille car si je suis aujourd’hui un homme aussi heureux c’est
grâce à toi. Tu m’as été d’un tel soutient pendant toutes ces années, si tu
savais…murmura-t-il, le souvenir troublant un instant son expression.
Mais aussitôt l’expression du
pilote se fit plus intense, et il resserra doucement les mains de la jeune
femme.
-Je t’aime. Je t’aime et je
promets de te protéger, car à présent c’est à moi de veiller sur toi. Personne
ne fera plus jamais de mal à ma famille.
*****************************
Note de l’auteur :
Voilà ! Fini…30 pages, c’est la cata, sont de plus en plus long !
Bon, siouplez, me taper pas, sinon, je pourrais plus écrire et je serais très
malheureuse ^^ Je sais, je suis (un peu ) noire dans ce chapitre mais je vous
avais prévenu ! Bin, hésitez pas à me dire ce
que vous en pensez et à faire des tas de suppositions pour la suite…je suis
sûre que vous ne trouverez jamais ce que j’ai derrière la tête, hé
hé ! ! !
Temps écoulé durant ce
chapitre : 3 jours…je sais, ça fait un peu long trente pages pour trois
jours, mais y avait plein de choses à raconter ^^
Chapitre commencé le 08/12/2003,
terminé le 15/01/04