Disclaimer : Les personnages et l’univers de Gundam Wing
ne m’appartiennent pas, en revanche les persos que j’ai créé et l’histoire sont
ma propriété exclusive ^^
CETTE NUIT JE SERAIS AVEC TOI
De faibles sanglots, soubresauts
d’un mal inavouable, secouèrent son être tourmenté.
Le jeune homme cilla, alerté par
un douloureux murmure. Ses bras cherchèrent instinctivement la présence
rassurante de la princesse lorsqu’il se crispa, réalisant soudain que Relena
n’était pas là. Sa vision s’éclaircit aussitôt, lui révélant un corps
recroquevillé à l’autre bout du lit. Il l’appela doucement, mais sachant
pertinemment que cela n’aurait aucun effet, se redressa en même temps. Le
pilote se pencha au-dessus du corps ramassé pour la voir, serrant nerveusement
la couette contre son cœur alors que des larmes presque silencieuses
s’écoulaient à flot de ses paupières pourtant closes. Le cœur d’Heero se serra
et sans plus attendre, il s’abaissa vers elle. Ignorant la douleur du
mouvement, il l’enserra doucement alors qu’il déposait de tendres baisers sur
son visage figé par l’humidité. Ses pleurs s’atténuèrent à mesure qu’il la
tournait progressivement contre lui. La jeune fille à son contact, se logea
spontanément contre son cou. Elle tressaillit soudain et de nouveaux sanglots
la saisirent lorsqu’elle souffla son nom dans une plainte désespérée :
-Heero…
-Je suis là… murmura-t-il alors
qu’il laissait reposer ses lèvres contre ses paupières, asséchant l’origine
visible de ses tourments.
Quel que soit le cauchemar qui
l’avait envahie, il était temps qu’elle en ressorte, sa souffrance n’était que
trop éloquente pour le pilote. Il fallait qu’il la réveille.
Il continua à l’embrasser tout en
parcourant doucement son corps dans une caresse, tendre appel vers le réel.
-Relena, réveille-toi, ce n’est
qu’un rêve, tu n’as rien à craindre… tout va bien.
La princesse se tendit
insensiblement et ouvrit finalement les yeux, son éveil accueillit par les
lèvres humides de Heero contre sa peau… Humides ?
L’instant de flottement se volatilisa
au profit d’un vent de panique lorsqu’elle réalisa dans quel état elle se
trouvait. Mais le pilote contint son sursaut et sa voix douce et basse l’apaisa
aussitôt. La jeune fille, encore choquée par son rêve n’eut pas la force de
dissimuler sa peine, laissant ses larmes s’écouler librement alors qu’elle
abandonnait toute résistance.
Le jeune homme se contenta de la
serrer contre lui, comprenant que pour le moment c’était de sa présence qu’elle
avait besoin.
De longues minutes passèrent,
semblant suspendre le temps de cette fin d’après midi d’un automne mourrant.
Les sanglots de la princesse s’apaisèrent finalement et Heero attendit
patiemment son accord pour intervenir, ce qu’elle fit en quittant sa nuque
rassurante pour relever ses yeux embrumés.
Le jeune homme accueillit son
regard apeuré en s’efforçant à rester assuré. Il lui sourit faiblement alors
qu’une de ses mains se perdait dans ses longs cheveux châtains. Heero n’eut pas
besoin de mots pour exprimer sa volonté, et la princesse accéda à sa demande
respectueuse. Il ne l’obligeait à rien, jamais.
Elle inspira un peu plus
profondément et se lança, encore hésitante :
-Mère… j’ai vu maman et Pagan…
j’ai… hoqueta-t-elle alors que les images défilaient de nouveau dans son
esprit.
Le pilote, préoccupé, l’effleura
dans un geste inquiet, jusqu’à ce qu’il soit happé par son regard torturé.
-J’ai vu Onze tuer Pagan… puis
maman… il l’a battu à mort… et Pagan sa tête elle avait… elle… mon dieu !
fut-elle incapable de continuer alors qu’elle s’effondrait dans les bras
d’Heero. Il resserra aussitôt son étreinte dans un geste mêlé de sentiments
contradictoires. De l’amour et de la tristesse… mais aussi de la colère et de
l’amertume… Onze le lui payerait. Mais le jeune homme se ressaisit. Se laisser
aller à de telles pensées n’était vraiment pas nécessaire pour le moment. Il
lui fallait trouver des paroles rassurantes… mais que pouvait-il lui
promettre ? Que pouvait-il faire contre ça ? Il se trouvait tellement
impuissant à cet instant… lui qui était réduit à rester allongé dans un lit…
-Je ne crois pas qu’il leur ait
fait quoique ce soit. Ces otages-là sont bien trop précieux pour être
sacrifiés. Ils sont encore en vie. Et nous ferons tout pour les retrouver, je
t’en donne ma parole.
Relena releva la tête à ses paroles
pleines de bon sens. Il était évident que vivant ils leur seraient beaucoup
plus utiles… mais elle savait ce dont Onze était capable… alors qui sait ce que
ses hommes de mains pouvaient faire ?
-Ma mère ne mérite pas de subir
ça… elle est tellement douce et généreuse… elle a toujours su pardonner aux
autres. Jamais je n’ai vu la haine envahir son regard. Et pourtant… elle aurait
pu de nombreuses fois se laisser aller à la colère…
Le pilote sourit faiblement au
regard de la princesse, un instant perdu dans le passé.
-Cela prouve que c’est quelqu’un
de très fort. Et puis elle n’est pas seule. Pagan est un homme surprenant.
-Oui, se détendit-elle
sensiblement à sa remarque, il est plein de ressources. J’ai toujours pu
compter sur lui.
Le silence retomba dans la pièce
jusqu’à ce que le regard vague de la jeune fille s’illumine d’un nouvel élan.
Elle essuya ses dernières larmes et plongea ses yeux d’océan dans les cieux
ténébreux du pilote.
-Tu as raison. Je dois garder
espoir. Je ne dois pas me laisser submerger par mes angoisses. Je ne referais
pas deux fois la même erreur.
Le jeune homme lui adressa un
regard empli d’affection.
-J’ai toute confiance en toi,
souffla-t-il alors qu’il déposait un baiser délicat sur son front.
Relena ferma les yeux, appréciant son
toucher. Et elle glissa un bras par-dessus sa taille fine, l’enserrant à son
tour.
-Merci d’être là… si tu savais
comme c’est important pour moi.
-Pour moi aussi.
Mais leur douce intimité fut trop
rapidement interrompue par Anna qui fit retentir sa voix alors qu’elle venait
de frapper discrètement à la porte.
-Heero, Relena ?
-Oui, répondit la jeune fille, qui
y a-t-il ?
-C’est l’heure d’y aller. Azim
vous attend.
-Très bien, nous arrivons,
déclara-t-elle la voix lointaine. Loin de cette réalité qu’elle aurait aimé
pouvoir suspendre encore, ne serait-ce que l’espace d’un instant.
Le silence retomba, lourd des
conséquences à venir de cet appel. Le couple se perdit dans le regard l’un de
l’autre, s’encourageant mutuellement par un baiser sincère et aimant. Ils
étaient ensemble maintenant. Plus jamais ils ne seraient seuls à affronter
leurs ennemis. Et c’était l’essentiel pour eux à présent.
Leur volonté d’y croire encore.
*****************************
Duo, en tant qu’as de
l’infiltration s’occupa d’effacer toute trace d’infraction sur la base de
Singapour pendant que Millardo se chargeait des appareils subtilisés.
Le jeune pilote de Gundam, fidèle
à sa réputation travailla avec efficacité, et en moins de trois heures,
l’opération était bouclée alors que Heero et Relena transitaient vers l’Asie.
Les deux hommes n’eurent pas à
attendre longtemps, l’avion supersonique qui avait été mis à disposition d’Azim
avala les 10 000 km qui les séparaient de leur point de chute en quelques
heures. L’appareil atterrit dans la nuit tropicale comme transporteur à
destination du Japon. Il ne faisait ici qu’une escale afin de réceptionner de
la marchandise. Le temps leur était compté.
Mais rien n’avait été laissé au
hasard par les deux pilotes de Gundam, et aussitôt que la soute s’ouvrit, un
cortège de colis défila alors qu’un homme en blousse bleu, une casquette noire
fichée sur la tête, se détachait de la procession pour se diriger vers le poste
de commande.
Un clin d’œil à Azim et le Maganac
fit signe à ses passagers de se montrer. Heero et Relena apparurent alors de
l’obscurité, habilement dissimulés. Duo s’attarda un instant sur son ami. Un
imperceptible recourbement de lèvres détendit son visage professionnel avant
qu’il ne leur fasse signe de les suivre.
-Nous n’avons pas beaucoup de
temps. Notre navette part dans dix minutes. Merci Azim.
-Hey Duo ! l’interpella-t-il
avant qu’il ne disparaisse, c’est quoi toute cette marchandise ?
Le jeune homme esquissa un
sourire.
-Ça aurait été trop lourd pour
notre navette. Je compte sur toi pour en faire bon usage !
Et après un signe de main pour
ultime explication, le petit groupe disparu, avalé par les couloirs assombris
de la gigantesque base.
Les pistes réservées aux appareils
terrestres et celles pour les spatiaux se trouvaient diamétralement opposées,
et c’est d’un pas rapide et assuré que Duo les conduisit dans le dédale de
halls et de passerelles qui reliaient les différents secteurs, une main posée
nonchalamment contre sa hanche, prête à saisir son arme et toujours un œil sur
ses deux protégés qui le talonnaient. Il fut rassuré de voir Heero se comporter
en garde du corps avec la princesse, une main entourant la taille de la jeune
fille dissimulée sous un voile, il était aux aguets, attentif à son
environnement alors que son visage reflétait l’image même de l’impassibilité.
Son ami était concentré sur sa mission. Et c’était plutôt bon signe.
Par chance, l’aéroport était
relativement désert à cette heure avancée de la nuit et c’est sans encombres
qu’ils arrivèrent à bord de la navette, alors que Millardo aux commandes
recevait l’ordre de rejoindre la piste de décollage.
-Heero avec moi, Relena
attache-toi, Millardo, traîne pas où tu vas rater Azim ! ordonna le natté
alors qu’il prenait place au poste que lui cédait le prince.
-J’y vais, soyez prudent.
Le comte s’attarda néanmoins un
instant sur sa sœur qui s’attachait docilement. La jeune fille en le voyant
s’arrêter releva aussitôt la tête pour se trouver happée par ses yeux
princiers. Le pilote esquissa un sourire et effleura d’un large geste de main
le crâne de sa protégée. La princesse lui rendit son sourire.
-Sois sage, petite sœur,
lâcha-t-il avant de s’élancer vers la porte ouverte alors que l’appareil
s’ébranlait.
-Toi aussi ! lui
adressa-t-elle alors que sa silhouette s’effaçait, un dernier éclair argent
marquant sa disparition avant que le sas ne se referme.
-Heero tu te sens de
m’assister ? demanda le pilote à la natte alors qu’il jetait un coup d’œil
à la princesse tout en pianotant sur son tableau de commandes.
-Je suis prêt.
-Très bien, alors c’est
parti ! s’exclama-t-il en jouant fébrilement de ses doigts sur ses
manettes.
La navette prit son envol et le
silence fut de rigueur pendant les 9 minutes décisives ou le rugissement de
l’appareil en lutte contre la résistance de l’air supplanta toute parole.
Le silence s’abattit soudain en
même temps que la violente accélération disparaissait, donnant un puissant
à-coup aux passagers.
Heero laissa échapper un cri
étouffé alors qu’il se penchait instinctivement vers l’avant.
-Heero !
-Hey vieux frère, ça va ?
s’enquit Duo alors qu’il posait une main inquiète sur l’épaule de son ami.
-C’est rien. Ce sont juste
quelques côtes douloureuses.
-Ouais, le genre de truc qui peut
te perforer un poumon si tu fais pas gaffe, fit le natté, une moue préoccupée
alors qu’il se tournait vers la princesse. Tu te sens comment Lena ?
-Je vais bien, merci Duo, lui
sourit-elle faiblement alors que son regard se posait sur le jeune brun.
-Relena, ça va, la réprimanda-t-il
doucement en voyant ses traits tirés. Ne t’inquiète pas, fit-il alors qu’il se
détachait, se levant pour la rejoindre, je ne me permettrais pas de négliger ma
santé alors que cela pourrait mettre ta vie en danger. Et c’est plutôt à toi
qu’il faudrait poser la question. Tu n’as pas l’habitude de ce type de navette.
-J’ai un peu mal au cœur,
avoua-t-elle faiblement, je crois que je devrais m’allonger un moment…
-Je t’y conduis, souffla-t-il en
déposant un baiser sur son nez alors que ses mains habituées détachaient la
jeune fille.
Et avant qu’elle n’ait compris ce
qui venait de se passer, elle se retrouvait debout, solidement assuré par les
bras d’Heero.
Un sourire amusé et attendri
accueillit la mimique surprise de la princesse.
-Viens…
*****************************
Heero revint quelques minutes plus
tard, s’installant en silence aux côtés du jeune homme qui réglait les derniers
paramètres du pilotage automatique pour les 400 000 km qu’ils avaient à
parcourir jusqu’à L2 [1]
Duo pivota alors face à son ami,
un sourire chaleureux en guise d’accueil. Ils avaient beaucoup de choses à se
dire.
-Je vais voir comment se portent
les Gundams et je reviens, déclara-t-il alors qu’il se relevait.
-C’est fait, le coupa alors Heero.
Tout est en ordre.
Le natté s’immobilisa, qu’à moitié
surpris.
-Je vois que certaines choses ne
changeront jamais, lança-t-il, taquin.
Le jeune brun le fixa, impassible,
mais Duo avait appris à le voir sourire, de l’intérieur.
-Ben merci ! s’étira-t-il de
toute sa hauteur alors qu’il se découvrait de sa casquette, provoquant le
déferlement d’une masse colorée et odorante.
-Mince… j’avais oublié… fit-il,
l’air embarrassé alors que sa chevelure s’immobilisait, descendant de plusieurs
centimètres au-dessous de ses reins.
Heero le fixa un instant. Il avait
rarement eu l’occasion de voir son ami ainsi, mais cela lui faisait à chaque
fois le même effet : ça le laissait béat. Duo n’aimait pas que l’on le
voit avec ses cheveux détachés, sans doute une certaine pudeur… d’ailleurs
qu’il le regarde ainsi semblait le mettre profondément mal à l’aise, il
rougirait presque…Duo qui rougit, songea Heero, amusé.
-Quoi ! se défendit le
concerné en voyant un sourire percer sur le visage de son ami.
-Tes cheveux détachés te vont très
bien, répondit-il simplement, le fixant avec sincérité.
Le jeune homme restant un instant
muet de stupéfaction, jusqu’à ce qu’un sourire, à mesure grandissant, remplace
son étonnement.
-Merci. Ils représentent beaucoup
pour moi. Mais les porter ainsi, c’est trop de souvenirs…
-Je comprends. Mais n’oublie pas
ce qui te lie aujourd’hui au présent.
-Tu as changé Heero.
-Ce qu’il s’est passé ces derniers
jours m’a aidé à réaliser certaines choses. Mais certains passages… me
manquent.
-Tu as perdu la mémoire ?
Le pilote acquiesça silencieusement.
-Bien, inspira Duo, je m’en
doutais. Je vais faire mon possible pour t’éclairer, lui promit-il alors qui
fouillait dans sa combinaison, cherchant un élastique.
Il trouva finalement l’objet
désiré et s’assit face à son ami alors qu’il rassemblait ses cheveux.
-Je peux ?
Le jeune homme se figea, relevant
spontanément la tête, interdit.
-Relena m’a appris…
-Heu ben oui je veux bien, merci.
Duo se mit de dos alors que son
ami se relevait, prenant délicatement en main ses cheveux châtains. Il ne fut
même pas étonné de la douceur de ses gestes et ferma les yeux de contentement.
Plusieurs minutes passèrent avant
qu’il ne reprenne la parole.
-Me fait plus jamais peur comme
ça, souffla-t-il dans un murmure à peine audible.
-Je sais. Excuse-moi Duo. Je ne
voulais pas te blesser… je ne voulais pas que tu te mêles de ça.
-Heero… tu le sais bien pourtant.
Jamais je ne t’aurais laissé mettre ainsi ta vie en danger. Et si Onze ne nous
avait pas pris en traître, c’est à moi que tu aurais eu à faire.
-Je sais que c’était égoïste de ma
part de me comporter ainsi, mais ce que j’ai vu dans les yeux de Relena…
-Tiens à propos de Rel’, il faut
que je te dise quelque chose, fit-il d’une voix soudainement grave qui figea
aussitôt son ami… Heero… Relena est enceinte.
Le jeune homme lâcha aussitôt sa
tresse et manqua de tomber à la renverse, le souffle coupé.
-Que… quoi ! Mais… c’est
impossible ! bafouilla-t-il complètement perdu alors que Duo faisait
pivoter son siège, lui faisant face.
Le pilote, scotché par la nouvelle
chercha désespérément une explication sur le visage de son ami. Et face à cette
expression désemparée, Duo ne put résister plus longtemps et explosa de rire
sous le regard encore hagard du concerné. [2]
-Duo ! gronda-t-il, incapable
de trouver ses mots. Non mais ça va pas !
-… pardon… de… m’être insinué dans
votre vie privée, articula-t-il en essayant tant bien que mal de se calmer. Je…
je vérifiais juste une théorie, fit-t-il en inspirant profondément. Heero, ne
m’en veux pas, mais en fait c’est ce que j’ai voulu te dire pour t’arrêter lors
de notre dernière bataille… mais j’ai pas osé… mais en voyant ta tête je me dis
que j’aurais pas dû hésiter !
-Idiot… soupira-t-il alors. Il y a
que toi pour avoir des idées pareilles.[3]
-Je sais ouais ! Mais je
n’ai rien à regretter puisque vous êtes là tous les deux, en vie et ensemble.
-Plus jamais je ne m’éloignerais
de Relena.
-Content de te l’entendre
dire !
Le silence retomba un instant, les
deux hommes se fixant avec affection et complicité.
-En attendant, tu n’as plus qu’à
recommencer ce que tu avais si bien débuté, déclara-t-il alors en offrant de
nouveau sa longue crinière châtaigne.
Le jeune homme sourit faiblement
et s’exécuta.
Duo sentit alors son ami se crisper
à mesure que les secondes passaient. Il voulait parler, mais il avait encore du
mal à extérioriser. Le natté avait passé plus de deux ans auprès du jeune
homme, et il avait peu à peu appris à le connaître, enfin à l’appréhender
aurait été plus exact jusqu’à peu encore. C’est en lui faisant doucement
exorciser ses démons intérieurs qu’il avait gagné son amitié. Et encore
aujourd’hui il sentait qu’il avait besoin de lui pour le faire. Il l’appelait à
travers ses gestes tendus.
-De quoi te souviens-tu ? souffla-t-il
alors qu’il fermait les yeux, sa tête basculant un peu plus en arrière.
Une autre chose qu’il avait
apprise : Que Heero parlait mieux lorsqu’on ne le voyait pas. Leurs plus
grandes conversations avaient toujours eu lieu dans la pénombre. C’était en
quelque sorte un gage de sécurité pour le petit pilote qui avait été jusqu’ici
malmené par la vie. Seule la nuit ne l’avait pas trahi… Faire confiance était
quelque chose de relativement insolite pour lui. Et avoir son alliée
l’obscurité à ses côtés l’aidait à mieux parler. Bien sûr maintenant c’était
différent. Mais Duo savait néanmoins que cela lui faciliterait les choses.
-Je ne me rappelle presque pas de
cette bataille… juste de ta voix qui me crie de ne pas faire ça… et de la mort
de Relena.
Le pilote haussa un sourcil.
-Je comprends mieux maintenant
pourquoi tu es sorti du Wing en plein milieu du champ de bataille.
-C’est à ce moment là que je me
suis fait tirer dessus, c’est ça ?
-C’est exact, tu t’en
souviens ?
-Pas exactement, Relena m’a
raconté ce qu’il s’était passé.
-C’est le Système Zéro. Et
apparemment c’est cette dernière vision qui a réussi à te faire sortir de son
emprise. Tu étais en état de choc lorsque tu as voulu quitter ton armure. Les
soldats ennemis se sont précipités sur toi sitôt qu’ils t’ont vu. Tu n’avais
aucune chance.
-Je n’ai aucun souvenir de ça… la
première chose dont je me rappelle c’est de m’être réveillé aux côtés de
Relena.
-Ça fait un sacré trou en effet…
-Duo… j’ai besoin de savoir… est
ce que j’ai… qu’est ce que j’ai fait ? Le Système Zéro… il a… a-t-il
vraiment pris le dessus ? souffla-t-il avec peine alors qu’il relâchait le
pilote, ayant terminé sa tresse.
Le jeune homme se retourna alors,
relevant ses paupières pour faire face au regard affligé de son ami. Après un
instant d’observation, ses yeux se plissèrent de détermination et il se pencha,
posant une main sur le genou du pilote face à lui.
-Je vais être honnête avec toi
Heero. Tu as eu le mauvais rôle dans cette histoire, mais ce que tu as fait a
retourné la situation à notre avantage. Sans toi… on ne serait probablement pas
là tous les deux. Oui, tu as tué. Mais la guerre est ainsi. Ce n’est qu’utopie
que croire pouvoir gagner une bataille armée sans la moindre perte. Je sais que
tu t’étais promis de ne plus jamais prendre la vie d’un autre. Mais ce n’était
plus toi aux commandes. Tu n’as rien à te reprocher.
-Bien sûr que si !
haussa-t-il soudain la voix, vibrante de colère et de mépris. Je n’aurais pas
dû le laisser prendre le dessus ! Comment ais-je pu… le laisser prendre la
vie d’un autre soldat… encore de la chair à faire la guerre pour défendre les
idées d’un haut placé qui se cache derrière la vie de ses subordonnés… Cela
revient à tuer des innocents ! lança-t-il alors plus fort encore.
-Arrête ! s’emporta soudain
le natté alors qu’il s’était redressé, le saisissant par les épaules, son
visage à présent si proche qu’il pouvait sentir son souffle se confondre avec
le sien.
Duo profita de l’effet de
surprise, cette fois, il ne le laisserait pas s’enfermer.
-On a toujours la possibilité de
choisir ! Toujours ! Se retrouver aux commandes d’une arme de
destruction simplement parce que c’est arrivé, c’est méprisable ! Ce sont
ces gens là qui sont capable de commettre les pires atrocités, se donnant bonne
conscience en se disant simplement qu’ils n’ont fait qu’obéir aux ordres !
Combien de ces hommes là as-tu tués pour combien de Résistants sauvés ?
Hein ? Des centaines à n’en pas douter ! Tu n’as pas l’air de
réaliser, mais je te signale que tu as sauvé beaucoup de vies ce jour-là !
Le jeune homme, le souffle écourté
par son cœur accéléré, marqua alors un instant de silence.
Heero le fixa, muet. Il ne l’avait
pas vu arriver et il l’avait ébranlé tout entier.
Duo releva finalement les yeux et
ses traits se détendirent en voyant l’expression de son ami. Sa colère se
dissipa au profit d’un regard affectif. Il releva alors une main qui se perdit
dans la chevelure hirsute de son compagnon.
-Il ne faut pas regretter ce qu’il
s’est passé. S’il y en a un qui doit se sentir responsable de tout ça, c’est
Wufei et personne d’autre.
-Comment a-t-il réagi après mon…
accident ?
-Sur le coup personne n’a rien
remarqué… mais à la fin de la bataille, il a laissé s’exprimer sa peine avant
de disparaître… Je lui en veux pour ce qu’il a fait, mais je m’inquiète pour
lui…
-Relena a été très affecté par ce
qu’il lui a dit... cependant jamais elle ne lui en a tenu rigueur… Je partage
son avis. Il pensait bien faire en agissant ainsi.
-Sauf qu’il a bien faillit causer
votre perte. Comment va Relena ?
Le jeune pilote soupira à cette
question.
-Pas très bien. Son retour sur le
devant de la scène l’inquiète…
-Tu crois qu’elle n’a pas vraiment
envie d’y retourner ?
-C’est plus compliqué que ça… elle
veut agir, aider les Résistants, vraiment… mais elle redoute toutes les
conséquences postérieures à son retour… Je crois qu’elle vit ça comme un
sacrifice…
-Tu m’étonnes, souffla Duo… elle a
le choix entre continuer cette nouvelle vie qui s’offre à elle, sa véritable
existence, sans conséquence pour des milliards d’autres, son simple bonheur à
elle et à ceux qui lui sont proche. Elle a le choix entre ça… et retourner dans
ce qu’elle considère à présent comme sa cage dorée… Parce que Relena est une
Princesse dans le sens le plus profond du terme. Elle se sacrifierait s’il le
fallait. Mais le fait est qu’elle s’est enfermée dans son rôle en oubliant qui
elle était… jusqu’à ce qu’elle atteigne ses limites. Elle n’a alors pas trouvé
d’autres solutions pour s’en sortir que de mourir. Si elle est ici aujourd’hui
c’est de notre responsabilité. Attention, ne me fais pas dire ce que je n’ai
pas dit, prévint-il alors qu’il voyait son ami qui s’apprêtait à réagir, je
suis le premier à être heureux qu’elle soit avec nous. J’ai beaucoup appris à
ses côtés. Et elle t’a beaucoup apporté également.
Le jeune homme hocha
silencieusement la tête.
-Tu penses qu’on devrait tout
arrêter ?
-Je pense que l’on doit tout faire
pour éviter de reproduire deux fois les mêmes erreurs. De mon point de vue,
Relena est la seule capable de mettre un terme à ce conflit. Bien sûr Iria a
son rôle à y jouer. Mais ce n’est pas Relena. Ce n’est pas la jeune fille
partie de rien qui a su conduire toute l’humanité sur la voie pacifiste. Je n’ai jamais oublié son regard le jour où
elle s’est mise en travers de ma ligne de mire. Jamais. Il y avait en elle
toute cette passion de préserver la vie. Et de te préserver plus
particulièrement [4] .
Relena a en elle cette âme sincère et passionnée qui conduira les Hommes à
aspirer à la paix. Seulement elle ne croit plus en la politique. Elle n’y
arrivera pas seule. Elle a déjà parcouru bien trop de chemin en solitaire.
Maintenant c’est à nous de l’aider.
-J’espère seulement que je serais
à la hauteur…
Duo accueillit dans un tendre
sourire la réplique de son ami.
-Heero, Lena a toujours cru en
toi. Elle t’aime comme il est rare d’aimer quelqu’un. Comme tu es, entier et
insaisissable, fit-il dans un doux regard. Alors n’ais craintes, jamais elle ne
te demandera quoique ce soit qui soit au delà de tes capacités. Jamais elle ne
te privera de ta liberté.
-Je sais… c’est aussi pour ça que
je l’aime tellement… souffla-t-il un peu maladroitement. Mais moi ? Est-ce
que je serais capable de l’aider comme elle l’attend ?
-Heero, au jour d’aujourd’hui elle
ne te demande rien de plus que d’être auprès d’elle, ce qui, me semble-t-il,
n’est sujet pas à discussion de ton côté, je me trompe ?
Le jeune homme acquiesça
silencieusement.
-Alors Carpe Diem mon grand,
fit-il en posant une main sur l’épaule du pilote. Vous vous aimez et vous
voulez être ensemble, il n’y a aucun mal à ça. Ne t’enfonces pas dans des
hypothèses hasardeuses quant à l’avenir, les choses seront se présenter
d’elles-mêmes le moment venu. Vis l’instant présent, profite autant que tu le
peux, on a qu’une seule existence et ce que tu vis aujourd’hui fait partie des
meilleurs moments, alors laissez-vous un peu aller. Ais confiance en toi et
tout se passera bien, termina-t-il dans un sourire serein.
-… Merci Duo, souffla-t-il, le
regard sincère.
-Pas de quoi mon ami,
l’accueillit-il dans un large sourire.
Et avant que Heero n’ait pu
rajouter quoi que ce soit, il enchaîna :
-Dis-moi, et si on jetait un oeil
à ces blessures de guerre ? Et après au dodo avec Rel’ !
-Tu ferais une nurse redoutable
Duo…
-Oui je sais ! J’ai des
instructions précises à votre sujet et je compte bien prendre soin de vous,
alors à l’infirmerie jeune homme ! l’invita-t-il à se relever alors qu’il
s’abaissait pour se saisir d’un sac contenant toutes les fournitures dont Sally
lui avait fait la liste.
*****************************
« Glimmer a été totalement
prise en otage par les Epyons Terros et toute communication avec la capitale
s’avère impossible. Ça y est ! Les troupes de la Résistance pénètrent dans
la citée, les Gundams en tête ! Souhaitons-leur bonne chance… eux seuls
sont à même d’éviter un bain de sang… »
« Merci Dany, n’hésitez pas à
nous prévenir de toute évolution. A présent, voyons le témoignage d’un citoyen,
ancien soldat des Epyons Terros qui a combattu contre Sank, d’après lui, cette
réaction extrême des Epyons Terros était à prévoir… »
-Ça y est, ça a commencé…
Duo se retourna pour voir
apparaître Heero et Relena, les traits encore tirés par le sommeil.
-Oui. On a plus qu’à croiser les
doigts pour les copains.
-On ne pourrait pas avoir une
liaison satellite ? interrogea la princesse.
-Si, mais on risquerait de se
faire repérer pas les Epyons Terros.
-Pourvu que tout se passe bien,
soupira-t-elle, le visage tendu alors qu’elle s’asseyait à l’arrière du natté.
Heero effleura sa joue, l’invitant
à s’apaiser. Elle releva alors son regard et lui offrit un sourire sincère.
Elle était tellement heureuse qu’il soit ici.
-Ne t’inquiète pas, les Epyons
Terros se sont creusés ici leur propre tombeau. Ils ne pourront rien contre les
troupes résistantes et les citoyens.
Le combat était engagé depuis une
vingtaine de minutes et les troupes menées par les Gundams progressaient sans
peine dans la capitale. Et à mesure que chaque rue de la ville se voyait
libérée, des citoyens en liesse se joignaient aux Résistants.
-Comment ça se passe de ton
côté ?
-Rien à signaler, déclara Trowa en
plongeant son regard dans celui de son ami.
Un court instant de silence marqua
leur échange jusqu’à ce que Quatre fasse appel aux autres chefs d’unités.
-Millardo ?
Noin ? Sally ?
A mesure que les visages qui
apparaissaient répondaient à l’affirmative, les traits du jeune blond se
tendaient. Un silence emprunt de respect et d’inquiétude accueillit
l’expression préoccupée du jeune leader.
-Quels types d’armures avez-vous
rencontrés ?
-Des MS.
-MS.
-Idem.
-… quelque chose se prépare…
souffla le petit arabe à lui-même.
Mais il fut subitement sorti de sa
méditation par le visage d’Howard qui surgit sur son écran de commande.
-Les Epyons Terros ! Ils
quittent la Terre ! Ils s’en vont tous dans l’espace !
-Comment ! sursauta-t-il pas
tout à fait sûr d’avoir bien entendu.
-Un départ massif d’engins
spatiaux vient d’avoir lieux depuis la base de Mexico et celle de
Bangkok !
Un silence saisissant accueillit
cette déclaration, marquant l’impuissance des pilotes de la Résistance.
-L’attaque de Glimmer était un
leurre… lâcha Millardo, amer.
-Auquel nous étions forcés de
répondre, rajouta Trowa d’une voix égale.
-Oui… nous ne pouvions pas faire
autrement de toute manière. Si nous n’étions pas intervenus en force à Glimmer,
ils auraient imposé leur puissance, cela ne fait aucun doute…
-C’est vrai Noin, tu as raison.
Nous ne devons pas regretter nos choix. C’était la meilleure chose à faire… le
fait est que l’avantage est à présent pour eux. Nous devons terminer cette
bataille au plus vite et rejoindre l’espace. Le temps nous est compté !
Mais alors que le petit prince du
désert allait s’élancer au devant de ses ennemis, une éclatante lumière jaune
envahit son habitacle, faisant disparaître tous les visages de ses écrans de
commande. Quatre se plaqua contre son siège et se crispa alors que le Système
Zéro tentait d’envahir son esprit… mais pour quelle raison ? En aucun cas
il ne se trouvait en situation de faiblesse alors pourquoi le Système
s’imposait-il à lui de cette manière ? Et pourquoi son cœur venait-il
ainsi de s’emballer sans raison apparente ? Quelque chose d’anormal se
produisait… cela faisait déjà plusieurs minutes qu’il sentait comme un malaise
en lui… et voilà que le Système Zéro semblait s’y mettre lui aussi… il essayait
de lui faire comprendre quelque chose… à cette simple évocation son ventre se
noua d’angoisse et il n’attendit pas davantage, laissant le Système montrer la
voie à son esprit.
Le jeune homme eut la respiration
coupée à cette vision d’une réalité cruelle.
C’était la première fois qu’il
visualisait ainsi un événement, la première fois que son empathie amplifiait
les capacités du Système Zéro. L’apparition ne dura que quelques secondes, mais
cela suffit à ce que son esprit s’imprègne de la violence de la scène.
-Quatre réponds-moi !
La voix autoritaire de Trowa lui
donna le souffle vital et le pilote qui avait cessé de respirer, revint soudain
à la réalité, gonflant ses poumons d’oxygène.
L’image du petit blond, qui avait
disparu de leurs écrans revint brusquement, révélant un jeune homme flageolant
et recroquevillé sur lui-même, dont le corps se relevait et s’abaissait dans
des mouvements saccadés. Pendant quelques secondes seules la respiration de
jeune leader troubla le silence inquiet des autres pilotes.
-Quatre… l’appela de nouveau son
ami, d’une voix à présent douce et apaisante que peu pouvaient se vanter de se
voir attribuer.
Le jeune homme accéda à sa demande
et se redressa, révélant à Trowa l’étendue de sa blessure.
Le grand brun accueillit ce regard
meurtri avec une inquiétude qui se dissimula difficilement derrière ses yeux
devenus amandes. Et avant qu’il n’ait pu intervenir, Quatre prenait la parole.
-… Sally… il me faut ton Gundam…
articula-t-il alors qu’il se détachait et annulait les commandes du Sandrock.
-Comment ! s’exclama la
doctoresse.
-Il me faut un des Gundams que
Relena a fait construire ! Sally le temps presse ! s’emporta alors le
jeune arabe, haussant soudain sa voix qui chevrota aux dernières syllabes.
-Quatre, je crois que…
-Fais ce qu’il te demande, la
coupa alors Trowa.
La Préventers se tourna vers le
grand brun qui venait d’apparaître sur son écran, encore hésitante. Mais
lorsqu’elle vit la détermination de Trowa, elle ne se questionna pas davantage.
Il connaissait Quatre bien mieux qu’elle. Et jamais il n’aurait mis sa vie en
danger. Il avait confiance en son ami, alors il ne fallait pas hésiter à faire
de même.
-Très bien, ne bouge pas,
j’arrive.
Le petit prince gratifia son
compagnon d’un regard empli de reconnaissance.
-Tu la sauveras, souffla-t-il dans
une promesse confiante.
-Jamais je ne permettrais qu’on
lui fasse du mal, répliqua-t-il dans un faible sourire qui accueillit la
complicité qui le liait à son ami.
Leur conversation fut interrompue
par l’arrivée de la jeune femme. Quatre ne prit même pas le temps d’utiliser
son filin et sauta hors de son armure. Son corps encore affaibli, il vacilla un
instant en se réceptionnant. Mais il se redressa aussitôt, et malgré ses
mouvements encore hésitants, s’élança vers l’appareil de Sally.
La doctoresse eut juste le temps
de descendre pour le voir bondir dans son cockpit, apercevant furtivement ses
yeux bleu étrangement brillant.
Le cœur battant à tout rompre, le
jeune pilote pianota habillement sur son tableau de commandes et le Taurus
blanc de Sank s’éleva dans les airs. Il resta quelques secondes en suspens, le
temps de modifier sa structure. Dès que l’appareil eut pris son apparence de
chasseur, Quatre poussa les réacteurs au maximum et le Gundam se volatilisa,
rapidement absorbé par la lumière intense d’un soleil au Zénith.
Mais les Epyons Terros de
Glimmer, malgré leur position de faiblesse, profitèrent de cet instant de
flottement pour attaquer les Résistants.
-En positions ! ordonna le
comte à ses troupes.
-En attaque ! On ne peut pas
les laisser avancer, il y a les citoyens derrière-nous ! lança Noin alors
qu’elle ripostait, engageant ses hommes à sa suite.
Trowa s’envola aussitôt vers le
Sandrock et passa en position défensive, protégeant la dirigeante des
Préventers.
-Sally ! Monte à bord du
Sandrock !
-Quoi ! Mais je ne peux pas
le piloter !
-Tu y seras en sécurité !
Dépêche-toi ! Les commandes du Gundam de Quatre sont similaires à celle du
Taurus de Sank. Utilise-le de la même manière et il n’y aura aucun
problème ! termina-t-il alors qu’il faisait volte face, parant l’attaque
d’un Serpentarius.
-Très bien… bafouilla Sally, mal
assurée, alors qu’elle saisissait les manettes de commande du Gundam de sable
et de pierre.
-Vraiment toutes les
troupes ? répéta la princesse face au vidéocom qui laissait apparaître le
visage de Lady Une.
-Près de quatre cent vaisseaux
sont en partance de la planète.
-Mon dieu… souffla-t-elle en
recevant l’image satellite de la flotte ennemie qui quittait la Terre… une
multitude de navettes qui formaient un quadrillage grisonnant devant le bleu
éclatant de la planète.
-Où se dirigent-elles ?
enchaîna alors Heero, prenant la suite de la jeune fille trop surprise.
-J’ai des trajectoires pour les
cinq colonies principales. Mais le gros des unités semble se concentrer sur L2.
-Ils visent le sommet des Sphères
Unifiées…
-Probablement Duo, ils auront
juste le temps de se déployer avant la réunion.
-Mais ! Qu’est ce que !
bafouilla soudain Relena, coupant court à leur conversation alors qu’elle se
figeait face à l’image satellite.
Les deux pilotes relevèrent
aussitôt leurs regards sur l’écran de retransmission. Leurs visages
s’assombrirent dans un même mouvement. Lady Une se retourna alors pour faire
face au grand écran… et se figea à son tour.
-Tyler ! Donnez-moi la
destination de ces missiles ! ordonna-t-elle avec répartie.
-Tout de suite Madame !
Le cœur de Relena s’emballa et
elle crut que ses jambes allaient céder lorsque la voix du Préventers retentit
comme sentence ultime.
-Le… le royaume de Sank Madame…
La jeune fille retint un hoquet
alors que les larmes surgissaient de ses paupières qu’elle avait closes,
tentant vainement d’endiguer le flot. Incapable de soutenir l’élan de
souffrance qui venait de la saisir, elle s’effondra sur le siège qui, par
chance se trouvait derrière elle.
-Relena… souffla Heero se
désintéressant alors des écrans pour s’abaisser à sa hauteur, impuissant face à
sa douleur.
-Le traître… une attaque déloyale
sur le royaume pacifiste lorsque les Gundams ne sont plus là… belle vengeance
pour lui… fit le jeune homme à la natte, amer et résonnant de colère.
Mais il s’apaisa aussitôt en
voyant l’état de la princesse. Heero tentait de la faire sortir de son mutisme,
mais elle paraissait dans un état second. Elle releva soudain la tête, révélant
ses yeux à la teinte saisissante, d’une intensité cruellement profonde. Elle ne
se figea qu’une fraction de seconde avant de s’effondrer contre le pilote,
saisissant sa chemise de sa main crispée, tentant de concentrer dans ses
phalanges toute sa peine et sa colère… mais en vain.
Heero la serra contre lui,
trahissant par ses gestes le soutient de paroles silencieuses.
Duo et Lady Une restèrent un
instant figés dans un silence respectueux face à la détresse de ces deux jeunes
êtres.
La dirigeante des services de
renseignement fut la première à quitter la contemplation du jeune couple, ne
supportant pas de les voir ainsi. Elle tomba alors sur l’écran et trouva,
l’espace d’un instant que c’était encore un coup du sort de mauvais goût…
jusqu’à ce que…
-Att… Attendez !
bégaya-t-elle soudain alors que le satellite delta suivait la progression des
missiles.
Duo fut le premier à réagir, se
détournant prestement à l’appel de la jeune femme.
-Mais ! C’est un Taurus
blanc! s’exclama-t-il, un regain d’espoir dans la voix qui parvint à faire
sortir Relena de sa léthargie.
La princesse releva faiblement la
tête pour voir à travers ses yeux embrumés ce qui n’était encore qu’un point
blanc.
Iria, qui avait été conduite dans
la salle de commande des sous-terrains de Sank, abri anti-nucléaire officieux,
sauta une inspiration lorsqu’elle vit un des Gundams de Sank s’attaquer aux
missiles.
-C’est… incroyable… souffla
Dorothy alors qu’elle serrait encore la princesse effondrée dans ses bras.
-Il vient de Glimmer… mais comment
cela est-il possible ! continua Dave tout en entrant avec rapidité une
série de données sur son tableau de commande, jusqu’à ce que le résultat de son
calcul s’affiche…
-Impossible…souffla-t-il. Il
faudrait… il faudrait qu’il soit parti avant même que les missiles aient été
lancés !
-C’est le Système Zéro.
A cette réponse, Iria, à présent
libérée, se redressa vivement vers la jeune fille aux longs cheveux blonds.
-Dans le cas présent seuls le
Heavyarms et le Sandrock en sont équipés… cela signifie qu’ils ont dû avertir
le pilote de cette armure, termina-t-elle tout en fixant avec attention le
Taurus qui venait de détruire avec agilité son premier missile.
Un éclair de surprise traversa
subitement son regard opalescent et elle retint de justesse un hoquet de
stupéfaction. Dorothy resta un instant dans le vague lorsqu’elle réalisa
soudain qu’Iria la fixait, ses yeux à présent teintés de peur.
-Iria je…
-Non ! la coupa-t-elle avec
autorité. C’est Quatre qui se trouve à bord de cette armure !
s’emporta-t-elle dans un élan de peine alors qu’elle pointait l’écran de
commande.
Dave et Dorothy la fixèrent,
incapable de trouver à répondre face à sa détresse. Leur silence fut plus éloquent
qu’aucun mot. Mais face à leur inquiétude, la princesse s’efforça à se calmer.
-Pardon… souffla-t-elle à travers
sa gorge serrée… vous n’y êtes pour rien… si Quatre vient de s’engager là où il
a le moins de chance de gagner… tout simplement d’en ressortir vivant…
hoqueta-t-elle alors qu’elle détournait son regard de l’écran, tentant de
contrôler son élan de souffrance.
Sa respiration se fit plus
profonde et douloureuse alors qu’elle n’arrivait pas à faire taire l’appel de
son cœur. Mais à quoi pensait-elle ? Ce que Quatre était en train
d’accomplir se trouvait certainement être la meilleure chose qu’il puisse
arriver à Sank… une grande partie de Newport City serait probablement sauvée…
elle ne devait que se réjouir de son acte héroïque… en tant que Princesse de
Sank c’était son devoir. Oui… mais celle qu’elle était avant tout, l’Iria qui
vivait, il y a peu encore dans une petite maison de bord de côte en compagnie
de sa mère, seule famille qu’il lui restait, cette Iria qui avait toujours été
pleurer pour la vie de Quatre. Elle pleurerait un océan si cela lui assurait de
revoir son soupirant.
Une main douce et compatissante la
sortit de sa lutte intérieure. Le regard compréhensif de Dorothy la bouleversa
et la Princesse céda en faveur d’Iria.
La jeune fille s’effondra dans
l’étreinte protectrice qu’elle lui offrit, priant de toute son âme pour le
salut de son amant.
Les missiles filaient à toute
allure alors que dans une gigantesque explosion, le jeune pilote venait
d’anéantir une nouvelle arme de destruction.
Quatre serra les dents, Onze
semblait avoir tiré enseignements de sa dernière défaite. Les missiles avaient
été placés de telle façon qu’il ne pouvait les détruire qu’un par un… cette
attaque avait été minutieusement préparée… et la possible intervention de
Gundams avait été prise en compte dans sa stratégie… Et alors qu’il sollicitait
encore un peu plus son armure, la poussant à ses extrêmes, la terre approchait…
les contours de la capitale allaient bientôt apparaître distinctement… et six
missiles plongeaient encore droit sur la cité.
Un soupçon de capitulation
traversa un instant sa conscience, mais le jeune prince se ressaisit et dans un
cri de défi, pulvérisa une nouvelle arme. Il ne laisserait personne toucher à
Iria, même s’il devait mourir pour ça.
Tous les passants se figèrent de
stupéfaction lorsqu’ils virent le balai funeste qui se déroulait dans le ciel.
En un instant l’importance de ce combat leur parut évidente, et la peur fut
bientôt lisible sur le visage de bien des hommes qui, les yeux fixés vers les
cieux attendaient en suspens le salut de leur existence… cette armure blanche
était leur seule chance. Et ils le savaient.
Et c’est sous le regard de
milliers d’êtres, inconnus et proches que le jeune prince du désert rendit
l’impossible possible.
Quatre réussit à détruire cinq
autres missiles en déviant leur trajectoire les uns sur les autres. De
gigantesques explosions teintèrent le crépuscule d’une lumière surnaturelle et
le jeune pilote s’autorisa un soupir de soulagement… jusqu’à ce que ses
appareils de détection s’emballent. Il eut juste le temps de relever la tête
pour voir apparaître, surgissant de l’écran de flammes, un missile intact.
Quatre n’hésita pas une seconde et
se précipita sur l’arme. Il n’avait plus le choix. Le détruire ici, c’était
détruire une partie de la ville.
Le Taurus blanc empoigna l’engin
fusiforme et poussa ses réacteurs au maximum. L’action des deux forces en créa
une nouvelle et les engins entremêlés obliquèrent à la verticale, se dirigeant
en tourbillonnant droit sur la méditerranée.
-Mon dieu Quatre… souffla la voix
peinée de Trowa qui suivait la progression de son ami depuis qu’il était parti.
Le missile tactile venait
d’amorcer son système d’autodestruction. Et le jeune arabe ne pouvait se
détacher de l’arme. Ils étaient encore bien trop près de la cité.
Son sort était scellé.
Iria qui avait senti Dorothy se
figer releva la tête au moment où un grondement sourd retentit alors qu’une
lumière éblouissante s’imposait sur l’écran.
C’est ainsi qu’elle vit l’armure
blanche qui s’écrasait contre la mer se faire happer par ce monstre de fumée et
de feu surgi des abysses… un combat de titan s’engagea entre les éléments à cet
instant précis où elle aurait juré percevoir la douleur de Quatre… submergée,
elle laissa sa peine se joindre à celle de sa moitié pour la laisser s’exprimer
à la quintessence de sa puissance, déchirant tous les silences.
Tous se figèrent face à l’action
du jeune leader, stupéfiés par ce qui venait de se passer. Quatre s’était
sacrifié sans hésiter.
Ils attendirent, suspendus à la
surface redevenue passive du liquide, mais à chaque seconde qui passait
l’espoir s’amenuisait davantage.
Iria ne supporta pas ce silence et
quitta la salle, fuyant cette fatalité qu’elle se refusait à accepter.
-Iria !
-Non Dave ! Laissez-la
partir ! commanda la petite fille du Duc Dermail avec autorité, figeant le
majordome.
-Mais…
-C’est terminé. Il n’y aura plus
d’attaque alors laissez-la seule. Nous devons nous concentrer sur Quatre. Son
appareil est de gundamium, il est peut être encore vivant.
L’homme aux cheveux grisonnants la
fixa un instant pour obtempérer finalement, s’asseyant à ses côtés pour mettre
en fonction les balises sous-marines de détection.
La princesse en larmes courra dans
le dédale de sous-terrains jusqu’à en perdre haleine, ne sachant se repérer,
obnubilée qu’elle était par ces images qui se répétaient dans son esprit,
accentuant sa douleur. Ce n’était pas possible, Quatre ne pouvait pas
disparaître comme ça… elle ne pouvait pas le perdre… pas lui aussi.
-Mon dieu… hoqueta-t-elle alors
que des sanglots plus violents la traversaient.
Un bruit sourd retentit soudain
alors qu’elle crut que le sol se dérobait sous ses pieds. La princesse releva
un regard hagard, le souffle court, désorientée, elle prit le temps de revenir
à la réalité. Tout en cherchant à comprendre ce qu’il venait de se passer, ses
yeux embrumés s’attardèrent sur l’inscription au-dessus d’une gigantesque porte
d’acier.
P-O
La porte zéro … celle qui donne
sur l’embarcadère… Un bruit de tôle sollicité se fit alors entendre, Iria se
figea jusqu’à ce qu’un claquement sec retentisse. Elle sursauta au moment même
où le sol tremblait de la lourde chute d’une masse importante.
Le cœur accéléré de la princesse
embrouillait son esprit, mais une évidence lui apparaissait : il y avait
quelque chose derrière cette porte… et son cœur s’emballa un peu plus
lorsqu’elle évoqua la possibilité que ce pouvait être Quatre… oui mais il était
tout aussi possible, si ce n’est bien plus probable, que ce soit une présence
mal intentionnée… peut-être que les Epyons Terros tentaient en ce moment même
de s’emparer du royaume… Oui mais si c’était Quatre et qu’il avait besoin de
soins urgents…
Iria sentit de nouveau sa gorge se
serrer face à ce cruel dilemme. La même sensation qui l’avait habitée lors de
l’explosion du dernier missile la saisit soudain et elle se décida à suivre ses
sentiments… elle s’offrait peut-être à l’ennemi, mais quoiqu’il arrive, elle ne
livrerait pas son pays… il fallait qu’elle s’assure que Quatre n’était pas
derrière cette porte.
La princesse approcha sa main
tremblante de l’encodeur digital, et après avoir énoncé son identité d’une voix
la plus claire possible, le boîtier de contrôle émit un petit bip et la
gigantesque porte s’ébranla lentement.
La jeune fille aurait juré que le
temps avait ralenti sa course tant les secondes d’attente lui parurent une
éternité. Elle s’approcha un peu plus et pencha la tête à travers
l’entrebâillement des deux pans d’aciers qui s’écartaient doucement… son cœur
palpita lorsqu’elle aperçut les formes d’une armure blanche échouée sur la
berge… la porte s’ouvrit un peu plus, révélant la tôle noircie et le membre
amputé d’un Taurus blanc… et lorsqu’elle vit le pilote qui gisait entre les
bras de son Gundam étendu, elle n’attendit pas une seconde de plus et se
faufila à travers l’ouverture, se précipitant aussitôt vers le corps aux formes
fines, allongé, face contre sol.
Iria n’accorda aucune attention à
ce qui l’entourait et cette action lui aurait certainement été fatale si
quelque être mal intentionné avait eu l’intention de la piéger. Fort
heureusement seul le Taurus blanc avait trouvé le chemin de la base
souterraine. La princesse courut à grandes enjambées et ne prit même pas le
temps de ralentir, se laissant tomber sur la petite plage de sable fin qui
bordait l’embarcadère, là où le jeune pilote s’était échoué.
Elle allait le saisir lorsqu’elle
se figea soudain, son bon sens la rappelant à l’ordre. Quatre était peut être
blessé, et le bouger pouvait s’avérer fatal.
La jeune fille parcourut son corps
d’un regard angoissé alors qu’elle prononçait son nom… mais rien ne se
produisit et elle sentit son cœur se serrer alors que rien ne lui permettait de
s’assurer de son état, recouvert qu’il était par sa combinaison noire aux
lignes rougeoyantes.
-Quatre je t’en prie réagis…
supplia-t-elle d’une voix brisée.
Mais face à l’absence de toute
manifestation, elle se ressaisit et se décida à aller chercher du secours… oui
mais par où ? Elle était incapable de dire comment elle était arrivée
jusqu’ici… ces souterrains étaient un véritable labyrinthe… et si elle se
perdait en essayant de retrouver son chemin ? Iria sentit son ventre se
nouer un peu plus alors que la panique l’envahissait davantage chaque seconde.
Et alors qu’elle se sentait
capituler face au désarroi qui la gagnait, elle vit la cage thoracique du
pilote se soulever subitement. Stupéfiée, elle entendit alors un profond râle
s’élever du corps allongé. La princesse saisit aussitôt la main du jeune leader
pour sentir des doigts se refermer faiblement sur leur prise. Un sourire empli
d’espoir illumina son visage humide alors que Quatre s’agitait.
Il sentit quelque chose le retenir
dans ses mouvements et se figea instinctivement. Etait-il en danger ? Son
esprit malmené fut incapable d’apporter réponse à sa question. L’évidence
s’imposa d’elle-même lorsqu’il sentit deux mains délicates qui faisaient
glisser la fermeture éclair de sa combinaison, quelques secondes passèrent et
il put enfin respirer librement.
Iria resta un instant en suspens,
le casque encore dans ses mains, figée face à ce visage qui trahissait les
conséquences d’un combat éreintant. Les traits tirés, et de nombreuses mèches
collées contre sa peau humide, il présentait un teint extrêmement pâle.
La jeune fille posa doucement le
casque sur la grève sans cesser de fixer le pilote qui cillait sans parvenir à
ouvrir les yeux. Il tenta de bouger mais ne parvint qu’à élever faiblement une
de ses jambes. Son corps se refusait à lui répondre visiblement.
Elle hésita un instant et trancha
finalement en faveur de Quatre qui criait à l’aide. Elle prenait peut-être un
risque en le bougeant, mais le laisser ainsi s’agiter ne mènerait certainement
à rien de bon.
Elle se pencha doucement
par-dessus son corps et le bascula sur le dos avant d’entourer ses épaules et
de le soulever contre elle. Quatre laissa échapper un gémissement étouffé mais
se laissa manipuler par cette présence rassurante qui l’entourait d’une aura
protectrice.
La princesse eut un sourire triste
face au visage tourmenté du jeune homme qui semblait perdu dans un mauvais
rêve. Il semblait avoir du mal à s’éveiller.
Iria qui n’avait cessé de lui
parler, éleva alors sa main restée libre et effleura avec tendresse son visage,
chassant ses longues mèches blondes de son front en sueur.
Elle se surprit à le bercer
doucement alors qu’elle laissait sa joue reposer contre son crâne, comme si
elle voulait s’assurer qu’il était bien vivant.
-Je t’aime tellement… souffla-t-elle alors
qu’elle le resserrait insensiblement.
Quatre dut faire un effort pour
ouvrir les yeux et les confronter à la lumière qui l’agressait déjà à travers
ses paupières, mais il se donna les moyens de répondre à cet appel qu’il ne
reconnaissait que trop bien à présent.
-I…ria…
Elle se redressa instantanément à
ce murmure presque inaudible, pour être aussitôt happée par ses yeux de la même
teinte que cette mer qui avait faillit lui prendre son amant… elle était
tellement heureuse !
Le sourire de la princesse
l’enivra et fit disparaître tous ses tourments comme un vent tiède sur les
restes d’un hiver mourrant.
-J’ai… réussi… articula-t-il avec
effort, un faible sourire détendant néanmoins ses traits dans une expression
rassurée.
-Oui. Tout est fini à présent.
J’ai eu si peur pour toi… avoua-t-elle alors que sa voix en tremblait encore.
Quatre n’eut pas la force
d’atteindre son visage, mais releva sa main gantée pour saisir celle de la
princesse.
-J’ai cru devenir fou lorsque j’ai
vu ces missiles qui se dirigeaient droit sur toi… Je ne me le serais jamais
pardonné si je t’avais perdue.
La jeune fille sentit de nouveau
son cœur s’emballer alors qu’elle réalisait à quel point elle aimait cet homme.
Elle non plus n’aurait pas survécu à sa chute.
Le regard du pilote se voila
d’inquiétude alors qu’il voyait ses beaux yeux verts s’embrumer.
-Non… ne pleure pas… souffla-t-il,
d’autant plus affecté qu’il se savait incapable de bouger.
-C’est rien, lui assura-t-elle
dans un sourire sincère. C’est que… j’ai eu si peur pour toi…
-Ne t’inquiète pas, je vais bien,
c’est juste que la bataille a été un peu plus difficile que prévue. Mais je
n’ai rien de grave, rassure-toi.
-Ne compte pas sur moi pour te
laisser prendre quelque décision que ce soit tant que tu n’auras pas vu un
médecin ! menaça-t-elle, ses larmes se mêlant à son sourire aimant.
-Je vous suis tout dévoué
princesse, murmura-t-il faiblement, lui rendant son sourire.
L’expression de la jeune fille se
fit alors plus profonde et il put voir à travers ses yeux son âme encore
tremblante.
-Quatre… je… je t’aime,
prononça-t-elle finalement dans un souffle, mal à l’aise.
Le petit blond sourit tendrement
face à sa difficulté et resserra un peu plus sa main qu’il avait gardée contre
la sienne.
-Iria, je t’aime. Et je ne me
serais jamais pardonné d’être séparé de toi sans avoir pu te le dire.
La princesse resta un instant
muette de toutes les émotions intenses qui la transcendaient. Les mots
n’avaient plus aucune valeur tant ses sentiments étaient forts. Et
irrésistiblement attirée, elle s’abaissa vers le jeune homme jusqu’à sceller de
ses lèvres humides l’amour qu’ils s’étaient promis l’un à l’autre.
*****************************
La navette qui filait à travers
l’espace s’était faite silencieuse, coupant toute communication alors que
l’armée des Epyon Terros n’était séparée d’elle que de quelques heures.
Duo surveillait avec attention ses
écrans de contrôle alors que Heero était allé s’assurer de l’état de son
Gundam.
L’état de tension des deux hommes
était tel qu’elle aurait juré qu’ils s’apprêtaient à partir au combat d’un
instant à l’autre. Et ce n’était pas pour la rassurer.
C’est la voix du natté qui la
sortie de ses sombres pensées.
-Relena, tu veux bien venir
ici ? L’invita-t-il en quittant un instant sa surveillance, lui adressant
un regard amical.
Il ne pouvait la laisser ainsi
s’inquiéter.
La jeune fille lui sourit
faiblement, immédiatement rassurée d’entendre sa voix chaleureuse. Elle obéit
aussitôt et vint s’installer sur le siège qu’il lui présentait à ses côtés.
Elle fixa alors la multitude de commandes
qui s’offraient à elle dans une expression teintée de respect.
-Faut pas avoir peur de tout ça.
La princesse releva la tête dans
sa direction, qu’à moitié convaincue.
-Autant utiliser notre temps pour
des choses utiles ! Je vais t’apprendre deux trois trucs de base,
s’exclama-t-il dans un ton qu’elle ne lui connaissait que trop bien…
-Tu plaisantes ? fit-elle
dans un sourire mi-figue, mi-raisin.
Et le sourire du pilote
s’accentua.
-Relena, je pensais que tu me
connaissais mieux que ça, grimaça-t-il dans une moue contrite.
-Très bien, très bien ! Si tu
y tiens… mais je ne te garantis pas du résultat.
-Oh ! Je ne m’inquiète pas
pour ça Lena.
Ils se fixèrent un instant,
espiègles, jusqu’à ce que le sourire de la princesse se teinte de douceur alors
que son regard se faisait plus profond.
-Merci Duo.
Le visage du natté se détendit
dans une expression d’affection.
-J’aime pas te voir broyer du
noir. Ne t’en fais pas, ça va aller.
-J’ai toute confiance en vous.
-Et nous aussi nous croyons en
toi, répliqua-t-il de ce regard passionné qui lui était si particulier. Allez,
assez discuté, je vais te montrer quelques petites choses, on ne sait jamais.
Une exclamation du pilote figea
Heero à l’entrée de la cabine.
-Oh non surtout pas
celui-là ! Tu vois l’indication « lock » en dessous de la
commande ?
-Ceci ? fit-elle en désignant
un point sur le tableau de bord.
-C’est ça oui. Et bien si tu
actionnes cette commande, ce voyant va s’éclairer et cela voudra dire que ton
système d’autodestruction est verrouillé.
La princesse se redressa
spontanément et retira sa main du tableau de commande, une vague expression de
crainte sur le visage.
-Ne t’en fais pas, sourit Duo, il
y a toujours moyens d’annuler l’ordre, mais si ça te dérange pas trop, on va
éviter les sueurs froides !
Les traits du pilote adossé à
l’embrasure se détendirent dans une expression de douce contemplation lorsqu’il
vit Relena hocher faiblement de la tête alors qu’elle fixait encore le système
d’autodestruction avec appréhension.
La princesse vit alors un voyant
vert qui se mit à clignoter sous ses yeux. Elle le fixa un instant puis se
tourna vers le pilote qui s’occupait à régler elle ne sait quelle fonction.
-Duo, il y a un voyant vert qui
clignote… souffla-t-elle, se sentant un peu maladroite de ne pas comprendre
grand chose à tous ces appareils.
Le jeune homme pivota aussitôt et
elle vit son expression s’assombrir.
-C’est Lady Une, fit-il d’une voix
aux intonations graves.
Le visage de Heero se voila
aussitôt et il quitta son observatoire pour se rapprocher.
Relena eut juste le temps
d’adresser un regard furtif au petit brun qui venait de les rejoindre que le
visage de la jeune femme apparut.
Ils se fixèrent un instant, les
traits de Une ne laissant rien transparaître, son regard bleu aux reflets acier
trahissait qu’en ce moment même elle était la dirigeante des services de
renseignement des Préventers, et non pas la mère adoptive, douce et aimante
qu’elle était pour Mariemeia Kushrenada.
-Quatre est avec Iria. Vivant.
La pression redescendit aussitôt
dans la navette alors qu’un soupir de soulagement se faisait entendre.
-Dieu merci…
-Comment va-t-il ? questionna
le natté.
-Il est un peu sonné mais ça va.
Il a été conduit à l’hôpital par sécurité.
-Et où en est la bataille de
Glimmer ?
-Elle est terminée Heero. Les
Résistants ont repris la ville.
Relena qui avait relevé son regard
sur lui, fut soudain traversée par la crainte. Cette expression sur son visage…
n’augurait rien de bon…
Les yeux perçants du pilote se
plissèrent un peu plus alors qu’il n’avait pas cessé de fixer la jeune femme
sur l’écran.
-Nous nous sommes fait piéger
comme des débutants.
Lady Une retint un sourire
admiratif face au jeune homme qui la fixait, ses yeux vifs et son visage barré
d’une cicatrice encore rougeoyante.
Heero était au maximum de ses
capacités alors qu’il y a quatre jours à peine on l’aurait cru perdu.
-Ne sois pas trop dur avec
toi-même. Nous ne pouvions pas faire autrement.
-Je sais. Mais ils ont à présent
la certitude que nous ne sommes plus sur Terre. Et que Relena est avec nous.
Tout ça n’était qu’un leurre.
-Ouais ça va pas être facile, mais
on a l’habitude des situations impossibles !
Heero s’inquiétait pour Relena, il
le savait, il le voyait.
Le jeune homme détourna alors son
attention de l’écran pour fixer son ami natté.
-Bien sûr que nous y arriverons,
rétorqua-t-il, dans un regard qui lui disait merci.
-Je vous fais confiance acquiesça
alors Une. Bien, mieux vaut interrompre ici notre conversation. Les autres
pilotes préparent leur départ pour l’espace. Nous ne les laisserons pas faire.
L’affirmation de la dirigeante fut
accueillie par un hochement de tête approbateur des trois membres en présence
et elle s’autorisa un sourire avant d’interrompre la communication.
-Bonne chance.
-Allez ! Au travail !
ordonna la jeune femme dès que la communication fut fermée.
Tous se préparèrent pour la
prochaine bataille, mais une seule pensée occupait leurs esprits : La
navette de la princesse Peacecraft. Duo et ses compagnons étaient bien plus
vulnérables encore qu’ils se l’étaient imaginés…
*****************************
Grâce aux talents des deux pilotes
de Gundams et des membres de la Résistance coloniale, la navette échappa aux
Epyons Terros…
Suivant les indications du
professeur G, ancien mentor de Duo, l’appareil atterrit sur une base arrière de
la colonie.
Le pilote à la natte sortit en
premier, suivi par Heero qui observa prudemment les alentours avant d’autoriser
la princesse à se montrer.
Même si le gigantesque hangar
avait été évacué par sécurité, on n’était jamais trop prudent.
-C’est par ici, leur indiqua Duo,
lui aussi sur le qui-vive.
-C’est ainsi qu’ils arrivèrent
jusqu’à la salle de commande.
Le jeune homme à la natte ouvrit
la porte d’un geste vif alors que Heero était resté en retrait, une main contre
les hanches de la princesse, la maintenant en sécurité derrière lui..
Un homme à la longue blouse
blanche et aux cheveux grisonnant leur apparut alors de dos.
-Et bien Duo, tu m’avais habitué à
un peu plus de finesse, l’âge ne te réussit pas on dirait.
-C’est bon, fit-il en fixant
toujours son mentor qui venait de se retourner, c’est bien ce vieux fou de G.
-Les jeunes n’ont plus aucun
respect de nos jours ! soupira-t-il alors que Heero et Relena
apparaissaient.
La princesse ne fixa qu’un instant
cet inconnu avant de s’incliner respectueusement.
-Merci pour votre aide.
-Hum… ce que J m’a dit à votre
sujet n’était pas exagéré princesse Peacecraft, c’est moi qui suis honoré de
pouvoir aujourd’hui apporter ma contribution à la paix. Le visage inexpressif
du scientifique se détendit alors dans un sourire sec.
-Vous devriez mettre un peu de
graine dans la tête de Maxwell.
-Hey Papy ! Je t’autorise
pas… grogna le concerné. Une lueur traversa son regard avant qu’il ne
s’assombrisse dangereusement.
-Pourquoi Hilde n’est pas
là ?
-Parce que je ne voulais pas que
tu te mettes à papillonner comme un jeune faon en voyant cette petite
inconsciente aussi téméraire que toi dans ses grands jours.
Duo, qui s’apprêtait à riposter se
figea face à l’expression du vieil homme. G ne plaisantait pas cette fois-ci.
Il aurait juré que le professeur avait perçu ses craintes puisqu’il le rassura
aussitôt.
-Elle vous attend dehors. Mais
auparavant nous avons à discuter.
Mais malgré la tentative du
professeur, Duo ne parvint à écouter son état des lieux que d’une oreille
distraite. Toutes ses pensées allaient vers la jeune brune aux cheveux courts
qui lui avait tant manqué. Qu’est-ce que G avait bien pu vouloir dire ? De
toute manière c’était toujours la même chose avec lui, il fallait toujours
qu’il en dise trop ou pas assez. Le jeune pilote fit néanmoins des efforts et
porta le plus d’attention qu’il lui fut possible sur ses propos.
A la fin de la réunion qui lui
parut interminable, le vieil homme se releva offrant sa main à la princesse qui
accepta gracieusement son aide.
-Je crois que j’en ai assez dit
pour aujourd’hui, vous êtes exténuées.
-Ne vous en faîtes pas pour moi,
lui assura-t-elle dans un faible sourire.
-Prenez soin de vous Princesse,
recommanda-t-il alors qu’il adressait un regard au jeune brun resté à ses
côtés.
Heero répondit à sa demande
silencieuse et récupéra la main fine que lui offrit le professeur, lui
adressant un imperceptible signe d’acquiescement.
Une lueur de satisfaction traversa
ses yeux vifs avant qu’il ne parte de l’avant.
-Suivez-moi, une voiture vous
attend pour vous conduire à votre résidence temporaire. Ce serait trop risqué
de vous gardez ici.
Duo allait intervenir lorsqu’il
anticipa.
-Je m’assure de la sécurité des
Gundams. Ils seront déplacés dans le bloc S. Duo sait de quoi il s’agit. Bien,
c’est ici que je vous laisse. Tiens, fit-il en lançant d’un geste vif un
trousseau de clef comme par enchantement de sa blouse blanche.
Le pilote à la natte saisit le
projectile sans même prendre la peine de tourner la tête, ce qui arracha un
sourire à son maître.
-Je compte sur toi pour me montrer
de quoi tu es encore capable Duo.
-Te fais pas de soucis pour ça
Papy, rétorqua-t-il alors qu’il détournait la tête.
Les deux hommes se fixèrent un
instant, jusqu’à ce que le pilote, un faible sourire aux lèvres, ne rompe le
contact.
-Allez, on y va. J’espère que l’on
ne se reverra pas.
Le pilote à la natte s’installa au
volant et saisit la carte laissée sur le siège passager.
-Je le savais, fit-il en un coup
d’œil, rejetant l’objet sur les genoux d’Heero.
-Tu sais où nous allons ?
-Oui je connais cette baraque. Ça
a été une de mes planques pendant la Grande Guerre.
G lui avait donné les clefs ce
matin et lui avait ordonné de ne sortir sous aucune condition, prétextant que
ses actes héroïques avaient suffisamment attiré l’attention pour le moment.
Mais elle n’en pouvait plus
d’attendre. Elle était au siège de la résistance lorsque les Epyons Terros
avaient quitté la Terre en masse. Pas besoin de lui faire un dessin. Avoir
toute une armée à ses trousses n’était pas le meilleur moyen de s’en sortir
indemne.
Après ça le professeur lui avait
demandé d’aller de l’avant et de les attendre ici. Mais sa patience avait des
limites. Tout ce qu’il voulait, c’était ne pas prendre le risque qu’elle lui
torde le cou s’il arrivait quelque chose à Duo… elle allait devenir folle si
elle devait encore rester une heure de plus cloîtrée dans cette baraque. Hilde
poussa un profond soupir et éteignit la télévision sans même l’avoir regardée
une seule fois. Le silence envahit alors la pièce. Cette absence de vie qu’elle
ne supportait plus.
-Et merde ! jura-t-elle en
envoyant voler la télécommande sur le canapé, sentant sa gorge se serrer encore
un peu plus.
Elle n’allait bientôt plus être
capable de retenir ses larmes. Un triste sourire teinta son visage pâle. Qu’est
ce que cela aurait pu changer de toute manière ? Personne ne la verrait
pleurer, retenir sa peine pour Duo commençait vraiment à devenir absurde.
La jeune fille, fatiguée, laissa
échapper un sanglot étouffé lorsque le bruit d’une portière la figea dans sa
capitulation.
Est-ce que son esprit se jouait
d’elle de la manière la plus cruelle qui soit ?
Mais un second claquement démentit
cette hypothèse. Hilde se leva, et se dirigea, hésitante vers la fenêtre.
Elle crut qu’elle allait crier son
nom à pleins poumons lorsqu’elle vit une longue natte châtaigne se balancer
élégamment, en rythme avec le corps svelte et gainé de noir de son
propriétaire.
Relena venait de sortir de la
voiture lorsque qu’une jeune femme au visage familier apparut au seuil de la
grande bâtisse.
Hilde se figea face au pilote qui
venait de se retourner. Elle resta un instant incapable de bouger, complètement
submergée par l’ivresse de la joie.
Il souffla son nom et les yeux de
la jeune fille s’inondèrent de larmes trop longtemps contenues. Et sans plus
attendre elle se précipita à sa rencontre.
Duo coupa court à la distance qui
les séparait et saisit la brunette à la taille, la faisant virevolter dans les
airs alors qu’elle refermait ses bras autour de son cou.
-Ma chérie ! Tu m’as
tellement manqué… se confia-t-il alors qu’il la serrait un peu plus fort comme
pour s’assurer qu’elle était bien là, tout contre lui.
Relena sourit doucement à leur
étreinte, touchée par la profondeur des sentiments qui unissaient ces deux
êtres. Un souffle tiède contre sa peau la fit frémir un instant pour être
aussitôt balayé par la présence rassurante d’un corps contre le sien. Ils
s’échangèrent un regard avant qu’elle ne se laisse tomber contre le pilote qui
posa doucement sa joue contre son crâne, les yeux teintés d’une douce
compassion.
Il comprenait enfin ce que Duo
avait essayé de lui montrer pendant des années.
Il comprenait à présent à quel
point les sentiments pouvaient être puissants, quel était le véritable sens de
l’existence. Celui de la vie.
Hilde resta plusieurs minutes
serrée contre celui qui lui avait tant manqué avant de daigner relever la tête.
Duo sourit tendrement lorsqu’il
rencontra son visage expressif. Ils restèrent un instant à s’observer, se
retrouver, jusqu’à ce que le jeune homme traverse ses traits fins d’un revers
de main. Hilde cilla, réalisant soudain qu’elle avait pleuré. Elle laissa
échapper un sourire en pensant que c’était précisément ne pas verser de larmes
à cet instant qu’elle s’était si longtemps retenue. Mais cela n’avait vraiment
plus aucune importance.
-Ça va aller… lui souffla-t-il
doucement alors qu’il déposait un doux baiser sur l’arête de son nez.
La jeune fille tressaillit et
ferma un instant les yeux s’imprégnant de son toucher.
Et lorsqu’elle les rouvrit, il put
voir à travers eux la force de conviction qui l’avait toujours animée.
-Je suis présentable ou l’on a
l’impression que je viens d’éplucher une cagette d’oignons ?
-Tu es très belle, sourit-il à sa
réplique.
Le visage d’Hilde s’illumina.
-Oui enfin je suis pas sûre que tu
sois très objectif non plus !
Et avant que Duo n’ait pu
répliquer, elle se retournait vers ses deux invités. Le pilote la libéra juste
suffisamment, gardant un bras autour de sa taille, il lui emboîta le pas.
Relena fut la première à venir à
sa rencontre.
-Je suis contente de te revoir,
sourit-elle, sincère.
Hilde lui rendit son geste alors
qu’elle s’arrêtait face à elle.
-Ça fait un bail oui. Et je vois
que tu as finalement rejoint ce pilote que tu connaissais [5]… à
moins que ce ne soit l’inverse fit-elle, espiègle alors qu’elle posait son
regard sur le concerné. Heero l’insaisissable… ça me fait plaisir de voir que
tu vas bien. La brunette fronça alors les sourcils… Qu’est-ce que c’est que
cette blessure de guerre ? Tu as encore donné des sueurs froides à Duo toi
hein ?
Le pilote la fixa, esquissant un
sourire.
-Hum…c’est bien ce que je me
disais, termina-t-elle, malicieuse. Allez ! Ne restez pas là, les
invita-t-elle alors qu’elle tournait les talons.
Dès qu’il franchit le seuil de la
demeure, Duo fut saisit par l’odeur douce et appétissante qui embaumait les
lieux.
-Et en plus tu as fais la cuisine…
tu es une déesse… souffla-t-il contre son oreille, la suivant de près.
La jeune fille frémit alors que
son sourire s’agrandissait.
-J’en pouvais plus d’attendre, il
fallait que je m’occupe ! Vous avez faim ?
-Ce ne serait pas de refus… tu as
dû te donner du mal et puis ça sent tellement bon ! s’exclama la
princesse.
-Ça nous changera des
lyophilisées.
Hilde se retourna.
-Je prends ça pour un compliment,
le taquina-t-elle.
-C’en est un, répliqua-t-il, la
fixant, impassible.
Le jeune homme eut tout le loisir
de voir l’indécision qu’il avait provoqué chez elle à travers ses yeux
arrondis.
-Je suis sincère, rajouta-t-il,
égal à lui-même, ce qui fit sourire Duo et Relena qui s’échangèrent un regard
entendu : certaines choses ne changeraient jamais en Heero Yuy.
-Et en plus tu le penses !
s’exclama-t-elle dans un sourire teinté d’une joie amusée. Heero… tu es
vraiment quelqu’un de stupéfiant !
Le dîner se passa agréablement,
Hilde cuisinait vraiment bien et Duo était aux anges. C’était un réel plaisir
de les voir tous deux réunis. Ils s’additionnaient tout en se complétant à la
perfection. Rester si longtemps sans nouvelles l’un de l’autre dénotait une
force de caractère et une sincérité réciproque indéniable.
La discussion fut animée, mais les
conflits actuels ne restèrent qu’à l’état de suggestion. Ce soir le temps
n’était pas aux tourments mais au bonheur d’être ensemble.
Ils ne savaient que trop bien à
quel point la vie pouvait être fragile.
Hilde et Duo rejoignirent le
couple qui les attendait au salon. Le pilote à la natte effleura les hanches de
sa compagne et s’assit alors qu’elle déposait son plateau sur la table basse.
La jeune fille fit le service avant de se laisser aller à l’étreinte du pilote
qui prit doucement possession de sa taille alors qu’il déposait un baiser
tendre contre sa joue, la resserrant davantage contre lui.
Et alors que ses pommettes se
teintaient de rose, Hilde releva la tête pour rencontrer deux regards teintés
d’une douce contemplation. C’était la première fois qu’elle voyait une telle
expression dans les yeux du meilleur ami de Duo.
Relena, consciente de son doux
malaise s’abaissa alors pour saisir la tasse qui lui avait été préparée,
bientôt suivie dans son mouvement par les autres.
Quelques mots furent échangés mais
malgré cela, un silence lourd de signification s’installa. Les deux pilotes
s’échangèrent un regard hésitant, mais ce fut finalement la princesse qui
trancha.
-Je crois qu’il vaudrait mieux que
nous en parlions ce soir plutôt que de passer une nuit à taire ce qui nous
préoccupe tous.
L’approbation fut générale et
Heero enchaîna :
-Le sommet des Colonies a lieu
demain soir. C’est Onze qui le présidera. Officiellement il est venu expliquer
les raisons de l’interruption des communications entre les Colonies et la
Terre… j’ignore ce qu’il espère mais il est clair que sa crédibilité a été
largement remise en cause depuis l’attaque de Sank, fit-il, professionnel.
-Tu veux dire qu’il part perdant…
mais alors pourquoi… pensa tout haut la jeune brune jusqu’à ce que ses traits
se crispent. Vous… n’y pensez pas ! bafouilla-t-elle, comprenant soudain.
-Si. Les Epyons Terros projettent
de prendre le pouvoir par les armes. Le conseil général ne sera qu’un moyen de
détourner l’attention et d’éliminer d’un seul bloc tous les pacifistes…
confirma Duo.
-Cela leur permettra de disperser
la Résistance et d’asseoir leur pouvoir sur le peuple, reprit Heero. Il nous
faut élaborer une contre offensive et utiliser toute la puissance de la
Résistance si l’on veut éviter que l’histoire se répète…
-… je vais y aller… intervint
alors une voix étrangement sereine.
Heero se tourna spontanément et
posa sur elle un regard, bien malgré lui, empli d’inquiétude. La jeune fille
l’accueillit dans un faible sourire.
-Je vais aller au sommet des
Colonies et arrêter Onze. Je suis la seule à avoir suffisamment d’influence
pour le faire et tu le sais.
Elle avait raison, il le savait…
mais l’accepter c’était autre chose. Accepter qu’elle risque ainsi sa vie avait
à présent une toute autre dimension pour lui. Bien sûr il avait toujours eu
peur pour elle, mais ce qu’il ressentait à présent était à la quintessence de
ce qu’il aurait seulement pu s’imaginer il y a deux ans. Mais il y avait
également la mission… il se devait de l’accomplir sans quoi les conséquences
seraient désastreuses pour la Terre et les Colonies, il en était conscient… oui
mais aller jusqu’à jouer ainsi avec la vie de Relena…
Heero perdu dans ses pensées
sursauta lorsqu’il sentit la paume chaude de la jeune fille contre sa mâchoire.
Il était torturé, elle le voyait. Encore aujourd’hui elle se surprenait à
constater à quel point il tenait à elle… à quel point il était un être doux et
sensible à ses yeux… elle en frissonnait encore. Cependant son regard ne
s’altéra pas et accueillit le jeune homme tourmenté avec douceur et confiance.
-Tout se passera bien Heero.
J’ai confiance en toi. Confiance en vous. Nous devons agir ou sinon il sera
trop tard. Et ça je ne me le pardonnerais jamais.
Ils restèrent ainsi face à face
jusqu’à ce que le jeune homme, accablé, ne détourne son regard. Un voile de tristesse
obscurcit les yeux d’océan de la princesse alors qu’elle resserrait doucement
sa prise.
-Heero…
Le pilote répondit à son appel,
lui révélant l’ampleur de sa peine. Relena resta un instant sans voix face à la
profondeur de ses sentiments.
-C’est que… je ne veux pas te
perdre… souffla-t-il affecté, surprenant les membres en présence.
Un tendre sourire accueillit sa
réplique.
-Jamais tu ne me perdras.
Souviens-toi… quoi qu’il advienne.
Le regard du jeune homme
s’apaisa alors face à sa force tranquille. Elle le voulait vraiment, cela se
voyait. Il devait continuer à croire en elle.
-Je ne serais pas loin.
Ils restèrent ainsi quelques
secondes à s’observer avant de se tourner vers Duo et Hilde dans un même
mouvement, leurs regards à présent confiant.
-Cela fait déjà plusieurs jours
que nous planifions une attaque lors de cette assemblée, précisa alors la jeune
habitante de L2.
-Oui. Mais je ne fais pas
vraiment confiance à G, pas plus qu’Heero. Pas que je mette en doute sa volonté
de défendre les Colonies, mais lui et les autres ont des idées vraiment
tordues… Mieux vaut s’assurer de leur projet par nous même, j’ai pas envie
d’avoir de mauvaises surprises…
-Nous rejoindrons le QG de la
Résistance demain matin, trancha Heero.
-Oui, nous avons tous besoin de
repos… Heero et Relena, vous avez la
première chambre à droite, fit-elle, remerciant Duo du regard de l’avoir
prévenue à temps pour le jeune couple, et nous on sera en face, termina-t-elle
dans un sourire.
Les deux concernés s’échangèrent
un regard entendu.
-Tu es sûre que tu n’as pas
besoin d’aide ? s’assura la princesse.
-Il ne me reste que quatre
tasses qui se courent après à ranger, je pense que ça devrait aller !
fit-elle dans un sourire reconnaissant. Allez vous reposer, vous en avez
besoin.
-Bien alors bonne nuit à vous,
leur souhaita-t-elle, accompagné par un hochement de tête de Heero.
-Bonne nuit, et soigne bien
notre petit kamikaze Rel’.
La princesse sourit alors que le
concerné lui jetait un regard de travers.
-Compte sur moi Duo.
Leurs pas se perdirent bientôt
dans la montée d’escalier, laissant place au silence.
Ils restèrent un instant serrés
l’un contre l’autre savourant cette présence réciproque qui leur avait tant
manquée.
-Pardon Hilde… Pardon de ne pas
avoir été là alors que ta vie était en danger… souffla-t-il, effleurant ses
côtes douloureuses.
La jeune fille se crispa à son
toucher, trahissant ses blessures qu’elles avaient tues.
-Comment sais-tu… fit-elle d’une
petite voix.
-J’ai toujours gardé un œil sur
toi. Lady Une me devait bien ce service. Tu as eu beaucoup de chance.
-J’étais comme un fauve en cage à
faire les cents pas à attendre quelque signe de ton retour. J’en pouvais plus…
et lorsque je t’ai vu avec le Deathscythe… j’ai cru que mon cœur allait lâcher…
alors tant qu’à être désespérée, je me suis dit qu’il valait mieux que je serve
à quelque chose ! s’exclama-t-elle dans un sourire qui se voulait assuré.
Mais Duo n’était pas dupe, cette
attitude là il ne la connaissait que trop bien et d’un geste, il dissipa cette
façade d’enthousiasme.
-… pourquoi te caches-tu
ainsi ? l’appela-t-il doucement alors qu’il saisissait son visage,
cherchant son regard d’ange.
Mais lorsqu’il rencontra ses yeux,
la tristesse qu’ils renfermaient le saisit au ventre.
-C’est que… je n’ai pas tenu ma promesse…
Mais qu’est ce que je pouvais faire d’autre ! s’exclama-t-elle soudain
d’une voix vacillante.
-Hilde ! haussa-t-il alors la
voix, l’empêchant de s’enfermer. Allons je ne t’en veux pas pour ça… se
radoucit-il aussitôt qu’il eut son regard… comment pourrais-je en vouloir à
celle qui compte tellement pour moi. Hilde je t’aime comme tu es, avec ton
caractère impétueux et ton engagement passionné. Je savais que tu ne pourrais
pas rester longtemps sans agir… j’espérais seulement revenir à temps… mais le
conflit a pris des proportions insoupçonnées… je suis désolé… souffla-t-il
alors que ses yeux se teintaient d’affliction.
La jeune fille, saisie par ce
qu’elle voyait à travers son être céda pour s’effondrer dans ses bras.
Elle le serra avec désespoir, ignorant
ses contusions. Duo répondit à son étreinte avec tendresse, la laissant se
libérer de tout ce qui l’accablait.
Il s’en voulait tellement de la
savoir souffrir ainsi.
-Toi aussi tu m’as manqué… je suis
si heureux d’être enfin revenu.
La petite brune se redressa alors,
prenant appui sur son torse. Le pilote l’accueillit dans un tendre sourire qui
apaisa ses larmes. Les traits de la jeune fille se détendirent dans un
recourbement de lèvres alors qu’une de ses mains se perdait sur le visage du
natté.
Duo apprécia ses caresses et se
laissa aller, fermant les yeux.
Lorsqu’il les rouvrit, Hilde fut
saisie par leur éclat améthyste, brillant d’un désir aimant. Elle frémit
lorsqu’il s’empara délicatement de la main contre sa joue pour l’amener jusqu’à
ses lèvres, déposant avec une infinie tendresse de doux baisers sur chacune de
ses phalanges. Le jeune homme releva alors son regard brûlant et la fixa,
immobile. Il en mourrait d’envie mais il ne ferait jamais rien sans son accord.
Hilde répondit à sa question silencieuse
dans un faible sourire, mais sans laisser apparaître ses véritables attentions.
Elle se libéra de l’emprise du pilote pour saisir son visage entre ses mains.
Elle s’éleva alors jusqu’à lui mais se figea à quelques centimètres de son
visage. Leurs souffles accélérés se mêlèrent alors qu’elle prononçait le
serment qui la liait à lui.
-Je t’aime Duo…
Et elle posa ses lèvres contre les
siennes pour les retirer aussitôt. Elle fixa le jeune homme qui tenta en vain
de garder le contact et se mordit la lèvre inférieure lorsqu’il rouvrit les
yeux, se forçant à ne pas trop rire de son expression contrite. Le natté ne
résista pas longtemps à ce regard espiègle et lui offrit un magnifique sourire.
Il était à sa merci. Hilde ne le fit pas patienter davantage et se tendit de
nouveau, atteignant ses lèvres qui lui avaient tant manqué. Duo referma alors
ses bras sur elle, l’incitant à ne pas rompre le contact. La jeune fille sourit
dans son baiser chaste et se laissa tomber contre lui.
Elle se redressa sensiblement
pendant un instant et il fit aussitôt de même. Elle le rassura d’un regard et
il eut juste le temps de voir pétiller ses yeux avant qu’elle ne se jette sur
lui, l’embrassant avec passion. Duo, surpris perdit l’équilibre et tomba à la
renverse sur le canapé, mais Hilde ne se laissa pas perturber et le suivit dans
son mouvement sans rompre leur baiser. Le pilote répondit à son appel et assura
sa prise sur sa taille, veillant cependant à ne pas attiser ses blessures.
La jeune fille eut un hoquet de
surprise lorsqu’il la retourna sur le dos. Il sépara ses lèvres des siennes
seulement lorsqu’il la sentit s’inquiéter, il la fixa alors dans un immense
sourire qui ne fit que l’inquiéter davantage et avant qu’elle n’ait eu le temps
de comprendre, elle se sentit soulevée du canapé.
-Duo ! s’exclama-t-elle,
surprise s’agrippant à son t-shirt avant d’atteindre son cou.
Et lorsqu’il fut assuré qu’il la
tenait fermement, il la regarda avec malice, mais sa voix fut douce et aimante.
-Il me semble qu’une chambre nous
attend…
Hilde répondit à son sourire et se
détendit, laissant sa tête reposer contre son épaule.
Et le pilote gagna l’étage de la
demeure à présent sombre.
Lorsque Heero sortit de la salle
de bain il retrouva Relena assise sur le bord du lit, bataillant avec ses
cheveux qui s’étaient pris dans un bouton de son gilet. Elle n’utilisait qu’une
seule main pour tenter de se défaire de sa position inconfortable, l’autre
pendant inerte le long de son corps.
Heero posa ses affaires sur la
première commode qu’il trouva et rejoignit la princesse. Relena s’immobilisa
lorsqu’elle le vit s’asseoir face à elle, ne pouvant pas relever sa tête
emprisonnée, elle ne put que poser les yeux sur le bas de son corps, constatant
qu’il ne portait qu’un boxer… la jeune fille rougit et détourna son regard un
peu plus bas.
-Ne bouge pas, commanda la voix
calme du pilote.
Et sans en avoir éprouvé la
moindre douleur la jeune fille se trouva libérée. Elle releva la tête,
surprise. Heero avait vraiment des doigts de fée.
-Ça va ?
Relena cilla. Elle avait eu un
instant de flottement.
-Oui ça va… le rassura-t-elle dans
un sourire. Merci, j’arrivais plus à m’en sortir.
Le pilote fronça imperceptiblement
les sourcils.
- Ton épaule te fait
souffrir ?
-C’est rien, c’est juste que j’ai
un peu trop forcé, dévia-t-elle la question, soulevant son bras avec faiblesse,
trahissant ce mal qui la rongeait encore.
Le jeune homme se pencha,
saisissant le poignet d’une de ses mains alors qu’il bloquait l’autre au niveau
de l’épaule convalescente.
Relena se laissa faire, suivant
les mouvements qu’il imposait à son corps, mais cette fois ce n’était pas
indolore et elle laissa échapper un gémissement lorsqu’il tira un peu plus fort
sur son épaule. Heero s’excusa et relâcha aussitôt la pression.
-Ce n’est rien de grave, c’est
musculaire. Mais fais attention, Sally a bien insisté, tu ne dois pas forcer
tant que tes ligaments ne sont pas totalement régénérés. Il faut que tu essayes
de te détendre.
Relena eut un sourire triste à son
conseil. Le pilote lui effleura alors doucement la nuque.
-Moi aussi je m’inquiète. Je t’en
prie, n’en fais pas plus que tu ne le peux.
-S’il te plaît, n’en parlons pas
ce soir… j’aimerais que cette nuit ne soit qu’à nous deux.
Un tendre sourire éclaira alors le
visage du pilote et il hocha affirmativement la tête.
-Ça va aller pour la douleur ou tu
veux que je te donne quelque chose ?
-Ça ira.
La princesse le fixa alors un
instant puis se releva, lui indiquant d’un geste de l’attendre. Il la suivit du
regard pour la voir se diriger vers son sac, elle s’accroupit et chercha
pendant quelques secondes pour en ressortir une petite trousse blanche.
Elle revint s’asseoir face à lui,
et en silence, pansa ses blessures.
Elle repoussa doucement ses
cheveux humides et odorants et nettoya précautionneusement la blessure à
l’arcade, légèrement durcie. Heero abaissa la tête pour lui faciliter l’accès
et se laissa faire.
Le pilote se redressa sensiblement
lorsqu’il la sentit se retirer. Elle lui offrit un faible sourire puis se
retourna vers la petite trousse de soin. Une fois munie du nécessaire, elle
s’abaissa vers lui, s’assurant d’abord du bon rétablissement de l’éraflure
provoquée par l’impact de la balle. Et inévitablement son cœur se serra en
revoyant les images défiler dans son esprit… dire qu’elle avait faillit le
perdre définitivement. Par sa faute.
Sa main trembla un instant à cette
pensée et Heero se crispa lorsqu’elle effleura malencontreusement sa blessure.
La princesse s’excusa dans un murmure et se força à rester concentrée. Elle
était tellement nerveuse qu’elle se savait capable de s’effondrer en larmes à
tout instant. Elle avait tellement peur. Tellement peur de le perdre.
Qu’allait-il se passer une fois qu’elle serait de nouveau la princesse
Relena ? Elle n’aurait plus aucun répit, elle le savait. Ce qu’elle avait
vécu ces derniers mois avait été un don du ciel inespéré. Malgré tous les
moments difficiles, elle en avait retiré un réel bienfait. Ce fut un bonheur de
partager pendant un instant l’existence de ces jeunes hommes qu’elle avait si
longtemps espérés mieux connaître. Ils lui avaient tant apporté. Leur amour fut
pour elle le plus beau des cadeaux. Tout particulièrement celui d’Heero…elle
voulait tellement traverser l’existence à ses côtés. Leurs chemins étaient-ils
si différents pour qu’ils ne puissent partager le bonheur de vivre
ensemble ? Il est vrai qu’ils semblaient si opposés en apparence… Si
opposés au regard des autres… au regard des Hommes… Il ne serait rien épargné à
Heero s’il restait à ses côtés. Et elle ne voulait pas lui imposer ça. Il avait
déjà bien assez souffert.
Ayant terminé d’appliquer la
pommade anesthésiante sur les côtes violacées du pilote, la jeune fille coupa
court à sa réflexion, revenant soudain à la réalité. Elle se força à se
recomposer une expression convenable mais lorsqu’elle releva les yeux, elle
constata que sa tentative avait été vaine. Heero la fixait, probablement depuis
déjà plusieurs minutes et ses yeux trahissaient son inquiétude.
Cette expression lointaine qu’elle
affichait était habituellement attendrissante à ses yeux, mais ses gestes
aujourd’hui trahissaient tout autre chose qu’une simple rêverie. Et il n’aimait
pas ça. Relena vivait trop mal sa décision. Cela n’amènerait rien de bon si
elle continuait dans cet état d’esprit… pourquoi s’obstinait-elle si cela la
faisait tellement souffrire ? Elle était bien trop généreuse à son
entendement. Et la même erreur que par le passé risquait de se répéter. Si ce
n’était pire encore…
Relena sembla anticiper son
intervention, le faisant taire en déposant un baiser tout près de ses côtes
douloureuses.
Apparemment les mots étaient à
proscrire ce soir … Heero n’eut pas le temps d’approfondir sa réflexion
lorsqu’il se fit surprendre par les lèvres tendres de la princesse, saisi d’un
frisson qui le fit trembler tout entier.
La jeune fille sourit doucement à
sa réaction et déposa encore quelques baisers sur sa peau hâlée aux odeurs de
fruits exotiques. Heero cessa de résister à son appel et s’autorisa à fermer
les yeux pendant un instant, la laissant attiser son désir.
Le pilote releva ses paupières
lorsqu’il la sentit se retirer, il rencontra alors les prunelles bleu ciel de
la princesse, teintées d’un amour qui avait pris le pas sur ses angoisses. Elle
lui sourit timidement et Heero ne la laissa pas plus longtemps dans
l’indécision, faisant glisser une main contre sa nuque alors qu’il s’abaissait
vers elle. Il l’effleura dans un baiser chaste avant de s’emparer de sa lèvre
inférieure qu’il titilla et mordilla avec affection. Il la sentit sourire à sa
provocation avant qu’elle ne lui cède, le laissant pénétrer en terrain déjà
conquis. Le pilote l’embrassa avec délicatesse, prenant le temps comme si la
découvrait pour la première fois. Relena frissonna à son étreinte et il la
sentit s’abandonner, se libérant de cette pression qui accablait chaque
parcelle de son corps. Heero l’entoura aussitôt de son bras libre, assurant son
équilibre. La princesse se laissa conduire et remonta la main de son torse
jusqu’à sa joue qu’elle effleura avec tendresse avant de se perdre dans ses
cheveux d’ébène encore humides.
Leurs souffles se firent plus
court et leurs corps se tendirent alors que leur étreinte devenait plus
passionnée.
Relena se laissa allonger sur le
lit alors que Heero, à présent au-dessus d’elle, interrompait doucement leur
baiser. Il effleura délicatement ses lèvres une dernière fois avant de
descendre sur son menton, puis sur la peau fine de sa nuque. La jeune fille
tressaillit à son toucher avant de le serrer un peu plus contre elle,
descendant sa main jusqu’aux épaules fines et sèches du jeune homme. Le pilote,
enhardi, laissa glisser une de ses mains, effleurant ses côtes avant de
remonter sur son ventre. Il joua doucement de ses doigts sur cette partie
sensible de son corps, jusqu’à ce qu’il sente à travers sa paume le cœur
accéléré de la princesse. Heero cilla, prenant soudain conscience de ce qu’il
était en train de faire, il recula spontanément.
Il l’aimait trop pour se laisser
emporter.
Ces yeux encore dilatés
rencontrèrent alors ceux de la princesse. Elle fut un instant soulagée de voir
qu’il allait bien avant que son regard ne s’assombrisse d’une nouvelle anxiété.
Le pilote la rassura en lui caressant doucement le front alors qu’il se
redressait, stabilisant son appui sur son coude. Mais il perçut malgré tout le
malaise persistant de la jeune fille et rompit le silence avant que cela
n’empire.
-Relena, je ne veux pas…
-Pardon, l’interrompit-elle alors,
je t’ai mis dans une situation délicate sans penser que tu puisses… ne pas en
avoir envie, souffla-t-elle en détournant son regard rougissant.
Heero la fixa sans comprendre,
depuis quand faire l’amour était-il si important pour elle ? Le regard du
pilote fut alors traversé d’un élan de volonté. Quoiqu’il en soit il ne la
laisserait pas ainsi s’affliger. Et d’un revers de main, il remonta le long de
la joue de la jeune fille, l’invitant à relever ses yeux sur lui.
-Bien sûr que j’en ai envie,
fit-il doucement alors qu’il retrouvait son regard, seulement je ne veux pas
précipiter les choses. Je préfère m’arrêter tant que je me sais encore capable
de me contrôler… sourit-il faiblement, arrachant le même geste à la princesse.
Mais la pâle lueur d’amusement s’effaça bien vite au profit de son inquiétude
sous-jacente.
Il la regarda, concerné alors
qu’il effleurait de nouveau sa peau de pêche.
-Relena, pourquoi es-tu si
triste ?
A cette question la gorge de la
jeune fille se serra et ses yeux se brouillèrent d’humidité. Parfois s’entendre
dire l’évidence était un véritable coup de glaive au cœur. Et la princesse se
mit à trembler, tentant avec désespoir de ne pas se laisser submerger par les
larmes.
-Ça va, ne t’inquiète pas, le
rassura-t-elle alors qu’elle s’efforçait de contrôler ses spasmes.
Et Heero malgré son inquiétude,
s’immobilisa, acceptant de la laisser se reprendre seule.
-Relena, si tu ne veux pas en
parler…
Mais un hochement de tête
négatif le fit se taire aussitôt.
-C’est que… j’ai peur…
souffla-t-elle le regard vacillant. Je veux me battre pour la paix… mais je
suis terrorisée… à l’idée de te perdre… avoua-t-elle alors que son regard se
faisait plus dur, marquant son effort de ne pas s’effondrer en larmes.
Mais le pilote n’y tint plus et
rompit la distance qui la séparait d’elle la soutenant dans une caresse
aimante.
-Tu ne me fais pas
confiance ? la questionna-t-il doucement.
-C’est en l’avenir que je n’ai pas
confiance...
Le jeune homme eut un regard
tendre à sa réplique.
-Relena, le courage consiste à dominer sa peur, non pas à ne pas avoir peur.
-Il y a
certaines choses pour lesquelles la force me fait défaut…
-Tu as
toujours été la plus forte. Et aujourd’hui encore c’est le cas.
La jeune
fille allait contester lorsqu’elle fut saisie par le regard du pilote… dont les
paroles ne firent que confirmer ce qu’elle voyait déjà.
-… alors
imagine ce que moi je ressens…
Les yeux de
la princesse vibrèrent d’émotions.
-… parfois
j’aimerais être née sous un autre nom… mais il me suffit de penser à toi pour
me dire que ça vaut le coup que je me batte… Je n’aurais jamais été vraiment
moi-même si je ne t’avais pas rencontré…
La jeune
fille releva alors une de ses mains tremblantes qu’elle posa contre sa joue. Et
son regard se fit plus intense encore.
-Quoique tu
puisses en penser, tu es quelqu’un d’une sensibilité rare.
Le pilote
lui sourit doucement alors que son regard se faisait plus profond. C’était la
première fois qu’elle le voyait reconnaître cette partie de lui-même.
Et la joie
de cette nouvelle chassa ses angoisses, éclairant son visage d’un tendre
recourbement de lèvres.
Leurs
regards se confondirent l’un dans l’autre et ils se soumirent respectivement la
question initiale. Heero lui sourit doucement alors que ses yeux se teintaient
d’amour. Il effleura sa chevelure, se perdant un instant dans sa contemplation
avant de prendre la parole :
-Je suis
conscient que plus rien ne sera pareil pour toi demain. Mais je ne veux pas que
cela t’incite à faire quelque chose dont tu n’as pas vraiment envie.
-Cette nuit
je veux être avec toi. Entièrement. J’en ai besoin… répondit-elle avec une
sincérité qui traduisait un élan du cœur issu du plus profond de son être.
Il en
frissonna presque alors que son cœur accéléré le faisait vibrer tout entier.
Mais il lui fallait faire encore une chose avant de se laisser aller. Même s’il
avait été gêné que Duo soit venu lui en parler, il s’avérait finalement qu’il
lui avait une fois encore sauvé la mise.
Le jeune
homme déposa un baiser sur le front de la princesse et s’apprêtait à se relever
lorsqu’une main le retint.
-Ce ne sera
pas nécessaire… souffla une petite voix, accompagné d’un regard blessé.
Heero la
fixa sans comprendre, un instant inquiété qu’elle ait pu mal prendre son
initiative. Mais la jeune fille ne le laissa pas se questionner davantage.
-Je ne
risque pas de tomber enceinte… du moins pas pour l’instant…
Relena vit
alors dans ses yeux la blessure que cette nouvelle avait provoquée en lui… et
la colère sous-jacente.
-C’est Onze
n’est ce pas…
-Sally
ignore d’où cela peut venir… d’un mauvais coup… d’un corps trop faible… ou tout
simplement d’un blocage de ma part… Je voulais que tu saches… mais je n’ai pas
vraiment envie de m’étendre dessus… termina-t-elle faiblement, affectée.
Heero,
touché par cette triste nouvelle, ne fut que renforcé dans sa volonté de rester
à ses côtés. Il l’aimait tellement. Et il allait le lui prouver.
Et encore
perdu dans ses pensées, c’est avec surprise qu’elle accueillit le baiser du
pilote. Elle se crispa soudain et se retint pour ne pas laisser des larmes
d’émotions s’écouler à son étreinte qui trahissait tant de sentiments.
Et à son
être si proche du sien, tout disparut bientôt autour d’elle pour ne laisser
qu’eux.
Heero reprit
la conquête de son cou, effleurant de baisers humides sa peau si fine.
Il put
sentir sous ses lèvres ses frissons venir tendre son corps avant de disparaître
doucement, comme un doux remous d’une mer paisiblement agité. Le jeune homme
sourit tendrement à l’effet qu’il provoquait en elle et remonta jusqu’à son
visage, l’embrassant avec dévouement. Relena répondit à son étreinte tout en
faisant doucement glisser sa main sur son torse, le parcourant du bout des
doigts jusqu’à ce qu’elle sente le pilote se figer un instant avant de tenter
instinctivement de se soustraire à sa tendre pression. Mais il contint son
geste et la laissa se jouer de ses faiblesses.
Et alors que
leur baiser se faisait plus conquérant, Heero cessa soudain ses caresses
suggestives et l’entoura de ses deux bras, la soulevant avec assurance. La
princesse se laissa retomber contre son torse, l’enlaçant avec désespoir. Le
pilote lui sourit faiblement et déposa un baiser contre son cou avant de se
saisir du drap et de le dégager d’un large geste du bras. Il se redressa alors
pour rencontrer le visage de Relena, faiblement éclairé par la lumière tamisé
de la petite lampe de chambre. Elle lui sourit doucement avant de déposer un
baiser à la commissure de ses lèvres et de descendre encore hésitante jusqu’à
sa nuque puis son torse. Heero la laissa s’habituer à lui, la rassurant dans
une caresse encourageante. Et lorsqu’elle chercha de nouveau le contact
réconfortant de ses lèvres, le pilote lui répondit avec délice. Et lorsqu’ils
se séparèrent ils se fixèrent l’un et l’autre d’un regard empli de confiance.
Et Heero, sans la quitter des yeux, fit alors doucement glisser la bretelle de
sa nuisette, suivant le relief de son épaule dans une caresse aimante. Relena
frissonna de nouveau lorsqu’elle sentit sa main descendre sur sa poitrine, elle
aurait juré qu’il avait perçu son appréhension puisqu’il s’empara aussitôt de
ses lèvres.
La princesse
ferma les yeux et à partir de cet instant abandonna toutes ses défenses. Relena
nota à peine les doigts agiles du jeune homme qui firent glisser la fermeture
éclair avant de lui ôter doucement la fine nuisette de soie mauve.
Heero
aperçut tout juste ses yeux d’océans, mais leur lueur doucement fiévreuse ne
firent que confirmer ce qu’il ressentait déjà à travers les gestes de la
princesse. Il n’abaissa pas son regard sur son corps nu et la serra contre lui,
l’étreignant avec délicatesse.
-Jamais je
ne te ferais de mal.
-Je sais…
j’ai confiance en toi… souffla-t-elle alors qu’elle enserrait sa taille,
réduisant l’espace qui séparait encore leur deux corps.
Et c’est
avec spontanéité que leurs lèvres se rencontrèrent de nouveau dans un baiser
attisé par un désir dont la sincérité était marquée par plusieurs années de
frustration.
Heero
l’allongea alors, prenant soin de l’installer décemment. Et sans rompre leur
baiser il les recouvrit du drap blanc. Relena eut un sursaut de surprise
lorsqu’elle sentit quelque chose de rigide contre son estomac qui ne devait pas
être l’arme à feu du pilote.
Heero se
rapprocha davantage encore, recouvrant son corps du sien. Le souffle court, ils
furent contraints de rompre leur baiser. Ils se fixèrent, haletants et il vit
de nouveau cette vague lueur d’hésitation dans le regard de la princesse. Son
expression se radoucit aussitôt, et il la contempla avec une tendre envie, elle
était si belle, ses cheveux aux reflets dorés tombant en cascade tout autour
d’elle. Il sourit doucement à cette vision d’ange auréolé et la regarda avec
amour, chassant de son visage les mèches qui y courraient en travers.
Il voulait
attendre que Relena s’apaise avant de continuer mais elle le devança, déposant
un baiser attisant à la pointe de son menton. Le jeune homme sourit à sa provocation
et effleura ses lèvres avant de descendre le long de son cou, suivant sa
trachée.
Ce n’était
pas comme si c’était la première fois qu’il découvrait les courbes de son
corps, et il devait bien se l’avouer, cela l’aidait déjà grandement.
Il continua
patiemment sa descente, parcourant chaque parcelle de son corps, revenant à ses
lèvres à chaque fois qu’il la sentait s’inquiéter.
Relena prit
cependant peu à peu confiance en elle, et le désir aidant, ses caresses se
firent plus osées. Jusqu’à ce que ses mains s’arrêtent sur ses hanches
étroites, figées sur la bande élastique de son boxer. Il la sentit resserrer un
instant son emprise avant de renoncer aussitôt. Le pilote cessa alors doucement
de l’embrasser et rouvrit les yeux. Son regard, il voulait la voir, s’assurer
qu’il n’était pas en train de commettre une erreur. La jeune fille sembla
accéder à sa demande puisqu’elle plongea alors ses yeux dans les siens. Un ciel
d’été et une nuit d’hiver se rencontrèrent alors, bouleversant tous les ordres établis.
Les yeux brillants de la princesse révélèrent à Heero l’ampleur de sa détresse…
qui aurait cru qu’il persistait toujours en elle cette crainte de l’être
humain ? Et alors que sa volonté se trouvait renforcée, son regard se
teintait de douceur. Oui il avait raison, elle était la plus forte. Elle
continuait à y croire, s’efforçant de faire taire ses peurs les plus ancrées.
Mais ce soir, elle avait besoin de lui. Et il allait lui prouver qu’elle avait
encore des raisons de croire en l’homme.
Et doucement
il posa sa paume tendre et chaude sur la main de la jeune fille. Ils se
regardèrent une dernière fois et lorsqu’il eut son accord il s’abaissa vers
elle et saisit doucement ses lèvres alors que leurs mains entremêlées ôtaient
le dernier rempart à leur ultime communion.
Et lorsqu’il
vit des larmes s’écouler de ses yeux d’une profondeur presque inquiétante, il
sut que c’était autant de douleur que d’émotions intenses. Il s’abaissa avec
effort jusqu'à elle et fit disparaître dans un baiser chacune des gouttelettes
de liquide salé. Il sentit soudain une chaleur nouvelle monter en lui et alors
que la jeune fille se cambrait, épousant chaque courbe de son corps, elle
s’agrippa soudain à sa nuque au moment même où il refermait lui aussi ses bras
sur elle. Leurs corps tendus à l’extrême se figèrent lorsqu’ils ne devinrent
plus qu’un seul et même être, leur essence se confondant l’une avec l’autre.
L’instant d’immobilité se volatilisa comme une vague illusion et le rythme
entraînant de la vie reprit ses droits.
Et c’est
avec dévotion que les deux amants s’abandonnèrent dans les bras l’un de
l’autre, jusqu’à échanger un tendre baiser avant de laisser leurs corps se
reposer, leur chaleur réciproque les entourant d’un voile rassurant.
****************************
Alors tout d’abord je remercie
la BO de la cité des anges et de love actually pour m’avoir accompagné dans
cette entreprise difficile ^^’’
Euh cette dernière scène a
vraiment été très chiante à écrire pour moi et je crois pas que je
recommencerais ^^’’
KiwiDieu a ralenti la cadence,
l’est un peu fatiguée, mais elle veut pas écrire n’importe quoi, alors
patientez ^_^
Chapitre commencé le 20/05/2004,
terminé le 27/07/04