Note 1: Il est bien évident que je prends de grandes libertés en ce qui concerne le dédoublement de personnalité ou personnalités multiples. Si certains s'y connaissent dans ce domaine j'espère qu'ils ne m'en tiendront pas rigueur. Sur ce je vous souhaite bonne lecture.

Chapitre VI

Fébrile, Wufei remuait avec un vieux tisonnier les braises d'un feu presque mort. Il ressentait le besoin vital de s'occuper les mains et ne cessait de s'agiter. Amaya le rejoignit devant l'âtre et déposa dans le feu leur dernière bûche. Aucun des deux ne parlait, plongés dans leurs pensées réciproques. La jeune fille lui avait fait part de ce qu'elle savait sur Roger, la magie noire et les démons, ce qui sommes toute était fort peu.
Le chinois jeta un coup d'oeil sur le cadran de sa montre en argent puis grimaça.
- Je dois rentrer, j'ai de petits problèmes personnels à régler...
Rien qu'à l'évocation des dits problèmes il semblait déjà épuisé, voir terrassé.
- ... Mais ça m'ennui de vous laisser seule avec Duo dans cet état, je vais demander à Heero de venir.
- Je ne vois pas trop ce qu'il fera si la créature revient.
- Il le regardera de travers et l'autre s'enfuira en courant, enfin en se désagrégeant.
Wufei tentait de faire de l'humour pour détendre un peu l'atmosphère mais la pointe d'amertume dans sa voix brisait cet effort. Il sorti de la poche de sa veste en daim beige, posée sur une chaise, un téléphone portable grand comme une cuillère à café et lança le second numéro en mémoire.
- Allo ? Trowa ? Je te croyais en Afrique ! Heero est là ? Sous la douche. En fait je voulais lui demander de venir passer la nuit chez Duo mais si vous êtes deux c'est encore mieux. Oui en effet il y a un problème.
Trowa enclencha le haut parleur pour qu'Heero puisse entendre pendant qu'il s'habillait et Wufei conta une fois de plus son histoire.
- Hein ? Non. Je vous jure sur mes ancêtres que je n'ai rien absorbé de légal ou d'illégal ! Écoutez on pourrait peut-être remettre cette discussion à plus tard ! Je vous attend !
Amaya le dévisagea un peu inquiète.
- Vous croyez qu'ils viendront ? Ils vont peut-être croire que c'est une plaisanterie.
- Vous trouvez que j'ai l'air de quelqu'un qui fait des blagues ?
- Vu sous cet angle.
- Les oreilles de ma douce et tendre doivent fumer comme une locomotive à vapeur. Je lui avais promis de rentrer tôt et il est déjà dix neuf heures trente.
Wufei lança un nouveau numéro sur son téléphone et bien qu'il se soit éloigné, Amaya pouvait l'entendre donner de vagues explications pour justifier son retard. Que des mensonges naturellement. Il faut dire à la décharge de Wufei que ce n'était pas le moment de dire à sa femme qu'il se trouvait chez l'homme avec lequel il avait partagé la veille une certaine intimité. Amaya ne pouvait s'empêcher de ressentir de la compassion pour Liu même si elle ne la connaissait que très peu. Sans doute la solidarité féminine. Il était facile d'imaginer à quel point elle devait souffrir. Wufei raccrocha un peu brutalement et elle en déduisit que c'était pour couper court aux reproches. Elle le vit s'asseoir sur la table basse pour repousser quelques mèches éparses sur la joue de Duo.
- C'est fou comme ma vie était ordinaire avant que tu débarques.
Sa voix était tendre. Il prit doucement le jeune homme dans ses bras puis le monta à l'étage pour le déposer avec délicatesse au creux du matelas. Amaya l'avait précédé afin d'allumer la petite lampe de chevet pour que le chinois ne se prenne pas les pieds dans le tapis, qui en bon faux jetons, attendait que des pieds inattentifs passent à sa portée. Sans tenir compte de la présence féminine il admira un instant le corps sensuel de l'américain. Son peignoir laissait entrevoir un torse pale et juste un peu musclé. La soie épousait harmonieusement la courbe tentatrice de sa hanche et de sa chute de rein... Les charmes de Duo avaient toujours eu sur lui un effet presque aphrodisiaque. Il lui suffisait de le regarder pour le désirer. Il caressa presque avec dévotion une cuisse à l'attrait quasi diabolique. Comment un être endormi pouvait-il faire preuve d'une telle lascivité. Duo n'était que volupté, chaque atome de sa personne était un appel au libertinage. Face à lui le chinois se faisait toujours l'impression d'être un hybride de paillard et de pervers. Mais ce qu'à l'instant Wufei ne pouvait ignorer et qui tuait en lui toute idée de luxure, c'était les innombrables marques que laisse une étreinte passionnée. A la vu des suçons et des griffures il ressentit a nouveau la morsure cruelle de la colère. A une nuance près, elle était également dirigé contre Duo. C'était injuste, son côté rationnel le lui hurlait, mais une petite voix fielleuse lui susurait des remarques désagréables comme le fait que Duo aurait du s'apercevoir que cette chose n'était pas lui. Mais pire que tout elle lui rappelait à quel point Duo semblait prendre du plaisir avant que wufei n'intervienne avec son entrée fracassante. Amaya toussota pour le ramener à la réalité et Wufei rabattit enfin les couvertures.
- Tu ne sais pas si Duo voit quelqu'un sur L2.
- Tu veux dire s'il a un ami ?
- Non je parles d'un psychiatre.
- Je ne sais pas... Mais j'ai vu qu'il avait un agenda électronique, s'il est suivi par un psy, il y a probablement son numéro de téléphone dedans tu ne crois pas ?
Sans même s'en apercevoir ils étaient passés au tutoiement.
- Si, c'est bien vu. Tu sais où il le range ?
- La dernière fois que je l'ai vu il était sur la bibliothèque.
Ils laissèrent la lampe allumée au cas ou le jeune homme se réveillerait puis redescendirent au salon. Là Wufei étudia la liste de noms enregistrés sur le petit appareil.
- Il n' y a que trois médecins, ça ne devrait pas être dur de trouver. Demain je demanderais à Claire de s'en occuper. Je crois que voilà vos gardes du corps.
Wufei les fit entrer et Amaya se dit qu'elle laisserait bien le plus grand garder son corps de très très près.
- Je vous présente Trowa et vous vous souvenez de Heero je pense.
- Oui bien sûr. Bonsoir.
Cet endroit était un vrai nid de mecs super canons ! C'etait à croire que quelqu'un en faisait l'élevage !
- Bon là il faut vraiment que j'y aille. Je vous laisse, je passerai demain. Duo devrait dormir toute la nuit.
Tout en parlant il remettait sa veste et se dirigeait vers l'entrée à grands pas.
- D'ici là je pense qu'il sera de nouveau lui-même. Salut les gars et merci.
Restaient seuls les deux jeunes hommes et Amaya s'observèrent, un peu gênés par le silence qui venait de s'installer.
- Il est gonflé. Souffla Trowa
Heero hocha la tête.
- Tu trouves aussi.
- Ne lui en veuillez pas, sa femme l'attend et il est en retard.
- Et depuis hier elle doit être sacrement en pétard ! Espérons qu'elle n'assaisonnera pas ses rouleaux de printemps à l'arsenic.
Les yeux émeraudes dévisagèrent un instant celui qui fut le soldat parfait.
- Je me demande si je ne préférais pas quand tu n'avais pas d'humour.
- Mais je ne plaisante pas. Une femme bafouée peut devenir très dangereuse.

Au grand soulagement de tous la nuit ne vit venir aucun démon. Néanmoins Duo fut le seul à dormir tout son soûl. Amaya était trop inquiète et les ex pilotes sur le qui vive. Wufei les trouva donc tout les trois, attablés devant une tasse de café, les yeux un peu cernés. Lui même n'avait de toute évidence pas fermé l'oeil.
- Où est Duo ?
Trowa lui jeta un regard torve.
- Bonjour quand même !
- Oui oui bonjour... j'ai pas trop le temps là !
- Il dort encore.
Wufei tourna les talons sans ajouter un mot.
- Je crois qu'il est toujours amoureux.
- C'est ce formidable esprit logique qui fait de toi un grand homme Heero Yui.
Amaya, dépassée par le caractère un peu particulier de ces deux là, laissait son regard aller de l'un à l'autre. Elle les trouvait bizarres, très bizarres. Ils restaient parfois des heures sans échanger un mot puis avait une conversation de trois lignes avant de retomber dans un parfait mutisme. Malgré cela on devinait une parfaite connivence. L'ennui c'est que leur complicité laissait un peu à l'écart ceux qui n'en avait pas l'habitude.

Wufei entra en silence dans la pièce et s'approche du lit où il fut accueilli pas deux immenses améthystes qui dépassait à peine des draps. Il compris dans la seconde que Duo n'était pas de retour. La lueur interrogatrice et inquiète dans les yeux du jeune homme ne trompait pas. Le chinois s'assit sur le bord du lit avec précaution pour ne pas l'effrayer.
- Tu te souviens de moi ? On s'est vu hier.
L'américain hocha la tête en signe d'assentiment.
- Je m'appelle Wufei, et toi tu veux bien me dire ton nom ?
- Lucas.
- Je suis très heureux de te connaître Lucas. Tu n'as pas faim ?
- Ho si !
Il n'y avait pas à dire, Duo, Lucas ou Shinigami il suffisait de le prendre par les sentiments.
- Viens avec moi, on va te préparer un bon petit déjeuner.
Duo sortit du lit à moitié dénudé, la ceinture du peignoir ne tenait plus que par pudeur. Le chinois détourna le regard pour éviter tout risque de pensées dissolues
- Tu vas d'abord t'habiller.
Wufei prit un caleçon, un jean et une chemise blanche dans l'armoire et les déposa sur une chaise.
- Je te laisse faire, lorsque tu seras prêt tu viendras me rejoindre dans la cuisine d'accord ?
- D'accord. Mais mes cheveux y sont plein de noeuds.
- On s'en occupera après le petit déjeuner.
- Mais...
- J'ai dit après.
Duo poussa un soupir de désapprobation mais n'osa pas insister. Wufei retourna près de ses amis et se servit une tasse de café avant de s'asseoir.
- Je croyais que tu étais pressé lui fit remarquer Trowa.
- Je le suis mais je crois qu'il est préférable que je vous dise que Duo n'est toujours pas Duo.
- Tu avais dit que ça rentrerait dans l'ordre... Souligna Heero aussi délicat qu'à l'accoutumée.
- C'est ce que je croyais, les personnalités secondaires comme celles-ci restent généralement en retrait, d'ailleurs par le passé nous n'avons eu affaire qu'à Shinigami. Si Lucas s'est manifesté à un moment ou à un autre il n'est pas resté assez longtemps pour que nous le remarquions.
- Lucas ? s'étonna Amaya.
- C'est le nom qu'il m'a donné tout à l'heure.
- Pourquoi est-ce que nous n'avons pas affaire à Shinigami ? c'est toujours lui qui aide Duo dans les situations difficiles. Argua Trowa avec justesse.
- Quand il s'agit de s'en sortir par la force, la violence oui... Mais c'est un esprit guerrier qui trouve sa raison d'être dans l'action hors ici il ne peut pas aider Duo.
- Tu m'excuseras mais je ne vois pas en quoi un enfant peut l'aider.
- Je pense que c'est parce qu'il est en quelque sorte coupé de Duo, je veux dire que ça permet à Duo d'oublier totalement l'épisode d'hier alors que Shinigami, d'après le peu que m'en a dit Duo, est presque toujours là même s'il ne se montre pas. Leur personnalités réciproques sont beaucoup moins dissociées. Lucas est...
- Sur le pas de la porte coupa Heero.
En effet le jeune homme se tenait là, pieds nus, une brosse prise dans ses cheveux.
- J'arrive pas à l'enlever...
- Je t'avais demandé d'attendre répondit sèchement Wufei, l'oeil noir.
Duo sembla soudain au bord des larmes.
- Et en plus on est tombé sur un pleurnichard ! Allez viens là.
Il tapota une chaise à côté de lui et l'americain s'empressa d'obéir. Le jeune médecin entrepris de défaire la grosse boule de cheveux. Il tourna la tête vers Amaya.
- Tu ne voudrais pas lui préparer quelque chose à manger s'il te plaît ?
- Si bien sûr. Mais j'ai bien peur que nous n'ayons que du lait et des biscottes.
- Alors ça lui ira très bien.
Heero se pencha vers Trowa.
- Si un jour j'ai besoin de consulter un psy, rappelle moi de ne pas m'adresser à lui.
Wufei foudroya le japonais du regard.
- Tu insinues quoi là ?
- Que tu pourrais être un peu plus gentil et ne pas passer ta mauvaise humeur sur lui, c'est Lucas pas Duo. Ce n'est pas très professionnel du reste.
Il allait répondre vertement mais y renonça parce que Heero avait raison et tout les deux le savaient. Mais bougon jusqu'au bout il ne pu tout de même s'empêcher de rajouter que Duo n'était pas un patient et qu'il était impossible qu'il le devienne.
Amaya posa un bol de lait chaud devant Duo avec trois biscottes beurrées et un peu de confiture de fraise puis ramena la conversation sur le sujet le plus urgent : Qui allait s'occuper de Duo aujourd'hui ? Heero et Wufei travaillaient, elle devait s'occuper d'un certain nombre de papiers administratifs concernant son frère et Trowa...
Tout les regard convergèrent vers lui.
- Je vais rester avec lui.
- Au fait, tu ne devais pas séjourner à la réserve naturelle encore quelques mois ?
Trowa replongea le nez dans sa tasse et Heero afficha un sourire en coin.
- Il a fait tellement de barouffe avec les animaux en voix de disparition que le gouvernement l'a prié de bien vouloir allé se faire voir ailleurs. Il a encore mit les pieds dans le plat en évoquant la corruption de certains fonctionnaires et politiciens quant au traffic.
- Tu devrais demander à Quatre quelques conseils concernant la diplomatie si tu veux un jour sauver ces pauvres bêtes.
- Et c'est Wufei Chang qui me dit cela... Je suppose qu'il vaut mieux entendre ça que d'être sourd !
Le chinois reposa la brosse puis se leva.
- Bon c'est pas que je m'ennui en votre compagnie mais j'ai des patients qui m'attendent.
Heero l'imita et les deux jeunes hommes disparurent. Amaya monta se préparer puis suivit le même chemin. Trowa resta donc seul avec l'américain qui grignotait sa biscotte en le surveillant du coin de l'oeil.
- Ça te dirais qu'on aille se promener ? Il fait un soleil magnifique ce serait dommage de ne pas en profiter tu ne crois pas ?
- Il revient quand Wufei ?
- En fin d'après midi.
- On sera rentré ?
- Oui.
- Alors je veux bien.
C'est donc ainsi que le français et Duo passèrent leur journée à l'extérieure. Ils allèrent au zoo où ils passèrent bien une heure devant les pingouins qui fascinèrent Lucas, avant d'aller déjeuner dans un parc où il fallut nourrir les cygnes. Trowa trouvait cela étrange car Duo n'avait jamais manifesté un intérêt particulier pour les animaux en dehors des chiens et des chats. Pour finir ils firent les magasins car Lucas voulait des feutres puis mangèrent une glace à la pistache énorme alors que l'américain détestait ce parfum. Les heures défilaient et l'ex mercenaire ne pouvait que considérer Lucas comme un individu à part entière, il comprenait vraiment ce que Wufei avait voulu dire par personnalité dissociée, il avait tout à fait saisit le sens au point de vue linguistique bien sûr, mais pas ce que cela signifiait au point de vue humain. Il en était à présent parfaitement conscient. Vers seize heures ils étaient de retour à la maison, heureux de leur journée. Trowa avait bien sentit les regards tantôt surpris tantôt moqueurs des gens devant le comportement enfantin de ce jeune homme de vingt six ans mais il n'en avait eu cure. Lucas était un enfant doux, un peu rêveur, renfermé mais curieux de tout, et chose surprenante, très peu bavard. Le français était littéralement sous le charme. Pour un peu il aurait pu oublier qu'il avait toujours affaire à l'un de ses meilleurs amis. C'était comme si Duo avait prêté son corps à quelqu'un d'autre et c'était parfois très déstabilisant même pour Trowa. Quoi qu'il en soit, garder "Lucas" s'était révêler être, malgrè les sourires en coin qu'il avait fallut affronter, un réel plaisir. A présent, pour passer le temps, le français regardait un documentaire sur les Ibis rouges alors que Lucas dessinait sur la table basse du salon. L'ex pilote 03 nota que l'américain s'était installé de manière à pouvoir faire face à la porte d'entrée. A chaque fois qu'un bruit se faisait entendre il relevait le nez de sa feuille Canson avec une lueur d'espoir. Lorsqu'Amaya passa la porte il afficha une telle déception que s'en était presque drole. Par Dieu sait quel miracle Lucas vouait déjà une passion à Wufei, pourtant on ne pouvait pas dire que celui-ci s'était montré sous son meilleur jour. Finallement, dissociée ou pas, toutes les personnalités de Duo semblaient d'accord sur un point. Elles aimaient le chinois. Trowa trouvait cela fascinant.

A suivre...

A suivre...